Les templiers
émancipe les Templiers de toute autorité ecclésiastique. Cela est très important. Par son Maître, et surtout par le chapitre, l’Ordre était responsable. Une indépendance tant temporelle que spirituelle. Cela suscita d’ailleurs quelques scandales. Robert de Craon, deuxième Maître, renchérit et demanda l’exemption totale, chose rarement accordée.
Le début de la bulle est des plus intéressant : « Nous vous exhortons de combattre avec ardeur les ennemis de la Croix, et en signe de récompense Nous vous permettons de garder pour vous tout le butin que vous prendrez aux Sarrasins, sans que personne ait le droit de vous en réclamer une part et [point important] Nous déclarons que votre maison, avec toutes ses possessions acquises par la libéralité des princes, des aumônes, ou de n’importe quelle autre manière, demeure sous la tutelle et la protection du Saint-Siège. »
Tous les frères doivent obéissance, et aucune maison, sauf celle où l’Ordre s’établit à l’origine, ne doit être la tête et la maîtresse. Le pape intervient alors dans le droit de l’Ordre, à propos de l’élection : « Nous ajoutons, en outre, qu’à votre décès, cher fils dans le Seigneur, Robert, ou à chacun de vos successeurs, nul ne peut être élu s’il ne soit de l’Ordre, qu’il soit de votre habit et de votre profession et que l’élu soit choisi par tous les frères ensemble ou aux plus sages d’entre eux. » Il n’est permis à aucune personne, ecclésiastique ou laïque, de modifier les observances. La Règle ne peut être changée que par le Maître, avec l’assentiment du Chapitre. « Nous prohibons, poursuit le pape, à toutes personnes d’exiger de vous des serments ou des hommages tels qu’ils se pratiquent parmi les gens du siècle. Nous défendons aussi, à vos frères, d’abandonner l’habit de votre maison, ou de se rendre dans un autre ordre sans la permission du Maître et du Chapitre. Personne ne peut vous forcer à payer les dîmes, mais nous vous confirmons la possession et la jouissance des dîmes qui vous auront été données avec l’assentiment des évêques. Afin que vous ayez la plénitude du salut et du soin de vos âmes, vous pouvez adjoindre à votre collège, des clercs et des prêtres, pour la célébration des offices divins et pour donner le sacrement ecclésiastique. Vous pourrez les recevoir sans l’assentiment des évêques du diocèse, mais par l’autorité de la Sainte Église de Rome. Avant d’entrer dans votre maison, les clercs devront faire un an de probation et, s’ils se montrent des fauteurs de troubles ou seulement inutiles à la maison, vous pouvez les renvoyer et en choisir de meilleurs. Ils ne devront pas se mêler du gouvernement de votre maison, si ce n’est de l’assentiment du Maître. Ils ont la charge du soin des âmes. Ils ne sont assujettis à personne, sinon au Chapitre. Ils te doivent obéissance, cher fils Robert, ainsi qu’à tes successeurs. En dehors des réserves que nous formulons aux droits des évêques, en ce qui concerne les dîmes, les offrandes et les sépultures, nous vous concédons la faculté de construire des oratoires dans tous les lieux rattachés au Temple, afin que vous et vos familiers puissiez entendre les offices et y être enterrés, car il est mauvais, pour votre conversion des mœurs, que les frères du peuple, en allant à l’église, se mêlent à la tourbe des pêcheurs et des fréquentateurs de femmes. »
Cette bulle sera suivie de beaucoup d’autres, rappelant ou développant certains points particuliers. Ainsi, en 1145, Eugène III reprendra, dans sa bulle « Militia Dei », le point des oratoires. Ce fut l’un des plus difficiles à obtenir de la part des Templiers. Les évêques n’admirent pas facilement cette clause, et il fut relativement difficile aux chevaliers d’imposer leur volonté, même avec l’approbation pontificale. Les luttes commencèrent surtout quand le Temple développa son système temporel. Les évêques profitèrent de leurs droits, oubliant complètement les prérogatives pontificales. Des legs furent à l’origine de nombreuses disputes, les prélats prenant le tiers des revenus lorsque des personnes se faisaient enterrer dans les cimetières de l’Ordre. Les papes reprendront maintes fois la bulle « Dilecti Filii » d’Alexandre III qui obligeait les prélats à ne rien exiger des aumônes faites aux Templiers par des personnes
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