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Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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elle sourit.) Je suis telle le gui.
Il me faut une branche pour croître. Faute de cela, je ne suis rien.
    Elle parlait sans amertume, comme si elle
énonçait une évidence. Et elle avait raison. C’était une femme de bonne famille ;
et si elle n’avait pas été donnée à l’église, comme la petite Æthelflæd, elle
aurait été donnée à un homme. C’est le destin d’une femme. Un jour, j’en connus
une qui le défia. Mais Hild était comme le bœuf qui regrette son joug quand
vient le jour du banquet.
    — Tu es libre, désormais, lui dis-je.
    — Non. Je suis dépendante de toi. (Elle
regarda Gisela qui riait d’une plaisanterie de son frère.) Et tu prends soin, Uhtred,
de ne point me faire honte. (Elle voulait dire que je ne l’humiliais pas en l’abandonnant
pour courtiser Gisela, et c’était vrai, mais tout juste. Voyant mon expression,
elle se mit à rire.) À bien des égards, dit-elle, tu es un bon chrétien.
    — Vraiment ?
    — Tu t’efforces de faire le bien, n’est-ce
pas ? (Elle rit devant mon air choqué.) Je veux que tu me fasses une
promesse.
    — Je ne puis, répondis-je prudemment.
    — Promets-moi de ne point voler la tête d’Oswald
pour en avoir huit.
    Je ris, soulagé que la promesse ne concerne
pas Gisela.
    — J’y pensais, avouai-je.
    — Je le sais. Mais cela n’ira point. Elle
est trop vieille. Et tu ferais de la peine à Eadred.
    — Où serait le mal ?
    — Sept têtes suffisent, répondit-elle
sans relever.
    — Huit conviendraient mieux.
    — Tu es cupide.
    Les sept têtes étaient cousues dans un sac que
Sihtric avait chargé sur l’âne qu’il menait. Des mouches bourdonnaient autour
et cela empestait tant que nul ne voulait accompagner le garçon.
    Nous formions une étrange armée. Sans compter
les clercs, nous étions trois cent dix-huit. Avec nous marchaient au moins
autant de femmes et enfants ainsi que les bandes de chiens habituelles. Il y
avait une soixantaine de prêtres et moines que j’aurais volontiers échangés
contre guerriers ou chevaux. Sur ces trois cents dix-huit hommes, seulement une
centaine valaient la peine d’être placés dans le mur de boucliers. En vérité, nous
n’étions point une armée, mais une populace.
    Les moines chantaient en marchant. Je suppose
que c’était en latin, car je ne comprenais pas leurs paroles. Ils avaient drapé
le cercueil de saint Cuthbert d’une belle étoffe verte brodée de croix, et ce
matin-là un corbeau l’avait souillée de sa fiente. Je pris d’abord cela pour un
mauvais présage puis, songeant que le corbeau avait simplement exprimé le
déplaisir d’Odin dont il est l’oiseau, je me réjouis du tour qu’il avait joué ;
cela me valut un regard mauvais des moines Ida et Jænberht.
    — Que faisons-nous, si nous découvrons en
arrivant à Eoferwic qu’Ivarr est revenu ?
    — Nous fuyons, bien sûr.
    Cela fit rire Hild.
    — Tu es heureux, n’est-ce pas ?
    — Oui.
    — Pourquoi ?
    — Parce que je suis loin d’Alfred, dis-je,
sincère.
    — Alfred est un homme de bien, me
gronda-t-elle.
    — Certes, mais recherches-tu sa compagnie ?
Brasses-tu de l’excellente ale pour lui ? Te rappelles-tu une plaisanterie
pour la lui raconter ? S’assied-on auprès d’un feu pour lui poser des
devinettes ? Chantons-nous avec lui ? Il ne fait que se soucier de ce
que désire son dieu, promulgue des lois pour lui faire plaisir, et lorsqu’on
fait pour lui quelque chose, ce n’est jamais assez, parce que son maudit dieu
veut plus encore.
    Elle me fit le sourire patient qu’elle
réservait à mes insultes envers son dieu.
    — Alfred veut ton retour.
    — Il veut mon épée, pas moi.
    — Retourneras-tu ?
    — Non, dis-je d’un ton ferme.
    Je tentai de mettre ma réponse à l’épreuve de
l’avenir, mais j’ignorais ce que les fileuses de nos destins me réservaient. Avec
cette troupe dépenaillée, j’espérais plus ou moins anéantir Kjartan et prendre
Bebbanburg. Le bon sens me disait que c’était impossible, mais le bon sens n’aurait
jamais imaginé qu’un esclave libéré puisse devenir roi à la fois de Danes et de
Saxons.
    — Jamais tu ne retourneras ? demanda
Hild, dubitative.
    — Jamais.
    J’entendis les fileuses se rire de moi et je
craignis que le destin ne m’ait lié à Alfred. Cela me contrariait, car cela signifiait
que je n’étais pas mon propre maître. Peut-être étais-je moi aussi comme le gui,
sauf que j’avais un

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