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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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t’expliquer.
    Forbin s’installa à son tour dans le fauteuil en vis-à-vis, apaisé de sa présence qu’il avait cru perdue à jamais.
     
    Lorsqu’il eut achevé son récit, Mary se sentit idiote d’avoir douté de lui. Elle s’en excusa.
    — Ta colère était légitime, Mary. J’ai eu tort de la sous-estimer mais je ne pouvais m’élancer sur tes traces sans y attirer Emma.
    — Tu as bien fait de me prétendre morte. Puisqu’elle a épousé mon cher « oncle », elle est devenue mon ennemie. Je doute fort qu’elle me recherche pour m’offrir ma part d’héritage. Tobias Read n’est pas homme à s’en laisser délester. Bien plus sûrement à m’éliminer.
    Forbin hocha la tête. Il avait passé sous silence l’aveu d’Emma concernant son affection pour Mary. Il l’avait perçue sincère. Mais il persistait à croire que Mary ne devait plus l’approcher.
    Perrine entra sur ces entrefaites et s’étonna de les trouver. C’était inhabituel et elle en fut embarrassée. Forbin se leva et lui demanda de préparer un plantureux déjeuner. Puis il revint vers Mary.
    — Tu as faim, je suppose.
    Elle hocha la tête, puis ajouta :
    — Cette conversation n’est pas terminée.
    — Je le sais, dit-il, mais il te faudra patienter jusqu’à ce soir. Je suis convoqué par l’amiral à huit heures et je ne peux me soustraire à son ordre. Reste ici si tu le souhaites. Je passerai rassurer Corneille en me rendant à l’arsenal. Dès que cela me sera possible, je te rejoindrai.
    Mary acquiesça. Sa colère était tombée. Ne demeuraient que l’envie de lui et une sincère reconnaissance pour sa protection.
     
    Mis au fait, Corneille s’assura qu’Emma de Mortefontaine avait dit vrai et attendit que le navire l’emportant eût largué ses amarres pour rendre visite à Mary chez Forbin. Elle était en train de lire un traité d’astronomie qu’elle avait découvert sur une étagère de la bibliothèque. Richement illustré de dessins à la plume, il retraçait toutes les constellations, les nommant, donnant leur position aux mois de l’année. Elle n’avait pas vu le temps passer. Mary abandonna pourtant son livre sans regret.
    — Ravi de te retrouver saine et sauve, dit-il pour la saluer, réfrénant une nouvelle envie de l’enlacer.
    — J’ai été stupide, répondit Mary dans une moue enfantine. J’aurais dû revenir vers toi. Tu aurais apaisé mes craintes.
    Corneille haussa les épaules sans rien répliquer, sachant, lui, de quel argument il l’aurait consolée. Un silence gêné s’installa entre eux, que Forbin rompit en pénétrant dans la pièce. Mary lui sut gré d’arriver au bon moment.
    — L’air fraîchit, déclara Forbin, qui n’avait rien remarqué. L’orage sera violent cette nuit encore.
    — En ce cas, décida Corneille, je vais vous laisser.
    Mary allait répondre à son bonsoir, lorsque Forbin lança, l’air guilleret :
    — Mes ordres viennent de tomber. Je regagne la Méditerranée pour prêter main-forte à Tourville. Dans trois semaines, en lieu de brume, c’est le soleil que nous irons saluer.
    — C’est une bonne nouvelle, capitaine, répondit Corneille.
    Mary sentit pourtant qu’il mentait. Corneille aimait autant Brest que Forbin sa Provence. Il prit congé.
    Perrine, qui s’activait depuis longtemps aux cuisines, s’en vint annoncer que le repas était prêt et Mary jugea bon pour amorcer le sujet qui lui brûlait le cœur d’attendre la fin du souper. La nouvelle de sa mutation tenait tant Forbin qu’il paraissait en avoir oublié Emma de Mortefontaine, la disparition de Mary et toutes les promesses qu’il lui avait faites.
    Il lui raconta Aix-en-Provence, cette ville blottie contre la Sainte-Victoire, qui s’enneigeait parfois comme un sommet des Alpes puis se remettait à chanter du crissement des cigales ; le thym et le serpolet qui accrochaient leurs parfums aux semelles, ces pins parasols à l’ombre desquels il faisait bon paresser. Il lui parla de l’arsenal de Toulon qui, à son sens, était le mieux nanti de France. De la magie de cette lumière en mer et des côtes dont les ocre, les rouges et les bruns s’enfonçaient dans des eaux cristallines. De ces bleus profonds marine ou turquoise qui semblaient des gemmes merveilleuses.
    — Tu verras, Mary. Tu verras ce qui coule en mon sang. Ces parfums qui ne ressemblent à aucun que tu connais passeront dans tes veines, les nourriront de vitalité et tu oublieras la

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