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L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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Sanctum sanctorum 2 , frère Gondemar, dit à voix basse celui qui occupait le siège qui avait brièvement été le mien dans l’autre temple. Prononce les mots sacrés qui confirmeront que tu es bien le Magister des Neuf de Montségur.
    J’étais de plus en plus désorienté. Par deux fois, cet homme m’avait appelé « frère ». Il avait désigné le temple par son nom le plus sacré. Et voilà maintenant qu’il exigeait de moi les mots sacrés du rituel de fermeture des conseils. Que se passait-il ? J’avais fait irruption dans cet endroit avec l’intention bien arrêtée de m’emparer de la seconde part de la Vérité ou de mourir en le tentant, et voilà que j’avais l’impression étrange d’être accueilli en territoire ami. De toute évidence, on m’attendait. Ne sachant que faire d’autre, je remis mon épée au fourreau et décidai de jouer le jeu.
    —    Secretum Templi, finis-je par dire.
    —    Avance jusqu’à l’autel, ordonna l’homme.
    Sous le regard des inconnus, immobiles comme des statues de marbre, j’obtempérai avec toute la dignité dont je pouvais faire preuve et posai solennellement la main sur la cassette.
    —    De quel droit te présentes-tu parmi nous ? s’enquit-il lorsque je fus devant l’autel.
    Je demeurai interdit. De quel droit ? De celui du Lucifer, chargé de réunir les deux parts. De celui dont l’épée éventrerait les traîtres si elle le pouvait. Puis je compris. Il faisait référence au rituel de mon initiation. Il me testait, ce qui signifiait qu’il connaissait l’Ordre de l’intérieur. De plus en plus confus, je fouillai ma mémoire pour trouver les réponses correctes. Jusqu’à ce que je comprenne dans quelle situation j’étais fourré, je devais jouer le jeu.
    —    Du fait que j’en ai été jugé digne par mes frères, répondis-je.
    —    Alors, prouve que tu as vu la Lumière en redisant ton serment.
    De toute évidence, cet homme connaissait les particularités de la cérémonie d’initiation. Je pris un instant pour retrouver les mots de l’engagement que j’avais pris.
    —    Moi, Gondemar de Rossal, je promets et je jure de garder les secrets de l’Ordre des Neuf. Je m’engage à ne les point révéler et à empêcher tout frère ou sœur de le faire, y compris son Magister, s’il est en mon pouvoir de l’en empêcher, et en le tuant s’il le faut. Je m’engage en outre à les défendre au prix de ma vie, à leur consacrer mon existence entière et à les emporter dans la tombe. Je jure enfin d’obéir en tout au Magister sans jamais contester les ordres donnés sous l’abacus, et de ne sortir de Montségur qu’avec son autorisation expresse.
    L’homme se leva et se dirigea lentement vers moi. Une fois de l’autre côté de l’autel, il saisit le crucifix et le tendit devant ma bouche. Je crachai dessus et il le redéposa. Puis il tira une petite dague de sa bure. Comprenant ce qu’il attendait de moi, j’allongeai le bras, paume vers le haut. Il me fit une légère incision, juste assez pour faire perler quelques gouttes de sang qui maculèrent la nappe. Lorsque tout fut accompli, il retourna à son fauteuil et j’attendis.
    —    Bien, dit-il, maintenant que ces formalités sont remplies, prends place parmi les tiens, Gondemar de Rossal, Magister élu des Neuf de Montségur. Nous avons à parler.
    Aucune autre possibilité ne s’offrant à moi, j’acceptai et m’assis dans le fauteuil qui se trouvait à l’extrémité ouest du temple, face à lui.
    —    Un millier de questions doivent se bousculer dans ta tête, dit-il.
    —    C’est le moins que l’on puisse dire, me contentai-je d’ajouter, bien décidé à en dire le moins possible jusqu’à ce que je comprenne ce qui se passait.
    —    Commençons donc par répondre à celle qui te turlupine le plus.
    Sur son signe de tête, les cinq inconnus rabattirent simultanément leur capuchon. Je reçus alors mon second choc en quelques minutes.
    Face à moi, dans le fauteuil du Magister, se trouvait Alain de Pierrepont, qui me fixait d’un regard sérieux et solennel dans lequel je ne lus aucune agressivité. Au midi, c’est avec une surprise moindre que je reconnus Lambert de Thury, que j’avais suivi jusqu’ici, et qui inclina élégamment la tête quand nos yeux se croisèrent. Au septentrion, Guillot, le gros moine imbu de lui-même qui, en compagnie de son collègue, avait ordonné le bûcher de Gerbaut de

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