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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Readgemond. »
    Avec ce billet, elle s’assurait un possible retour en arrière. Ce n’était jamais à négliger. Ensuite de quoi, elle tourna bride dans le petit jour orageux qui se levait.
    Elle vérifia plusieurs fois par-dessus son épaule qu’on ne la suivait pas, ni de près ni de loin, puis résolument força l’allure jusqu’à Dunkerque, sans aucune pitié pour la douleur qui gagnait au-delà du mollet.
     

22
     
     
    L es pluies avaient repris, incessantes, rendant les routes pavées glissantes sous le fer des chevaux. Il était impossible de tenir le galop. A certains moments, la visibilité était presque nulle tant cela tombait dru.
    Mary ne s’en découragea pas. Elle ne fit pas davantage de halte qu’elle l’avait prévu. Sur La Perle, elle avait appris à affronter les éléments déchaînés. Ceux-ci ne l’effrayaient plus. Il suffisait pour arriver à bon port de ménager sa monture en écoutant, au souffle de ses naseaux ou au rythme de son pas, si elle se trouvait malmenée et craintive. Comme la coque ou la mâture d’un navire. De son attention dépendait la survie du marin autant que du cavalier dans ces circonstances extrêmes.
     
    Un arc-en-ciel parfait accueillit son arrivée à Dunkerque, dix jours plus tard, dotant la ville de Jean Bart d’une auréole de fierté. Le noroît poussait les nuages vers les terres. Sur la mer, le ciel s’était dégagé.
    Mary gagna la porte de la ville et égoutta son tricorne en penchant la tête de côté. Une rigole d’eau se déversa, éclaboussant un chien errant qui fila en couinant. Elle s’en amusa. Elle avait faim. Elle flatta l’encolure de son cheval.
    — Tu aimerais bien te reposer aussi, mon beau. Allons, un petit effort encore et tu auras une bonne avoine pour t’en remercier, et moi une bonne potée.
    L’animal secoua les naseaux et avança au pas. Une fillette qui jouait au cerceau lui indiqua d’un doigt tendu la direction du port. Les échoppes étaient de colombages et de pierres que Mary pensa être des galets. Les rues pavées s’encombraient de marchands de quatre-saisons qui avaient abrité sous des tentes leurs carrioles pauvrement garnies.
    Les rayons chauds du soleil réchauffèrent Mary. Elle se prit à sourire en inspirant à grandes goulées ces parfums d’embruns et de marée. Elle s’en sentit renaître. Ils lui avaient manqué. Corneille avait raison : la cour de France, autant que toutes les autres, puait.
     
    Ils s’étaient donné rendez-vous sur le port, dans une taverne appelée A la Recouvrance. Mary la trouva facilement. Elle faisait face à la rade où de nombreux navires mouillaient. Semblable à tant d’autres ports, une agitation ordonnée y régnait.
    Mary tiqua pourtant.
    Indépendamment des matelots qui s’activaient auprès des cargaisons à charger et décharger, nombre de gens de toutes conditions s’étaient massés sur un quai, scrutant l’horizon avec une inquiétude non dissimulée. Au loin, des canons grondaient. Intriguée, Mary s’approcha d’eux et en chercha l’explication : une escadre complète aux pavillons anglais tentait de forcer l’entrée des goulets. Les batteries de côte fortifiées canonnaient pour obliger les navires à battre en retraite. Plusieurs corsaires avaient ouvert le feu, barrant l’accès du chenal. Mary comprit d’instinct qu’ils étaient en difficulté. Plus lourde et mieux armée, la flotte avançait.
    Autour d’elle, les commentaires fusaient :
    — Y passeront pas ! assurait l’un.
    — Jean Bart saura bien les arrêter ! constatait l’autre.
    — Pas sûr ! Ces Anglais sont comme des anguilles, faut toujours qu’y passent par les mailles du filet ! certifiait le troisième.
    Mary se rangea à son avis. Il valait mieux ne pas tramer sur le quai. Quelles que soient les intentions de la marine anglaise, le nombre de badauds grandissant, on ne manquerait pas de bientôt se bousculer, voire de s’étriper. La peur avait ce désavantage de transformer une menace potentielle en véritable danger.
    Mary s’écarta, avisant, pour lui donner raison, un tire-bourse qui s’activait dans les poches d’un monsieur accompagné de son épouse et de son fils.
    Elle pénétra dans la taverne. Le propriétaire s’approcha d’elle, délaissant d’autres clients qui commentaient les événements.
    — Qu’est-ce que je vous sers ? demanda-t-il.
    — Je cherche un matelot du nom de Corneille, déclara Mary. Il m’a donné

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