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L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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et de Carcassonne, de ma mère, dame Alice de Montmorency, de même que les miens.
    —    Vos hommages sont bien notés, sire Guy, caqueta le vieillard en inclinant la tête à son tour, et vous voudrez, en retour, bien présenter les miens à vos parents. Il y a longtemps que je vous ai vu. Vous prendrez bien un verre de vin ?
    —    Avec plaisir, sire.
    Jehan de Gisors fit un signe de la main, et aussitôt un serviteur porta une coupe d’argent à Montfort, puis à son maître. Guy attendit que le vieillard entame le breuvage avant de faire de même.
    —    Alors, demanda Jehan après avoir fait claquer sa langue en signe de satisfaction, vos parents se portent bien malgré cette croisade ?
    —    Mon père n’est jamais plus heureux que lorsqu’il guerroie, sire. Quant à ma mère, elle l’a rejoint dans le Sud et en semble satisfaite.
    —    Et que me vaut l’honneur de votre présence à Gisors ? Vous n’avez quand même pas fait ce long chemin en plein hiver pour me saluer.
    —    Non, sire. Mon père m’a chargé de s’informer auprès de vous du nombre et de l’état des troupes que vous comptez lui fournir pour la prochaine quarantaine.
    Le fait que je me tenais en retrait derrière Guy servit sans doute à masquer mon étonnement. Je compris qu’il offrait à son hôte une explication crédible pour masquer la véritable raison de sa présence. Son père, véritable génie du Mal, avait tout prévu.
    —    Diantre, un simple courrier aurait amplement suffi ! lança Jehan, amusé, de sa voix craquelée. Votre père doit beaucoup tenir à mon aide pour dépêcher son propre fils.
    —    Il y tient, en effet, sire. Il a pour vous la plus grande des estimes et connaît votre puissance.
    —    Bien, fort bien, marmonna le vieil homme, visiblement flatté. Nous en reparlerons.
    Malgré moi, j’admirais l’habileté avec laquelle procédait Guy. Il n’était certes pas un guerrier, mais il tenait on ne peut mieux du diplomate et du courtisan. Son père, qui était tout sauf idiot, lui avait confié une mission qui lui convenait à merveille.
    La conversation se poursuivit une bonne heure, légère et animée. Le vieux seigneur, curieux du déroulement de la croisade, se repaissait des récits animés et replets de détails sanglants que lui faisait Pierrepont, qu’il ponctuait de petits cris excités et d’exclamations guerrières.
    —    Bon ! Je suis un vieil homme ! finit-il par dire, visiblement à regret. Le sommeil me fuit depuis des années, mais mes vieux os, eux, exigent néanmoins de plus en plus de repos. D’ici à notre prochaine discussion, vous êtes ici chez vous.
    Il se tourna vers Pierrepont.
    —    Sire Alain, je présume que vous profiterez de votre présence pour passer par vos terres de Laon ?
    —    C’est possible, en effet, sire, répondit évasivement Pierrepont. Mais auparavant, je dois attendre des nouvelles de quelques seigneurs anglais auxquels le sieur de Montfort a demandé une contribution à la cause de Sa Sainteté Innocent.
    —    Je vois. Alors, Dieu veuille que ces nouvelles soient bonnes. Il est grand temps que ces maudits hérétiques soient écrasés une fois pour toutes comme les cafards qu’ils sont. À quoi servirait d’être chrétien si Dieu ne nous assurait pas la victoire ? Je vous le demande !
    —    Bien dit ! s’exclama Pierrepont.
    Nous saluâmes tous le seigneur de Gisors et faisions mine de nous retirer lorsqu’il interpella Montfort.
    —    Sire Guy, si vous voulez bien rester encore un peu, j’aimerais vous entretenir en privé.
    Je vis le jeune homme se raidir et me jeter à la dérobée un regard inquiet. Tous deux, nous avions songé à la même chose. Les documents lui seraient peut-être remis le soir même.
    —    Bien sûr, sire, dit-il.
    Tous quittèrent la chapelle. N’ayant rien de particulier à faire, je me baladai un peu dans la forteresse. Parvenu près du logis des troupes, un brouhaha attira mon attention. Je repérai, non loin de là, une petite bicoque aux fenêtres illuminées et compris qu’il s’agissait d’une taverne. Jamais encore je n’avais vu un regroupement de soldats sans qu’il se trouve, non loin, un tel endroit. D’expérience, je savais que l’information y circulait toujours librement et je décidai d’aller me désaltérer.
    Lorsque j’entrai, quelques-uns des hommes de Pierrepont, attablés dans un coin, me toisèrent d’un

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