Les révoltés de Dieu
humains, provoque une sécheresse qui tarit
les fontaines, les rivières et rend la Terre aride et stérile. La catastrophe, c’est
la sécheresse , et non pas l’inondation
bienfaisante qui va rendre ensuite la vie à une Terre presque morte. Alors qu’on
a considéré le déluge comme un châtiment divin, on a oublié que le véritable
châtiment était ce qui l’avait précédé, c’est-à-dire la sécheresse et la
stérilité du monde. C’est là qu’il faut faire intervenir le mythe grec de Phaéton,
car il contient toute la justification du déluge, aussi bien celui provoqué par
Zeus que ceux provoqués par Enlil et Yahvé.
Si l’on en croit Hésiode et différents poètes grecs, Phaéton
était le fils d’Hélios, le dieu solaire (et non pas d’Apollon [84] ,
dieu céleste de la médecine et des arts, d’origine hyperboréenne), et de
Clymène, l’une des Néréides, filles de Nérée, dieu de la mer [85] .
La signification symbolique de l’union du feu (Hélios) avec l’eau (la Néréide) est
évidente mais, comme dans toute « copulation » de ce genre, elle ne
va pas sans difficultés, puisqu’il s’agit en fait d’un mélange contradictoire. Phaéton
est donc fils du feu (la sécheresse) et de l’élément aquatique (potentiel vital),
ce qui en fait un hybride idéal et, en même temps, une synthèse entre l’humide
et le sec, comme cela apparaît nettement dans les opérations alchimiques.
La légende de Phaéton est pourtant extrêmement simple. Un
jour, le jeune Phaéton se querelle avec l’un de ses compagnons, Épaphos, fils
de Zeus et de la nymphe Io. Dans leur dispute, ils s’échauffent l’un et l’autre
et en viennent aux injures. Épaphos va jusqu’à reprocher à Phaéton de n’être
pas le fils d’Hélios, insinuant que sa mère, de mœurs légères, n’a imaginé des
amours divines que pour mieux cacher ses turpitudes. Outré, Phaéton s’empresse
de courir jusqu’à la demeure de sa mère à qui il demande de le venger de cette
injure. Clymène lui conseille alors de demander à Hélios la permission de
conduire le char du Soleil pendant un jour afin de prouver ainsi au monde
entier sa filiation divine.
Phaéton monte jusqu’au palais d’Hélios, expose à son père l’affront
dont il est la victime et le supplie de lui accorder une faveur qui démontrera
à tous ses détracteurs qu’il est réellement son fils. Hélios, qui chérit
tendrement son fils, jure par le Styx – serment particulièrement redoutable – qu’il
ne lui refusera aucune de ses demandes. « Eh bien, mon père, dit Phaéton, laisse-moi
conduire à ta place, pendant un jour entier, le char de la Lumière. À cette
marque de confiance et de tendresse, mes ennemis connaîtront l’auteur de mon
être. » Hélios, plutôt inquiet et ennuyé, ne peut refuser la demande de
son fils, car le serment qu’il a prononcé par le Styx est irrévocable. Il
essaye cependant de le dissuader d’entreprendre un voyage aussi périlleux dans
l’espace. Rien n’y fait : Phaéton ne veut pas renoncer à sa demande. En
soupirant, Hélios se résigne. Il appelle les Heures matinales. Elles accourent,
précédées de l’Aurore. Elles attellent les chevaux au char du Soleil. Aussitôt,
avec un orgueil triomphant, Phaéton s’y précipite, saisit les rênes
étincelantes et, sans même écouter les derniers conseils de prudence de son
père, s’élance dans le ciel.
Mais n’importe qui ne peut s’improviser conducteur du char
du Soleil, et Phaéton l’apprend bientôt à ses dépens. Les chevaux, ne
reconnaissant plus la main de leur maître, se détournent de leur route
habituelle : tantôt, ils s’élèvent trop haut et menacent d’embraser le
ciel, tantôt, ils descendent trop bas, brûlant les forêts et les récoltes, desséchant
les rivières. C’est alors que les Éthiopiens prennent le teint noir qu’ils
conservent encore aujourd’hui. C’est alors que l’Afrique perd à tout jamais sa
verdure. La Terre, calcinée jusque dans ses fondements, gémit, s’agite, lève
vers le ciel sa tête brûlante et conjure le souverain des dieux de mettre fin à
ses tourments. Zeus, effrayé des conséquences catastrophiques de cette course
effrénée dans l’espace, lance sa foudre sur le fils de Clymène. Phaéton, jouet
des vents et de l’orage, tombe et se tue sur l’Éridan tandis que les chevaux du
Soleil s’égarent un peu partout avant de disparaître dans la nuit.
Il est évident
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