Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
avançaient côte à côte, les yeux cernés d’une même insomnie.
    — Qu’est-ce que tu comptes faire après ? demanda Mary.
    — Je n’en sais trop rien. Peut-être bien chercher un trésor, s’amusa-t-il.
    — Et si je n’ai pas envie de le partager ?
    — Bah, reprit-il en souriant. Je trouverai bien le moyen de te faire changer d’idée…
    Mary n’eut pas le temps de répliquer. Le chariot de tête contenant les blessés s’était arrêté. Ils talonnèrent leur monture d’un même élan pour revenir à sa hauteur. Tous deux fermaient le groupe, les sens aux aguets. Dans le chariot, la mort avait fait son œuvre. Le compagnon de ligne de Niklaus avait rendu l’âme. Niklaus ordonna qu’on l’enterre selon ses dernières volontés, sous un châtaignier, à l’orée d’un champ.
     
    En arrivant au campement, on leur apprit qu’un nouveau plan de bataille avait été établi. Niklaus enragea. Ils en avaient changé cent fois, et ils se ressemblaient tous au final. Il n’y avait ni vainqueur ni vaincu, seulement des morts et des blessés. Et cette amertume tenace de ne pas savoir à quoi cela servait.
    Le bivouac installé, Niklaus, libéré de ses obligations, noya son agacement dans l’alcool. Mary demeura auprès de ses compagnons à jouer aux dés. Lorsqu’elle vint se coucher, Niklaus ronflait bruyamment. Elle cala sa respiration sur son souffle régulier et s’endormit avec la sensation que la terre tout entière l’aspirait en ses rets.
     
    Deux mois plus tard, Mary eut confirmation de ce qu’elle craignait. Depuis quelques jours, elle se levait nauséeuse et embarrassée. Elle n’avait rien dit à Niklaus. Mais était certaine de se retrouver enceinte. Leur complicité s’était renforcée et ils éprouvaient l’un pour l’autre désormais bien davantage qu’une simple attirance. Ils ne cessaient pas de se surprendre mutuellement, et de s’apprécier.
    Ce constat la rendit folle de rage. Il contrariait ses projets. Quant à avorter, il n’y fallait pas songer. Où dénicher une sorcière qui accepterait ? Les villages que l’armée traversait souffraient de cette guerre, des rapines et de la misère que leur causaient les Français. A l’approche des soldats, les portes et les volets se fermaient. D’autres fois, c’était avec les fourches que les paysans défendaient leurs réserves, refusant de lâcher plus que la réquisition ne l’exigeait. Alors, qu’auraient-ils fait d’un soldat réclamant l’aide d’une diablesse pour se débarrasser de son gros ventre ?
    Mary n’avait d’autre solution que de guerroyer encore et encore en espérant que le cheval et la violence décrocheraient cet enfant non désiré.
    L’ennui était que, depuis plusieurs semaines, rien ne bougeait dans leurs rangs. Les nouvelles consignes exigeaient de surveiller l’ennemi qui campait sur ses positions. Aucune bataille ne venait grossir le pécule de leurs paris et Mary n’avait aucune envie de perdre cette manne inespérée. Elle décida de se taire, jusqu’à ce que le sort en ait décidé. Son nouvel état et ses conséquences la rendirent pourtant désagréable et grincheuse à souhait.
     
    — Mais enfin, Mary, qu’est-ce qui se passe ? finit par s’étonner Nicklaus devant sa mauvaise humeur, alors qu’elle baissait la lampe, prête à se coucher.
    Un mois de plus s’était écoulé.
    — C’est la bataille qui te manque ou quelque chose que j’aurais fait ?
    La « chose » que Niklaus avait faite commençait à bouger dans le ventre de Mary. A ce rythme-là, avant longtemps, elle ne pourrait plus le cacher. Elle s’étonnait même que son Flamand si malin et avisé ne se soit pas aperçu de ce bourrelet à sa taille. Ce bourrelet qui enflait.
    — Je vais quitter l’armée, lâcha Mary tout d’un trait.
    Niklaus arrondit ses yeux de surprise.
    — Pourquoi ? Tu en as assez de moi et de l’armée ?
    — Ni de l’un ni de l’autre. Avant longtemps j’y serai contrainte. Je suis enceinte, Niklaus.
    À sa grande stupéfaction, celui-ci afficha un sourire soulagé.
    — J’avais remarqué, avoua-t-il.
    Mary s’empourpra de stupeur autant que de colère.
    — Comment ça, remarqué ? Pourquoi n’as-tu rien dit ?
    Il la bâillonna d’une main, la pressant contre lui. Il n’était pas utile que tout le régiment en soit informé et Mary avait élevé la voix, rompant leurs habitudes de chuchotement.
    — Je ne suis pas stupide, Mary. Voilà

Weitere Kostenlose Bücher