Les reliques sacrées d'Hitler
nazis pour ce quâils avaient fait et il ajoutait : « Simplement, on ne juge pas quelquâun avant dâavoir marché dans ses bottes. »
Horn lui-même, au cours de son enfance à Heidelberg, avait souvent entendu semblables discours de la part de son père, le pasteur luthérien. Son père pouvait parfois se comporter en tyran, mais il avait inculqué à son fils un profond respect envers son prochain. On nâétait pas obligé dâaimer tous ceux que lâon rencontrait, mais il fallait apprendre à les tolérer.
Et ce nâétait pas tout. Horn jugeait indigne dâun militaire un certain nombre de conduites, notamment lâivresse en public, une tenue négligée et la chasse aux souvenirs nazis. Mais, comme pour la fraternisation, il y avait des moments où lâon pouvait ignorer les règles. Troquer le contenu de sa cantine pour services rendus â techniquement illégal dâaprès les règlements de lâarmée â en était un autre exemple. Disposer de denrées à distribuer en échange dâinformations pouvait se révéler capital dans lâenquête de Horn.
Dollar fut incité à faire preuve de bon sens et à en accepter les conséquences. Il devait aussi ne jamais perdre de vue la cantine. Sâil se sentait obligé de lâemporter partout avec lui, très bien. Il fallait seulement quâelle soit disponible en cas de besoin.
Dollar promit quâil nâarriverait rien à la cantine de Horn. Pour prouver au lieutenant son sérieux, il récupéra dans le compartiment à outils de la jeep une chaîne avec laquelle il attacha la cantine au support de la roue de secours.
« Veille sur moi, et je veillerai sur toi », conclut Horn.
Le discours de Horn avait été bref ; en effet, comme Dollar le découvrirait par lui-même, le lieutenant ne savait pas ce quâils allaient faire pendant les trois prochaines semaines. Seule chose certaine, son chauffeur nâallait pas passer son temps à le véhiculer dâun camp militaire à lâautre. Ils allaient se mélanger aussi bien avec les civils quâavec les militaires et suivre toutes les pistes qui se présenteraient. Et les entretiens que Horn conduirait nâauraient pas lieu dans une cellule fermée avec un MP armé à proximité pour calmer éventuellement un suspect. Si, comme lâavait envisagé Hammond, un mouvement de résistance pouvait avoir organisé la disparition des joyaux de la Couronne du bunker de Nuremberg, on ne pouvait pas savoir sur quoi ils allaient tomber.
Il nây avait rien de plus à ajouter. A priori , Dollar et lui devraient bien sâentendre, et, dans les semaines à venir, leur rapport allait encore être facilité. Horn se mit à appeler son chauffeur « Kid », car Dollar ne se rasait pas encore, avait de lâacné et nâavait pas terminé ses études secondaires. Et Dollar se mit à appeler Horn « Professeur » parce que le lieutenant ne perdait pas une occasion de lui donner des cours sur toutes sortes de sujets comme lâart, lâarchitecture, la supériorité de lâartisanat allemand et les bienfaits dâune éducation universitaire.
Quelques minutes après leur arrivée, Rosenthal, toujours en tablier, leur servit du poulet avec des pommes de terre sautées de leur propre potager, le tout accompagné dâune bouteille de bordeaux sortie de la cave à vins de lâex-commandant. Après le repas, Dollar fit la vaisselle, Horn lut son courrier et Rosenthal ouvrit une deuxième bouteille de vin, mit leur album préféré de Joséphine Baker sur le tourne-disque et prépara lâéchiquier.
Si en règle générale leurs parties dâéchecs duraient jusque tard dans la nuit, ce nâétait pas uniquement parce que Horn et Rosenthal étaient de force égale ou particulièrement doués, mais parce que le jeu était un prétexte pour parler, boire et permettre accessoirement à lâun de prouver sa supériorité intellectuelle sur lâautre. Leur rivalité remontait à Camp Ritchie, dans le Maryland, où ils avaient tous deux été entraînés. Ãtant lâun comme lâautre nés en Allemagne
Weitere Kostenlose Bücher