Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
eût dû mourir, il en avait réchappé sans identité. Pour tous, y compris lui-même, il était devenu l’Homme en noir.
    Massif et teigneux, tout autant que vif et intelligent malgré ce handicap, il était entré par hasard au service de Tobias Read deux mois plus tôt. Read cherchait un assassin pour éliminer le mari d’une de ses maîtresses devenu gênant pour leurs affaires respectives.
    Il s’était fait agresser lui-même et avait dû se défendre à l’épée. L’Homme en noir était intervenu en sa faveur comme il commençait à plier, faisant fuir ses attaquants sans les blesser. Aussitôt après, il l’avait rançonné pour lui avoir sauvé la vie. Read n’avait pas été dupe. Comprenant que tout cela était habilement organisé, il l’avait engagé à son service, lui promettant bien davantage qu’il n’aurait pu espérer.
    Sortant de la taverne, l’Homme en noir gagna la voiture sur les talons de son maître. Avant d’atteindre l’auberge de la Lanterne rouge, leur équipage s’était grossi de quatre malfrats pour le cas où l’Espagnol serait encore entouré de ses hommes et voudrait se défendre.
    Read les laissa entrer les premiers et s’installer comme des clients ordinaires. Il ne tenait pas à éveiller l’attention, d’autant qu’avec un peu de chance, l’alcool aidant, l’Espagnol lui livrerait la vérité sans trop se faire prier.
    L’Homme en noir pénétra dans le bouge, enfumé et bruyant, à ses côtés. Le lieu puait la crasse, le vin, le graillon et le parfum des filles de mauvaise vie. Tout ce que Tobias Read exécrait. Il se fraya pourtant un passage parmi les tables, sous l’œil intrigué des habitués, que la présence de l’Homme en noir, connu de tous les brigands à Londres, forçait au respect.
    Read avisa son homme, avachi à une table sur les restes d’un repas qu’il n’aurait pas lui-même accordé à un chien. Il tira une chaise branlante à la table voisine et s’installa face à lui. L’homme redressa la tête, fouilla dans ses souvenirs en plissant ses yeux rougis par la fumée et l’alcool, puis tendit vers lui un doigt mal assuré. Il était solidement éméché.
    — Je vous reconnais, balbutia-t-il en espagnol.
    Il parlait fort. Tobias comprit qu’il ne pourrait lui arracher de confidences ici, sans que la salle tout entière en soit informée. Il se leva donc et déclara :
    — Il ne faut pas rester là, mon ami. L’endroit est risqué. Accompagnez-moi dehors, j’ai la somme que vous demandiez pour vos caisses.
    L’Espagnol plissa le front, puis, hochant la tête, laissa l’Homme en noir glisser un bras derrière ses omoplates pour l’aider à se redresser.
    Il ricana bêtement tout le long du trajet. Read avisa un cul-de-sac qui servait de pissotière à gauche de l’édifice. Il fit signe à l’Homme en noir d’y déposer l’Espagnol, demandant à ses complices, qui s’étaient empressés de les rejoindre à l’extérieur, de faire le guet. C’était le meilleur endroit pour causer sans être inquiété.
    Il s’approcha de l’Espagnol qui continuait de ricaner, conscient de son erreur tout autant que de son implacable fatalité.
    — Tu sais ce que je veux, n’est-ce pas ? Parle, ajouta-t-il froidement dans sa langue, et je te laisserai la vie sauve.
    L’Espagnol ricana encore. Tobias le secoua, puis le gifla.
    — Tue-moi, décida l’Espagnol, tu n’y pourras rien changer. Sans les autres clés, le trésor de mon aïeul est inaccessible. Inaccessible, tu entends, répéta-t-il en détachant les syllabes, l’haleine si puante que Tobias détourna le nez.
    Tobias attendit, accroupi devant sa piteuse victime. L’Espagnol en avait trop dit pour ne pas continuer.
    — Comme mon père avant moi, j’ai passé ma vie à les chercher. Elles ont disparu. Disparu ! beugla-t-il enfin en voulant se redresser.
    D’une poigne ferme, l’Homme en noir le maintint au sol. Il se résigna :
    — C’était pourtant un beau trésor et moi seul sais où il est caché. Tu entends, l’Anglais ? Moi seul.
    — Et tes compagnons, demanda Tobias, ceux qui t’ont escorté ?
    — Morts, avoua l’Espagnol. Tous empoisonnés. On doit les croire endormis dans la taverne où je les ai laissés, le nez dans leur chopine.
    Il ricana encore.
    — Raconte-moi tout, susurra Tobias, et je t’aiderai à retrouver ces clés dont tu parles. Il n’y a rien d’impossible aux puissants, et je le suis plus que tu ne peux

Weitere Kostenlose Bücher