Les reliques sacrées d'Hitler
soixante-dix mille sans-abri. àentendre la majorité des témoins, les bombes tombaient sur des ruines, et on avait renoncé à faire lâinventaire des objets et des biens détruits. Le registre sur lequel on inscrivait précédemment les constructions endommagées prenait seulement en compte celles qui étaient encore debout.
àpeu près tous les interlocuteurs de Horn reconnaissaient avoir alors attendu avec impatience lâinvasion des Alliés. La nourriture devenait rare. Il nây avait ni essence, ni eau potable, ni électricité, et la plupart des rues étaient bloquées par des amas de ruines. Faute de bois pour fabriquer des cercueils, les morts étaient enveloppés dans du papier pour être enterrés et les fossoyeurs payés en bouteilles de schnaps. La plupart des habitants croyaient que lâarrivée de lâennemi mettrait fin à leurs souffrances. Lâopinion la plus répandue était quâil valait mieux endurer une fin avec horreur quâune horreur sans fin.
Horn comprenait leur désespoir. En même temps, il devait bien avouer que les habitants refusaient de regarder la réalité en face. Les habitants pensaient que les nations alliées bombardaient injustement leur ville. Peut-être était-ce vrai. Comme Horn lâavait appris grâce aux rapports de renseignements du G-2, le nombre de bombes larguées sur Nuremberg le 2 janvier 1945 avait été supérieur à tout ce qui avait été déversé par les Allemands sur lâAngleterre pendant toute la guerre. Mais les citoyens de Nuremberg â qui protestaient de leur ignorance sur les conséquences de leur soutien au régime nazi, tout en étant incapables de sây opposer â ne sâétaient pas contentés de fournir hommes, armes et nourriture à la machine de guerre nazie. Ils avaient fourni le lieu, la propagande et la pompe dont Hitler sâétait servi pour subjuguer la nation.
Le lieutenant préféra taire lâambiguïté de ses sentiments. Ce nâétait ni le moment ni lâendroit pour accuser. Il revint simplement sur le but de ses entretiens, à savoir obtenir des détails précis sur la gestion du bunker par les nazis et la façon dont ils administraient la ville.
Julius Streicher, à ce moment de la guerre, avait disparu totalement. Bien que toujours chargé dâassurer la défense de la ville, son poste était pratiquement vacant. Au terme dâun scandale qui avait fini par dresser les uns contre les autres de nombreux notables de Nuremberg, Liebel avait accusé Streicher de voler des biens juifs confisqués et dâutiliser les fonds pour son usage personnel. Au moment du déménagement présumé des joyaux de la Couronne du bunker, Streicher avait cessé de venir au quartier général du gouvernement et vivait dans une petite ferme dans les faubourgs de la ville.
Le véritable responsable de la défense de Nuremberg était maintenant Karl Holz, qui avait mis en Åuvre les méthodes extrêmes des nazis, jusque-là seulement appliquées en dehors de lâAllemagne. àses côtés, on trouvait le chef de la Gestapo, Benno Martin, connu pour être un ami dâHimmler. Mais selon les informateurs, élément très intéressant aux yeux de Horn, Martin et Holz ne sâentendaient pas. Les informateurs affirmaient que les deux hommes avaient plusieurs sujets de discorde importants, notamment la nécessité de défendre Nuremberg, qui, pour Martin, nâavait aucune importance stratégique militaire.
Holz était passé outre lâavis de Martin, comme il le fit avec Liebel ultérieurement. Il avait ordonné que toute personne fuyant la ville soit abattue et que les ouvriers ne se présentant pas au travail dans les usines soient arrêtés. De plus, toute personne qui mettrait un drapeau blanc à sa fenêtre ou qui en brandirait un serait exécutée pour trahison.
« Celui qui ne veut pas vivre avec honneur doit mourir dans la honte », avait diffusé Holz dans les haut-parleurs de la ville.
Ce nâétait pas une menace en lâair. Comme lâavaient affirmé successivement tous les témoins, quatre habitants avaient été exécutés publiquement pour
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