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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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corps brûlant de désir.
    — C’était vrai, marquis, avant de découvrir vos étonnantes facultés et celles de ce crâne, quoi que vous en prétendiez. Désormais, j’en espère davantage. Ce que je veux, gémit-elle, c’est tenir le monde à mes pieds comme en cet instant je m’offre aux vôtres. Mais ne vous y trompez pas, marquis, si je vous laisse la vie sauve, vous ne serez jamais à mes côtés qu’un valet.
    Baletti se pencha pourtant en avant pour cueillir ses lèvres, promenant un doigt sur son décolleté afin de mieux la sentir frémir.
    — Où est le second œil ?
    — Perdu, gémit-elle dans son souffle. Volé par une aventurière à mon défunt époux. Elle a péri dans le bombardement du port de Dunkerque et portait l’œil en pendentif.
    — Avez-vous retrouvé son corps ? insista-t-il en butinant le lobe de son oreille, certain qu’elle lui livrerait à présent toutes les informations qu’il souhaitait.
    — Non. Beaucoup sont morts sous les décombres. Les cadavres furent brûlés ou immergés.
    — Ni le jade ni le cristal ne brûlent ou ne flottent. Les pillards sont nombreux sur les charniers.
     
    Emma se recula et le dévisagea. C’était une hypothèse à laquelle elle n’avait pas songé.
    Baletti embrasa le regard d’Emma du sien.
    Cela suffit à Emma pour ressentir de nouveau l’envie d’une étreinte. Elle enroula ses bras autour de la nuque de Baletti.
    — Vous allez me faire l’amour, marquis, susurra-t-elle, ensuite j’emporterai le crâne pour le mettre en présence de l’œil de jade et de l’aiguille, et vous m’attendrez, car vous ne pourrez plus m’oublier.
    Baletti se recula, un sourire triomphant aux lèvres.
    — Cela, ma chère amie, j’en doute fort, murmura-t-il. Il claqua des doigts et, en un instant, Emma de Mortefontaine, livide, se retrouva cernée.
     

36
     
     
    L es relevailles de Mary avaient été longues et douloureuses, la laissant empâtée jusqu’à la fin de la période d’allaitement, la tenant éloignée des tâches pénibles. Depuis que la paix de Ryswick avait été signée à l’automne 1697, ils vivaient chichement. Niklaus s’inquiétait d’elle dès qu’il le pouvait, s’occupant de l’entretien de la bâtisse et des communs, du tirage de l’eau au puits, du bouchonnement des chevaux, de la basse-cour et des autres animaux. A l’occasion, il se transformait en maréchal-ferrant, en couvreur ou en menuisier. Elle n’avait jamais vu un homme se comporter avec autant de tendresse et d’attention auprès de ses enfants et de son épouse, malgré la diversité des travaux qu’il accomplissait.
    Elle avait songé souvent à son trésor, mais raisonnablement s’était donné le temps nécessaire pour récupérer et regarder grandir ses enfants. S’accordant avec un sincère bonheur aux images qu’ils lui offraient. A leur contact, elle avait peu à peu retrouvé cette complicité qui l’avait liée à Cecily et s’était trouvée fière d’avoir su finalement dompter ses angoisses pour mieux en profiter. Niklaus n’y était pas étranger, qui lui avait appris à s’aimer telle qu’elle était.
    Ann Mary venait de fêter sa deuxième année et jouait avec Junior, presque quatre ans, et Toby, le jeune chiot de deux mois qu’on leur avait donné. Il était l’attraction de la maisonnée. Grâce à lui, Mary avait un peu de tranquillité.
     
    Pour l’heure, à quatre pattes à même le sol près de la cheminée, imitant l’animal, les deux enfants s’amusaient à lui faire mordre une vieille guenille, tirant de toutes leurs forces sur l’autre bout pour lui faire lâcher prise. Les grognements joueurs du chiot les excitaient tant qu’ils riaient aux éclats, la lui prenant puis la lui rendant dans une ronde sans fin, qui commençait par un pas de course, et se terminait assis par terre.
    Junior ressemblait de plus en plus à son père. Il était aussi espiègle et rieur que lui, et on lui donnait aisément deux années de plus tant il était massif. Ann avait la douceur des traits de Cecily, les cheveux plus foncés que ceux de sa mère mais les mêmes boucles soyeuses. Elle se montrait aussi intrépide et curieuse que Junior. L’un et l’autre étaient autant têtus que déterminés.
    Non loin, amusé par leur manège, Niklaus, discutait avec un vétéran qui s’obstinait à leur rendre visite chaque soir devant une bière, refusant de quitter Breda, puisqu’il avait perdu toute famille et

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