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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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Une mélodie à une corde ?
    Elle secoua lentement la tête, comme si elle n’en
revenait pas. J’esquissai alors un geste de retraite misérable.
    — Non, ne t’en va pas. Ne bouge pas. Reste où tu
es et laisse-moi t’enseigner les choses comme il faut. D’abord, et pour
commencer...
    Je fus fort agréablement surpris d’apprendre que faire
l’amour pouvait se comparer à une interprétation musicale et que, « pour
commencer », les deux joueurs devaient entreprendre leur partition avec
des instruments distincts des principaux (tels, par exemple, les lèvres, les
cils et les lobes de l’oreille), enchanté également de constater combien la
musique pouvait être délectable, lors même qu’elle n’en était encore qu’à
l’esquisse, en pianissimo... Le tempo passa en mode vivace dès
qu’Ilaria se servit comme instruments de ses seins tout entiers, avec leurs
mamelons doucement rigides, et qu’elle m’encouragea, me guidant des mains et de
la voix, à utiliser ma langue, plutôt que mes mains, pour en tirer de superbes
notes. Arrivée au pizzicato, elle donna littéralement de la voix et
chanta, sans doute pour accompagner la mélodie.
    Lors d’un bref intermède entre ces chœurs, elle me
dit, sur le doux murmure de la confidence :
    — Tu as maintenant entendu ce qu’est l’hymne du
couvent.
    Je sus ainsi que la femme possède en effet ce petit
instrument que j’avais entendu appeler lumaghèta, et que ce mot est
exact, dans tous les sens du terme. Car si son aspect le rapproche d’un petit
escargot, sa fonction est assez similaire à la molette qu’utilise le luthier.
Et après qu’Ilaria m’eut indiqué, en s’y attelant elle-même, la façon dont il
convenait de manipuler délicatement et habilement sa lumaghèta, je pus à
mon tour, comme si elle était un véritable luth, la faire elle-même s’animer,
chantonner, vibrer et résonner de façon délicieuse. Elle me révéla également
d’autres actes divins auxquels elle ne pouvait s’adonner seule et dont je
n’eusse même jamais soupçonné l’existence. Ainsi, à un moment, je jouais de mes
doigts comme sur les cordes d’une vielle, à un autre j’utilisais mes lèvres
comme si je jouais de la dulzaina, en faisant virevolter ma langue tel
un flûtiste soufflant dans son instrument.
    Ce ne fut que lorsque notre aubade eut duré une bonne
partie de l’après-midi qu’Ilaria donna le signal qui nous permit de joindre nos
instruments principaux, et nous jouâmes alors à l’unisson, faisant enfler la
musique crescendo jusqu’à un incroyable orgasme fortissimo. Durant
le reste de l’après-midi, nous nous ingéniâmes à revenir à ce point d’extase,
encore et encore. Après quoi nous nous laissâmes délicatement aller à quelques
codas, de plus en plus assourdies, jusqu’à ce que nous fussions tous deux
pleinement rassasiés de musique. Nous demeurâmes alors allongés tranquillement
l’un contre l’autre, jouissant, alanguis, de l’écho déclinant des trémolos qui
résonnaient doucement... doux, si doux...
    Lorsqu’un moment se fut écoulé, je me sentis inspiré
et m’enquis élégamment :
    — Tu ne voudrais pas faire des bonds et éternuer,
maintenant ?
    Elle eut un léger mouvement d’incrédulité exaspérée,
me regarda du coin de l’œil en marmonnant quelques mots que je n’entendis pas,
puis déclara :
    — Sans façon, Marco, je te remercie, ce ne sera
pas nécessaire. Ce que j’aimerais, c’est que nous parlions un instant de mon
mari, si tu veux bien.
    — Pourquoi assombrir un si beau jour ?
objectai-je. Reposons-nous un peu et voyons si nous ne pourrions pas
interpréter un autre morceau...
    — Il n’en est pas question ! Tant que je
serai une femme mariée, je resterai désormais ch-chaste. Nous ne revivrons plus
de tels moments, jusqu’à ce que mon mari soit mort.
    Lorsqu’elle avait posé un peu plus tôt cette
condition, j’avais acquiescé. Seulement voilà, j’avais à présent goûté à
l’extase : la simple pensée qu’il fallût attendre pour m’en délecter à
nouveau était tout simplement insupportable. Aussi fis-je remarquer, un brin
dépité :
    — Même s’il est vieux, cela pourrait bien prendre
des années.
    Elle me dévisagea apparemment sans comprendre et
lança, mordante :
    — Pourquoi donc tant de temps ? Quels moyens
entends-tu utiliser ?
    Éberlué, je répondis :
    — Moi ?
    — Enfin, ne me dis pas que tu avais

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