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Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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sa tête, et que je lui ai ordonné de se taire ?
    — Oui, je m’en souviens… dit Ragnar après
réflexion.
    — Ce n’était point un serviteur, mais
Alfred.
    Il me dévisagea, comprenant que je lui avais
menti en cette nuit lointaine et que s’il avait seulement su que le serviteur à
capuchon était Alfred, il aurait pu gagner le Wessex à lui seul. L’espace d’un
instant, je regrettai mon aveu, craignant qu’il ne m’en veuille, mais il éclata
de rire.
    — C’était Alfred ? Vraiment ?
    — Il est venu vous espionner et je suis
allé le sauver.
    — Alfred, dans le camp de Guthrum ?
    — Tu vois, il prend des risques.
    — Pourquoi ne m’as-tu rien dit cette
nuit-là ?
    — Parce que je lui avais donné ma parole.
    — Nous t’aurions rendu plus riche que le
plus riche des rois. Tu aurais reçu vaisseaux, hommes, chevaux, argent et
femmes, tout ce que tu voulais. Il suffisait que tu parles.
    — Je lui avais donné ma parole, répétai-je,
me rappelant que j’avais failli trahir le roi. (Cette nuit-là, en quelques mots,
j’aurais pu faire en sorte qu’aucun Saxon ne règne plus jamais sur l’Anglie. J’aurais
pu faire du Wessex un royaume dane. Et tout cela en trahissant un homme que je
n’aimais guère pour le livrer à un autre que j’aimais comme un frère. Et
pourtant je m’étais tu. J’avais prêté serment et l’honneur nous force à prendre
des chemins que nous ne choisissons point.) Wyrd bid ful årœd, conclus-je.
    Le destin est inexorable. Il nous tient comme
un harnais. Je pensais avoir échappé au Wessex et à Alfred. Et pourtant j’étais
là, dans son palais. Il rentra l’après-midi dans un fracas de sabots et un tumulte
de serviteurs, moines et prêtres. Deux hommes portèrent la litière du roi dans
sa chambre tandis qu’un moine poussait une brouette remplie de documents dont
Alfred avait d’évidence eu besoin durant cette unique journée d’absence. Un
prêtre passa avec une nappe d’autel et un crucifix, et deux autres chargés des
reliques qui accompagnaient partout Alfred. Vint ensuite un groupe de gardes du
corps royaux, seuls autorisés à porter une arme en présence du roi, puis d’autres
prêtres en grande conversation entourant Alfred lui-même. Il n’avait point
changé. Il avait toujours l’air d’un clerc, maigre, pâle et studieux, avec une
simple cape de laine noire, sans la moindre couronne. Il tenait la main d’Æthelflæd,
et je remarquai qu’elle avait de nouveau le cheval de son frère et trépignait. Il
finit par céder, car il aimait beaucoup ses enfants. Alors, elle l’entraîna
vers la cour où Ragnar et moi nous étions levés pour l’accueillir.
    Nous nous agenouillâmes et je gardai la tête
baissée.
    — Uhtred a le nez cassé, dit la fillette
à son père, et celui qui le lui a cassé est mort.
    Une main royale me redressa la tête, je
regardai ce visage pâle et étroit aux yeux rusés. Il semblait fatigué. Sans
doute était-il encore affligé de ce flux du ventre qui faisait de sa vie une
souffrance perpétuelle. Il me considéra avec son austérité habituelle, mais
parvint à sourire un peu.
    — Je pensais ne jamais te revoir, seigneur
Uhtred.
    — Je te dois ma gratitude, seigneur.
    — Relevez-vous. Je te libérerai bientôt, seigneur
Ragnar.
    — Je te remercie, seigneur.
    — Mais d’ici à une semaine, nous aurons
une fête ici. Nous devrons nous réjouir de l’achèvement de notre nouvelle
église et donner officiellement la main de cette jeune damoiselle au seigneur Æthelred.
J’ai mandé le witan, et je vous prie de rester tous les deux jusqu’à la fin de
ses délibérations.
    — Oui, seigneur.
    En vérité, je n’avais qu’une envie, retourner
en Northumbrie ; mais, étant recevable à Alfred, je pouvais attendre une
ou deux semaines.
    — Ensuite, continua-t-il, je pourrais
avoir des affaires… (il marqua une pause, comme s’il redoutait de trop en dire)…
des affaires dans lesquelles tu pourrais m’être de grand service.
    — Oui, seigneur.
    Il hocha la tête et nous laissa.
    Nous attendîmes donc. La ville, dans la
perspective de la fête, se remplit de monde. Tous les hommes qui avaient mené l’armée
d’Alfred à Ethandun étaient là, et m’accueillirent avec plaisir. Wiglaf de
Sumorsaete, Harald de Defnascir, Osric de Wiltunscir et Arnulf de Suth Seaxa
étaient venus à Wintanceaster. C’étaient les hommes puissants du royaume, à
présent, les grands

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