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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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juste
l’intention de continuer à le suivre, comme tu l’as fait la nuit
dernière ! Tu n’espères tout de même pas le faire juste périr
d’exaspération ?
    La vérité finit par se faire jour dans la lourde
épaisseur de mon esprit, et je murmurai avec effroi :
    — Tu envisages donc sérieusement que ton mari
soit tué ?
    — J’entends qu’il soit tué, oui. Sérieusement,
c’est tout à fait exact, jeta-t-elle en manière de plat sarcasme. De quoi
croyais-tu que nous parlions, asenazzo, lorsque nous avons envisagé que
tu pourrais me rendre un service ?
    — Je pensais que tu voulais parler de... ça.
    J’effleurai timidement son jardin intime.
    — Laisse cela à présent, s’il te plaît. (Elle se
dégagea d’un mouvement souple du corps.) Et pendant que nous y sommes, si tu dois
absolument utiliser un langage vulgaire, essaie au moins d’appeler cela ma minette. Cela sonnera de façon un peu moins épouvantable que... ce mot que tu as
employé tout à l’heure.
    — Alors, tu veux dire que je ne toucherai plus
jamais ta minette ? balbutiai-je misérablement. Pas avant que je ne t’aie
rendu cet autre service ?
    — Aux victorieux, le butin ! J’ai pris
plaisir à polir ton petit poignard, Marco, mais un autre bravo pourrait
venir me proposer une épée.
    — Un bravo, répétai-je, songeur. Oui, un tel
fait d’armes ferait de moi un véritable bravo, n’est-ce pas ?
    Elle acquiesça et ajouta d’un ton persuasif :
    — Et tu imagines bien que j’aimerais davantage un
impétueux bravo, plein d’allant et de panache, qu’un vulgaire amant tout
juste capable de profiter de la femme d’un autre.
    — Il y a une épée, dans une armoire de la maison,
murmurai-je pour moi-même. Elle doit avoir appartenu à mon père ou à l’un de
ses frères. Bien qu’assez ancienne, elle est encore brillante et bien aiguisée.
    — Personne ne te soupçonnera, c’est évident. Mon
mari doit avoir de nombreux ennemis, quel homme important n’en aurait
pas ? Mais nul n’ira imaginer qu’un simple... je veux dire qu’un homme
plus jeune, ait eu un quelconque mobile pour attenter à sa vie. Tu n’as qu’à l’accoster
dans l’obscurité, lorsqu’il sera seul, et frapper de façon assez décisive pour
qu’il n’ait pas le loisir d’aller donner ensuite une quelconque description...
    — Non, la coupai-je. Il vaudrait mieux que je le
trouve à un moment où il évolue avec d’autres de ses pairs, parmi lesquels se
trouveraient forcément certains de ses ennemis véritables. Là, il me serait
sans doute plus facile d’agir sans être vu... Mais non.
    Je me rendis soudain compte que j’envisageais
froidement un meurtre et conclus donc, sans conviction :
    — Ce serait sans doute impossible.
    — Pas pour un authentique bravo, susurra
mon Ilaria, douce comme une colombe. Pas pour quelqu’un qui en serait remercié
avec tant de générosité...
    Elle se lova contre moi et fit bouger son corps avec
une infinie volupté, jouant de ladite récompense comme d’un vrai supplice de
Tantale. Cet intermède capiteux eut pour effet d’éveiller en moi des émotions
contradictoires, mais mon corps n’en retint pour sa part qu’une seule et
brandit bientôt un fier bâton de chef d’orchestre tout prêt à diriger une
fanfare.
    — Non, dit Ilaria en me repoussant, soudain
redevenue une vraie femme d’affaires. La maîtresse de musique peut délivrer
gratuitement sa première leçon afin de donner une idée de ce qu’elle peut
enseigner. Mais si tu en souhaites d’autres, d’un degré plus avancé, il te
faudra les mériter.
    Me renvoyer de la sorte, en me laissant sur ma faim,
ne manquait pas d’astuce. Je sortis en effet de la demeure (par la porte de
service, toujours) frémissant d’envie et empli de désir comme si je n’avais pas
été satisfait du tout. C’était désormais ma sensualité seule qui me guidait et
me gouvernait, et ma baguette de chef d’orchestre n’avait plus qu’une idée,
retrouver au plus tôt le boudoir intime de mon étourdissante dame, quoi que
cela dût exiger. D’autres événements semblèrent curieusement vouloir se mettre
à l’unisson du sombre projet que j’envisageais. Parvenu sur la place
Saint-Marc, je la trouvai encombrée de gens massés en petits groupes qui
discutaient avec agitation et semblaient assez choqués. Un crieur public en
uniforme égrenait à pleine voix les dernières nouvelles.
    Le doge Ranieri Zeno avait

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