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Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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seigneurs, ceux qui avaient soutenu leur roi quand il
semblait voué à la défaite. Mais Alfred n’avait pas puni ceux qui avaient fui
le Wessex. Wilfrith était encore ealdorman d’Hamptonscir, alors qu’il avait
gagné la Franquie lors de l’attaque de Guthrum, et Alfred le traitait avec une
courtoisie exagérée. Mais quelque chose séparait encore ceux qui étaient restés
pour combattre et ceux qui avaient fui.
    La ville se remplit aussi de bateleurs. Il y
avait les habituels jongleurs et échassiers, bardes et musiciens, mais le plus
apprécié était Offa, un austère Mercien accompagné d’une troupe de chiens
savants. Ce n’étaient que des terriers, de l’espèce que l’on emploie pour
chasser les rats, mais Offa savait les faire danser, marcher sur les pattes
arrière et sauter au travers de cerceaux. L’un d’eux chevauchait même un poney,
les rênes dans sa gueule, et les autres suivaient avec de petits seaux de cuir
pour recueillir les pièces des spectateurs. À ma surprise, Offa fut convié au
palais. Cela m’étonna, Alfred n’étant point épris de frivolités. Pour lui, un
agréable moment consistait à parler théologie, mais il ordonna que les chiens
soient amenés au palais et je pense que c’était dans l’intention d’amuser ses
enfants. Ragnar et moi assistâmes à leurs tours, et c’est là que me retrouva le
père Beocca.
    Le pauvre Beocca. Il était en larmes de me
voir en vie. Ses cheveux, naguère rouquins, étaient désormais grisonnants. Il
avait plus de quarante ans, il était vieux, et son œil louche était laiteux. Il
boitait et avait une main infirme, toutes afflictions qui lui valaient les
moqueries des hommes, bien que jamais en ma présence. Il me connaissait depuis
mon enfance, car il avait été le prêtre de mon père et mon premier précepteur. Il
balançait envers moi entre l’adoration et la colère, mais il fut toujours mon
ami. C’était aussi un bon prêtre, un homme habile et l’un des chapelains d’Alfred,
et il était heureux d’être au service du roi.
    — Tu es vivant, dit-il, fou de joie, les
larmes aux yeux, en m’étreignant gauchement.
    — Je suis un homme que l’on ne tue point
aisément, mon père.
    — Certes, certes, mais tu étais un enfant
débile.
    — Moi ?
    — Le plus faible de la portée, disait
toujours ton père. Puis tu as commencé à forcir.
    — Je n’ai point cessé, n’est-ce pas ?
    — N’est-ce pas prodigieux ? s’exclama-t-il
en voyant deux chiens marcher sur leurs pattes de derrière. J’aime les chiens, et
tu devrais parler à Offa.
    — Pourquoi ?
    — Il était à Bebbanburg cet été. Il m’a dit
que ton oncle avait reconstruit le château, plus grand encore. Et Gytha, dit-il
en se signant, cette pauvre et bonne Gytha est morte.
    Gytha était ma marâtre. Après la mort de mon
père à Eoferwic, elle avait épousé mon oncle ; elle était donc complice de
l’usurpation de Bebbanburg. Je ne répondis rien, mais après le spectacle j’allai
trouver Offa et ses deux servantes qui remballaient les cerceaux et attachaient
les chiens.
    Offa était un homme étrange. Aussi grand que
moi, lugubre, l’air de tout savoir et, plus étrange encore, c’était un prêtre
chrétien. Il se nommait en fait le père Offa.
    — Mais l’église m’ennuyait, me
confia-t-il à la taverne des Deux Grues où je lui payai un pichet d’ale, et mon
épouse plus encore.
    — Alors tu es parti ?
    — Je me suis esquivé. Si Dieu m’avait
donné des ailes, je me serais envolé.
    Cela faisait douze ans qu’il voyageait, arpentant
les terres saxonnes et danes de Bretagne, bienvenu partout car il apportait le
rire par ses tours, bien que sa conversation fût sinistre. Mais Beocca avait
raison. Offa était allé en Northumbrie, et il y avait à l’évidence fort bien
tout observé de son œil aiguisé. Si aiguisé que je compris pourquoi Alfred
avait convié ses chiens au palais. Offa était à coup sûr l’un des espions qui
apportaient à la cour des nouvelles de la Bretagne.
    — Alors, dis-moi ce qui se trame en
Northumbrie, l’invitai-je.
    Il grimaça et fixa le plafond. Aux Deux Grues,
la coutume voulait que les hommes creusent une encoche dans les poutres chaque
fois qu’ils louaient les services des putains de la taverne. Offa semblait
compter les encoches, ce qui aurait pu prendre toute une vie, puis il me
regarda d’un œil noir.
    — Les nouvelles, seigneur, sont comme l’ale,
la terre ou

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