Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
danois avec son étrange accent. Tu étais un guerrier, toi.
    — Je le suis toujours.
    Assis devant la cabane sur un carré d’herbe où
la neige avait fondu, nous vidions des harengs, harcelés par les mouettes. L’un
des hommes de Sverri nous surveillait depuis la maison, un arc sur les genoux
et une épée à la ceinture. Je me demandai comment Finan avait deviné que j’étais
un guerrier, car je n’avais jamais parlé de ma vie. Pas plus que je n’avais
révélé mon nom, préférant les laisser croire que je m’appelais Osbert. C’était
le prénom que j’avais reçu à ma naissance, mais j’avais été rebaptisé Uhtred
quand mon frère était mort, car mon père voulait que son aîné porte ce nom. Mais
je ne l’utilisai jamais à bord de La Marchande. Uhtred était un nom fier,
un nom de guerrier, et je voulais le garder secret jusqu’à ce que j’échappe à l’esclavage.
    — Comment sais-tu que je suis un guerrier ?
demandai-je.
    — Parce que tu ne cesses d’observer ces
bâtards et de songer à les tuer.
    — Toi aussi.
    — Finan l’Agile, c’est ainsi qu’on m’appelait,
parce que j’aimais danser autour de mes ennemis. Avant de les tuer. (Il éventra
un poisson et jeta les boyaux dans la neige où deux mouettes se les disputèrent.)
Il fut un temps, continua-t-il d’un ton rageur, où je possédais cinq lances, six
chevaux, deux épées, une cotte de belle maille et un casque resplendissant
comme le feu. J’avais une femme avec des cheveux jusqu’à la taille et un
sourire à rendre jaloux le soleil de midi. Et me voici vidant des harengs. Mais
un jour, je reviendrai ici, je tuerai Sverri, je trousserai sa femme, j’étranglerai
ses bâtards et je prendrai son argent. Il le garde ici. Enterré.
    — Tu en es sûr ?
    — Que fait-il d’autre avec ? Il ne
le mange point, car il ne chie point d’argent, non ? Il est donc ici.
    — Et ici, c’est ?
    — Le Jutland. La femme est une Dane. Nous
y venons tous les hivers.
    — Depuis combien de temps ?
    — C’est mon troisième.
    — Comment t’a-t-il capturé ?
    — Il y a eu une bataille, dit-il en
jetant un poisson vidé dans le panier d’osier. Contre les Norses et ils nous
ont battus. J’ai été fait prisonnier et ils m’ont vendu à Sverri. Et toi ?
    — Trahi par mon seigneur.
    — Voilà un autre bâtard à tuer, alors. Mon
seigneur m’a trahi moi aussi.
    — Comment cela ?
    — Il a refusé de payer ma rançon. Il
voulait ma femme, vois-tu. Alors il m’a laissé emmener, et pour le remercier je
prie qu’il meure, que ses femmes soient prises du trisme et son bétail de la
tremblante, que ses enfants crèvent dans leurs étrons, que ses récoltes
pourrissent sur pied et que ses chiens s’étouffent, dit-il en frémissant d’une
colère qu’il ne pouvait contenir.
    De la neige fondue remplaça les flocons, puis
la glace fondit dans le bras de mer. Nous fabriquâmes de nouvelles rames avec
le bois coupé l’hiver précédent, et le temps de les finir, c’était le dégel. Des
brouillards gris nimbaient la terre et les premières fleurs pointaient au bord
des marais. Des hérons chassaient dans l’eau basse tandis que les gelées
matinales disparaissaient au soleil. Comme le printemps arrivait, nous calfatâmes La Marchande avec du crin, du bitume et de la mousse. Nous la nettoyâmes et
nous la remîmes à l’eau après avoir rechargé le ballast, monté et gréé le mât
puis fixé la voile recousue. Sverri embrassa sa femme et ses enfants, et
pataugea jusqu’au navire où deux de ses hommes le hissèrent à bord tandis que
nous empoignions nos avirons.
    — Ramez, bâtards ! cria-t-il. Ramez.
    Et nous ramâmes.
    La colère vous garde en vie, mais tout juste. Parfois,
quand j’étais trop malade pour tirer la rame, je m’acharnais tout de même, craignant
d’être jeté par-dessus bord si je faiblissais. Je continuais, vomissant, frissonnant
et suant. Qu’il pleuve, vente ou neige. Je me rappelle avoir eu une fièvre et
cru mourir. Je me serais volontiers laissé aller, mais Finan me nargua à
mi-voix :
    — Tu es un pauvre Saxon sans forces. Tu
es faible. Tu es pitoyable, vermine saxonne. (Je grommelai, mais il reprit de plus
belle, si fort que Hakka l’entendit et le frappa pour le punir.) Ils veulent ta
mort, pauvre bâtard. Alors prouve-leur qu’ils ont tort et rame.
    Je le soutins à mon tour une autre fois. Je me
rappelle l’avoir tenu dans mes bras en lui glissant

Weitere Kostenlose Bücher