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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Forbin, cela arriverait.
    Forbin s’avança et l’enlaça à l’étouffer.
    — Je te demande pardon, pardon de mon égoïsme et de ma lâcheté. Je suis un vieil imbécile. Tu mérites mieux que ce que je peux te donner. Beaucoup mieux. Mais quoi que tu fasses, Mary Read, sache qu’aucune autre jamais ne prendra ta place, ni n’obtiendra ce que je te refuse aujourd’hui. Je t’en fais le serment. De même, sache qu’il y aura toujours sur terre ou sur mer, moi vivant, quelqu’un sur qui tu pourras compter.
    — Je le sais, mon capitaine.
    Ils demeurèrent un long moment ainsi en silence. Parce que tout était dit. L’un et l’autre en savaient le prix.
    — Où iras-tu ?
    — A la cour du roi Jacques, répondit Mary sans hésiter. J’ai appris le métier de marin, j’y apprendrai celui d’espionne.
    — Ne te perds pas en voulant trop gagner.
    — Si j’étais de la race d’Emma, Forbin, tu ne m’aurais pas aimée.
    Il sourit et la serra plus fort encore.
    — Fais-moi l’amour, dit-elle. Pour la dernière fois, pour que j’emporte avec moi un peu de cette lumière qui brille dans tes yeux quand tu te prends à rêver.
    Pour seule réponse, il la souleva dans ses bras et l’emporta dans l’escalier.
     
    Au petit jour, refusant l’idée douloureuse d’un adieu, Mary quitta la demeure de Forbin sur la pointe des pieds. De même, elle négligea celle de Corneille et s’engagea, sa solde en poche et son sabre au flanc, sur la voie romaine qui remontait vers Paris, le cœur lourd, mais sans regret.
     

15
     
     
    L a voie pavée s’étirait au milieu des champs misérablement saccagés par les pluies diluviennes qui avaient ravagé l’Europe. Mary s’apercevait en marchant sur le bas-côté que les dégâts étaient terribles. A Brest, elle les avait peu remarqués. Il était vrai qu’elle n’y était pas restée assez longtemps pour vraiment en juger ! Ici, des champs entiers de blé étaient perdus, pourris sur pied. Partout les paysans s’affairaient, la mine sombre. La disette ne tarderait pas à se faire sentir. Mary en frissonna. Les prix allaient flamber. C’était toujours ainsi.
    Avec le peu d’argent qu’elle emportait, elle se trouverait vite démunie. Or, pour atteindre son but, il lui faudrait paraître. Elle soupira en se disant que son obstination risquait plus sûrement de la perdre que de l’élever. Elle ne pouvait plus pourtant revenir en arrière. Elle repoussa une vague de découragement et pour s’en guérir força le pas, l’accordant au roulement des charrettes que des bœufs tiraient.
    Elle se mit à siffloter, tout en se gardant de ce flot de cavaliers, de chariots, de carrosses et de piétons qui circulaient dans les deux sens sans discontinuer. « Au moins, songea-t-elle, il me protège des malandrins qui à l’orée des bois voudraient me détrousser. »
    Machinalement, à cette pensée, elle caressa ses deux pendentifs. Elle se souvint de la fois où Forbin, après l’amour, l’avait questionnée sur l’œil de jade. Il l’avait trouvé insipide et se demandait pourquoi elle y attachait tant d’importance. Il avait été ému lorsqu’elle le lui avait expliqué.
    « Tant pis, avait-elle conclu, s’il n’est pas d’une parure élégante. Sous mes bandages je n’ai pas à le montrer. »
    Quant à la salamandre, Forbin lui avait conseillé de la cacher pour ne pas se la faire voler.
     
    Le soleil tentait une percée timide entre de lourds nuages lorsqu’un trot qui se rapprochait l’amena à longer le fossé. Elle n’en poursuivit pas moins sa route. A sa grande surprise, l’animal se plaça à son côté et une voix amie la força à relever la tête.
    — Même pas un baiser d’adieu, matelot ?
    Le visage de Mary s’éclaira tandis que Corneille sautait à bas de son cheval, pareillement à l’aise sur sa croupe que sur le pont du navire. Comme Mary s’étonnait de le retrouver, Corneille s’empressa d’avouer :
    — Forbin m’a chargé de t’escorter.
    Mary se sentit gonflée d’un orgueil infantile. Claude de Forbin ne se serait pas séparé de Corneille sans une bonne raison. Quoi qu’il en dise, il l’aimait assez pour ne pas la perdre tout à fait. Tout était donc encore possible. Il suffisait de laisser passer le temps.
    Corneille lui tendit le licol de la deuxième monture qu’il avait entraînée à sa suite, mais, au lieu de l’enfourcher, Mary se contenta d’allonger son pas. Ils marchèrent côte

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