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L’ESPION DU PAPE

L’ESPION DU PAPE

Titel: L’ESPION DU PAPE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Madral , François Migeat
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encore lui qui l’avait suggéré, justement. Il avait trouvé qu’il se mariait admirablement avec l’âge du candidat (l’un des plus jeunes papes, peut-être même le plus jeune que l’Église ait jamais connus), mais aussi avec le thème de « paix universelle » dont il se voulait porteur. Et sans doute était-ce lui qui avait ajouté ce petit rien permettant au dernier moment à son ami de l’emporter. Quoi de plus prometteur, en effet, que de porter sur le Saint-Siège un pape au nom si rassurant ?
    Les rêveries de Stranieri sont de nouveau interrompues par la voix d’Amaury.
    — Vous ne m’avez pas répondu tout à l’heure, monseigneur. Seriez-vous prêt à nous transmettre votre savoir des armes ?
    Touvenel jette un coup d’œil vers le maître de maison.
    — Seulement si votre père le permet.
    Amaury, du regard, interroge Philippe de Paunac. Le Parfait considère un long moment son fils, avant de déclarer :
    — Tu ne connais même pas l’identité de ceux qui nous ont agressés et tu veux te battre contre eux ?
    — Mais, père, s’indigne Amaury, tout le monde sait que cette Confrérie Blanche est formée d’hommes du seigneur de Puech. Le cavalier au crucifix qui les dirige et qui monte avec une jambe plus courte que l’autre est reconnaissable entre mille. Je vous l’ai déjà montré l’autre jour, devant l’église, quand il avait le visage à découvert. C’est ce baron Guiraud, qui est toujours à ses côtés.
    — Encore faudrait-il que tu en apportes la preuve.
    Et comme Amaury ne répond rien, il ajoute :
    — La seule violence qu’autorise notre religion est celle qui permet à un homme de se défendre quand on l’attaque. Te sens-tu capable de te maîtriser et de ne porter de coups que si l’on menace de t’en porter un ?
    — Oui, père. Je pense en être capable.
    — Et tes camarades, auxquels tu veux apprendre le maniement des armes, le seront-ils ?
    — Je ne choisirai que ceux qui m’en paraîtront dignes.
    — Serez-vous aussi capables de ne point vous mettre, tant que vous le pourrez, dans le cas de ne pas avoir à vous défendre jusqu’au meurtre ?
    — Nous nous y efforcerons, je vous le promets. Mais pas au point de devoir pour cela renier notre religion et embrasser la Croix, comme ces assassins veulent nous y obliger.
    — Je ne te le demande pas non plus.
    Paunac ferme les yeux, place ses mains devant son visage et semble se recueillir profondément. La tablée, pour respecter sa réflexion, reste silencieuse. Au bout de quelques minutes, il écarte les mains, redresse la tête et s’adresse à Touvenel.
    — Chevalier, je vous donne mon accord pour éduquer ces jeunes gens dans votre science des armes, mais de la façon la plus raisonnable qu’il vous semblera possible. Vous avez trop souffert vous-même de ses excès pour ne pas mesurer jusqu’où elle peut entraîner. La nature mauvaise qui nous habite tous est sans cesse à l’œuvre pour nous pousser au sang et au crime. Qu’ils apprennent donc de vous à se défendre, mais jamais à attaquer. À répondre, mais jamais à provoquer.
    — Je m’y efforcerai, messire.
    Amaury, heureux, saisit la main de son père et l’embrasse.
    — Merci, père. Je saurai être digne de votre confiance. Merci aussi à vous, monseigneur, lance-t-il à Touvenel.
    Puis, se tournant vers Stranieri et frère Yong :
    — J’ai remarqué, messires, que vous vous battiez vous-mêmes avec un succès redoutable, sans armes et comme en dansant. D’où tenez-vous des techniques de combat aussi curieuses ?
    Stranieri échange un regard amusé avec frère Yong, et répond au jeune homme :
    — C’est un art que frère Yong m’a appris lorsque nous nous sommes rencontrés. Il repose sur la concentration, l’énergie vitale et l’utilisation de la force de l’adversaire. Nous vous l’apprendrons si vous le voulez, et bien sûr si votre père le permet aussi.
    Tous portent leur regard vers Philippe de Paunac, qui acquiesce d’un geste résigné. Stranieri poursuit pour Amaury :
    — Malheureusement, frère Yong doit rejoindre pour l’instant l’abbaye de Fontfroide, et je dois moi-même me rendre dans plusieurs châteaux de la région, où l’on m’attend, ici pour célébrer un mariage, là pour participer à une joute, ailleurs pour donner une aubade. Mais, dès que je serai libéré de ces obligations, je vous promets de revenir vous enseigner quelques mouvements de ces

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