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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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m’obsède souvent.
    — Moi aussi, avoua-t-il.
    Mary se retourna vers lui et nicha son nez dans la toison de son torse. Elle aimait le parfum de sa peau, elle aimait s’y perdre. Pas une seule fois elle n’avait regretté ce mariage, malgré ses doutes, ses appréhensions, malgré sa peur de ne pas arriver à se contenter d’une vie trop calme. Niklaus avait su faire de leur quotidien une fête. Elle sentait pourtant qu’elle en avait atteint les limites et que, comme elle, Niklaus commençait à s’en lasser. Ils étaient trop semblables. Ils appréciaient l’odeur de la poudre et du danger, celle du tabac et des étreintes enflammées, dans l’urgence et l’incertitude du lendemain. Celles-ci en avaient perdu l’intensité peu à peu, au fil des habitudes et du quotidien.
    — Je ne m’imagine pas mourir dans ce lit, Niklaus, peu importe la manière. Je veux pouvoir regarder la mort en face et me battre contre elle pour la braver.
    Il passa son bras musclé autour de ses épaules et les caressa.
    — C’est aussi la réflexion que je me suis faite, admit-il. Quand tu as failli passer à la naissance d’Ann Mary, j’ai compris que tu n’étais pas faite pour la vieillesse et l’apathie.
    Mary se redressa légèrement sur son coude et chercha son regard. Les chandelles flambaient, projetant ombre et lumière tour à tour. Niklaus avait l’œil triste, mais brûlant de passion.
    — Je t’ai menti, Mary, avoua-t-il. J’ai cherché à t’enchaîner par peur de te perdre. J’aurais pu t’éviter ces enfants.
    — Je le sais, dit-elle.
    — Je pensais que tu ne te connaissais pas encore. Que tu n’avais vécu le combat que parce qu’il avait été un moyen de survivre, et que ton obsession d’un nom et d’une fortune se perdrait dès lors que tu aurais la charge d’une famille, dès lors que tu te sentirais en sécurité et occupée à la chérir et à la protéger. Je me trompais sur ton compte. Mais je me trompais sur le mien aussi. Ni toi ni moi ne sommes faits pour cette vie.
    — Je l’ai aimée, Niklaus, assura-t-elle, autant que je t’aime. Je ne regrette rien, et surtout pas nos enfants.
    Niklaus lui sourit et écarta une mèche rousse qui s’entêtait à venir balayer le nez de Mary. Il aimait le soyeux de ses cheveux, il ne se lassait pas de ses taches de rousseur sur le nez, ni du noisette de ses yeux et du rosé de ses lèvres. Il ne se lassait pas de son souffle, de ses gémissements au plus fort de leurs étreintes, de sa manière d’en réclamer encore en pressant plus fort ses doigts au creux de ses reins. Il ne se lassait pas de ce parfum qu’elle portait, ce parfum de sensualité et de maternité mêlées. De ces manières de femme où perçait encore souvent la rudesse de ses habitudes de soldat, de ses habits de garçon qu’elle adorait porter contre toute bienséance pour s’activer à la basse-cour ou à l’écurie à ses côtés, de son espièglerie lorsqu’ils bouchonnaient les chevaux ou trayaient leurs deux vaches, s’amusant à s’arroser de lait en penchant le pis de côté.
    De sa façon de l’entraîner dans le foin d’un mouvement d’index assorti d’un regard coquin, tandis qu’au-dehors, sous la surveillance de Milia, les enfants chahutaient Il aimait son rire, ses colères, ses entêtements aussi stupides que les siens pour des broutilles, leurs réconciliations, leur tendresse.
    — Moi non plus, je ne regrette rien, assura-t-il. Mais je me suis leurré, Mary. Je croyais que c’était à cause de la gouaille de Gros Reinhart, tant opposée à la fadeur de mon père, que j’avais eu envie de ce métier et détesté celui de notaire. Je me trompais. Ce qui me plaisait dans ce projet, c’étaient l’animation, le mouvement, le rire des filles, les plaisanteries des soldats, les élans de camaraderie, les musiciens, l’odeur du tabac et du vin. Parfois aussi ces bagarres idiotes qui révélaient en nous l’instinct de survie. Je ne m’ennuie pas auprès de toi, Mary Olgersen, et nos enfants me comblent, mais, si tu le veux encore, je partirais bien à l’aventure avec toi, avec eux.
    Mary se pencha au-dessus de ses lèvres et l’embrassa passionnément.
    — J’avais fini par croire que tu ne me le demanderais jamais.
    — M’aurais-tu quitté, s’inquiéta Niklaus, si je ne l’avais pas fait ?
    Mary lui répondit sans hésiter :
    — Non. Parce que je t’aime. Et aussi que je te connais bien mieux que quiconque. Je

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