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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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objet réalisé dans un bloc de cristal. Un crâne, lâcha enfin Tobias, la sentant tendue de curiosité. Un crâne si parfait qu’on l’eût dit humain, d’autant plus qu’il en avait la taille. Les yeux de jade étaient incrustés dans ses orbites creuses. C’est en retirant le crâne de la stèle que la paroi s’est refermée, révélant le mécanisme secret à l’Espagnol.
    — En quoi est-ce étonnant ? demanda Emma qui jugeait cela seulement bien pensé.
    — L’étonnant, ma chère, c’est que les Mayas de Lubaantun eux-mêmes ne purent dire d’où le crâne de cristal provenait. Les plus anciens prétendirent que ce temple était là bien avant leur arrivée et qu’ils avaient pris modèle sur lui pour construire leur cité. Or, d’après ce que j’en ai étudié et ce que l’on sait aujourd’hui, les Mayas furent les premiers habitants de la péninsule du Yucatán. Vous avouerez, ma chère, qu’il y a là matière à curiosité.
    — En effet, consentit Emma. Mais je m’intéresse davantage au concret qu’au divin et, quoi que ce crâne ait pu cacher à l’origine, si la salle était ouverte lorsque l’Espagnol l’a trouvée, et vide de surcroît, ce mystère n’a plus aucun intérêt.
    Tobias soupira. La vénalité d’Emma était apparemment sans limites. Il cherchait, quant à lui, davantage le pouvoir et les moyens de l’accroître que la seule richesse.
    « Qu’à cela ne tienne, pensa-t-il. Elle a raison sur ce fait. » Il le lui accorda avant de poursuivre.
    — Les clés – les deux yeux et le crâne – ont été dispersées, chacune d’elles embarquée sur une des trois caravelles d’un convoi qui devait ramener le reste du trésor en Espagne. Un corsaire français s’en empara et les trois lieutenants furent tués. L’Espagnol était le descendant d’un marin qui aida à transporter le trésor dans sa cache et vola la carte et l’œil de jade avant d’être recruté sur le navire français. A partir de là, tout devient flou. Je suppose que la cargaison des trois caravelles est venue grossir les coffres de François I er , roi de France à l’époque. Mais tout peut s’envisager.
    — Je vois, déclara Emma de Mortefontaine. Dès demain, je gagnerai la France pour approcher Claude de Forbin. Nous serons ainsi fixés, au moins sur cette première clé qu’Oliver vous a volée. Pour le reste, je suppose que vous avez déjà votre petite idée.
    Tobias Read hocha la tête mais, au lieu de lui répondre, glissa sa main entre ses cuisses qui s’offraient.
     
    *
     
    T rois semaines durant, Mary s’activa sur La Perle. Tout entière portée par un sentiment grandissant de puissance et de liberté. Non seulement dans le gréement, mais aussi à l’abordage. Comme si une part d’elle-même, révélant sa vraie nature, reconnaissait enfin son ascendance. Le sang de son père inconnu avait forgé le sien et elle dut admettre très vite que la mer prenait corps en elle bien davantage que la terre.
    Mary se battait comme aucun autre sur ce navire. Elle n’était pas un bras armé d’un sabre, elle était Le sabre. Tout son corps et son esprit même semblaient absorbés dans cette quête de la survie et de la victoire. Son énergie et son instinct en étaient décuplés, et le spectacle qu’elle donnait de sa férocité emplissait ses compagnons de bord d’une vindicte nouvelle. Tout l’état-major de Forbin, à l’exception de Levasseur qui, ayant pris le commandement du navire hollandais, en avait rejoint le bord, tous avaient félicité Forbin pour cette nouvelle et étonnante recrue.
    Forbin avait dû accepter cette souffrance en lui.
    La peur de perdre Mary au combat se transformait en admiration et en besoin de possession dès que le fracas des armes s’était tu.
    Mary ne s’attardait pourtant jamais dans sa cabine. Elle s’y rendait toujours de nuit, le plus discrètement possible pour ne pas risquer de lui porter tort, mais des rumeurs circulaient sur les goûts particuliers du commandant Forbin. Fort heureusement, celles-ci se cantonnaient aux matelots. Ni Forbin ni ses officiers n’en avaient eu l’écho. A peine lavés du sang de leurs victimes, Mary et Forbin faisaient l’amour comme si cette étreinte-là devait être la dernière, parlant peu et surtout pas du lendemain. Ensuite, Mary regagnait la batterie et étendait son hamac à côté de celui de Corneille. Elle sentait qu’il ne dormait pas. Qu’il l’attendait, empli du même

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