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Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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épinoches, continua-t-il.
    Il ôta ses bottes, les laissa sur la berge et
pataugea dans l’eau. Je le suivis sur la rive. Des mouches bourdonnaient sous
les aulnes. Il faisait chaud.
    — Tu veux des épinoches ? demandai-je
en pensant toujours à Gisela.
    — Je cherche une île.
    — Elle ne doit pas être bien grande.
    Le torrent pouvait être traversé en deux
enjambées et ne lui montait pas plus haut que les mollets.
    — Elle l’était bien assez quand j’avais
treize ans.
    — Assez pour quoi ? demandai-je en
écrasant un taon sur ma cotte.
    Il faisait assez chaud pour regretter de la
porter, mais j’avais appris depuis longtemps qu’un homme doit s’habituer à une
lourde armure, sans quoi, au combat, il est gêné. Alors je la portais presque
toujours, afin qu’elle devienne comme une seconde peau. Quand je l’enlevais, c’était
comme si les dieux m’avaient donné des ailes aux talons.
    — Assez grande pour moi et une Saxonne du
nom d’Edith, sourit-il. Elle fut ma première. Elle était charmante.
    — Elle l’est sans doute encore.
    — Non, elle fut éventrée par un taureau
et mourut.
    Il poursuivit sa marche, dépassant des rochers
envahis de fougères. Quelques pas plus loin, il poussa un cri de joie en
découvrant son île, et moi je fus navré pour Edith que ce ne soit qu’un tas de
pierres aiguës qui avaient dû naguère écorcher son maigre dos.
    Guthred s’assit et commença à jeter des galets
dans l’eau.
    — Pouvons-nous gagner ? demanda-t-il.
    — Nous pouvons sans doute prendre
Eoferwic, dis-je. Tant qu’Ivarr n’est pas revenu.
    — Et sinon ?
    — En ce cas, tu es mort, seigneur.
    Il se rembrunit.
    — Nous pouvons négocier avec Ivarr, proposa-t-il.
    — C’est ce que ferait Alfred.
    — Tant mieux ! s’éclaira-t-il. Et je
peux lui proposer Gisela pour son fils !
    — Mais Ivarr ne négociera pas, répondis-je
sans relever. Il se battra. C’est un Lothbrok. Il ne négocie point, sauf pour
gagner du temps. Il croit en l’épée, au bouclier et à la mort de ses ennemis. Tu
devras l’affronter et tu n’as point l’armée pour cela.
    — Mais si nous prenons Eoferwic, s’anima-t-il,
le peuple se joindra à nous. L’armée grandira.
    — Tu appelles cela une armée ? Ivarr
mène des Danes endurcis par la guerre. Quand nous les affronterons, seigneur, la
plupart de nos Danes le rejoindront.
    — Mais ils ont prêté serment ! s’étonna-t-il.
    — Ils le rejoindront tout de même, répondis-je
d’un ton lugubre.
    — Que faisons-nous, alors ?
    — Nous prenons Eoferwic, nous la pillons
et nous revenons ici. Ivarr ne te suivra point. Peut lui chaut le Cumbraland. Règne
ici et Ivarr finira par t’oublier.
    — Eadred n’aimera pas cela.
    — Que veut-il ?
    — Sa chapelle.
    — Il peut la bâtir ici.
    — Non, il la veut sur la côte est, car c’est
là que demeurent la plupart des gens.
    Sans doute Eadred voulait-il une chapelle qui
attire des milliers de pèlerins prêts à noyer son église sous leurs oboles. Il pouvait
la bâtir ici, à Cair Ligualid, mais c’était un lieu éloigné et les pèlerins n’accourraient
pas par milliers.
    — Mais tu es le roi, dis-je, et c’est toi
qui ordonnes, non Eadred.
    — Certes, dit-il avec un sourire forcé en
lançant pensivement un autre galet. Qu’est-ce qui fait d’Alfred un bon roi ?
    — Qui dit qu’il est bon ?
    — Tous. Le père Willibald dit que c’est
le plus grand roi depuis Charlemagne.
    — C’est parce que Willibald est un bout
de cul à l’esprit confus.
    — Tu n’aimes point Alfred ?
    — Je hais ce bâtard.
    — Mais c’est un guerrier, un faiseur de
lois…
    — Il n’est point guerrier ! coupai-je
avec mépris. Il déteste se battre ! Il y est obligé, mais cela lui déplaît
et il est bien trop malade pour tenir dans un mur de boucliers. Mais c’est un
faiseur de lois, oui. Il les adore. Il pense que s’il en invente assez, il fera
le paradis sur terre.
    — Mais pourquoi dit-on qu’il est bon ?
s’étonna Guthred.
    Je contemplai un aigle qui planait dans le
ciel bleu.
    — Ce qu’il est, répondis-je en m’efforçant
d’être honnête, c’est un homme juste. Il traite convenablement avec les gens, pour
la plupart. On peut se fier à sa parole.
    — C’est bien.
    — Mais c’est un misérable bâtard pétri de
piété, de reproches et d’inquiétudes. Voilà ce qu’il est.
    — Je dois être juste et faire que

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