Les reliques sacrées d'Hitler
Depuis que Horn avait été affecté outre-Rhin, il nâavait pas eu la moindre permission. Il aurait dû, depuis longtemps, bénéficier dâune semaine, quâil avait lâintention dâutiliser pour aller retrouver sa mère quâil nâavait pas vue depuis sept ans.
Les dernières nouvelles quâil avait reçues venaient dâun ami de la famille à Berlin. àla veille de lâinvasion de lâAllemagne par les Alliés, sa mère était partie voir sa demi-sÅur à Iéna, au sud-ouest de Leipzig, et elle nâavait pas pu regagner la maison de famille à Heidelberg. Iéna, occupée par les Soviétiques, nâétait pas lâendroit idéal pour deux femmes allemandes seules, surtout une veuve de soixante-neuf ans et une enseignante célibataire dâune cinquantaine dâannées. Même si son frère Rudolf avait pu échapper à un camp de prisonniers de guerre, il était peu probable que lui ou sa sÅur Elsbeth puissent faire revenir sa mère et sa demi-sÅur à Heidelberg, occupée par les Américains, et encore moins les protéger des exactions des soldats de lâArmée rouge et des bandes errantes de détenus libérés des camps de concentration polonais en zone soviétique.
Horn nâentra pas dans le détail, mais il dit à Hammond quâil se faisait du souci pour sa famille, scindée entre deux zones dâoccupation.
« Je suis inquiet de leur situation et jâaimerais, avec votre permission, voir comment ils vont avant de commencer à Nuremberg. »
Hammond se montra compréhensif. Lui aussi avait une famille â une femme et trois petites filles â, mais elles étaient retournées à Cambridge. Il rassura le lieutenant en lui disant que, une fois sa mission accomplie, il aurait tout le temps dâaller retrouver sa famille. Horn nâavait que trois semaines pour localiser les joyaux de la Couronne avant que les discussions sur leur rapatriement ne commencent à Munich. Après, lâaffaire ne serait plus entre les mains de Hammond.
Lâenthousiasme de Horn à lâidée de travailler pour la MFAA retomba aussitôt. Vingt et un jours pour retrouver des trésors disparus dans une Allemagne déchirée par la guerre, même avec lâaide du conservateur Günter Troche, un historien dâart quâil nâavait pas vu depuis presque dix ans, câétait lâéchec assuré. Il avait passé davantage de temps à faire des esquisses de lâintérieur de la chapelle du dôme de la basilique San Miniato.
« Trois semaines ? » demanda Horn, incrédule.
Hammond resta inflexible, il devait mener à bien son enquête dans le temps alloué. Patton et Eisenhower voulaient éviter ce qui risquait de devenir une situation embarrassante pour le gouvernement dâoccupation américain à Nuremberg. Lâambassadeur de Pologne avait déjà soumis une requête pour que lâautel de Veit Stoss revienne à Cracovie, et les Autrichiens en demandaient autant pour la collection du Saint Empire romain germanique. LâUSFET voulait savoir ce qui sâétait passé dans la chambre forte de Nuremberg. Si une partie du trésor devait se retrouver sur le marché noir et si des soldats américains étaient impliqués, la crédibilité de la MFAA en serait entamée, ainsi que lâensemble des actions que le gouvernement dâoccupation menait en Allemagne.
Le commandant attira lâattention de Horn sur une raison tout aussi importante. Les trésors du Saint Empire romain germanique, comme Horn et Hammond le savaient fort bien, étaient des symboles dâune monarchie mondiale. Câétait pourquoi Napoléon les avait convoités des siècles auparavant, et certainement pourquoi Hitler les avait fait venir en Allemagne. La disparition du bunker de lâallée du Forgeron de la couronne impériale, du sceptre, de lâorbe et des glaives, dit Hammond, pourrait être le signe dâun complot fomenté par la résistance néonazie afin de gêner lâoccupation alliée et saper son action. Si câétait le cas, les procès pour crimes de guerre qui allaient se tenir à Nuremberg risqueraient dâêtre une cible évidente.
Weitere Kostenlose Bücher