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Lettres - Tome I

Lettres - Tome I

Titel: Lettres - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pline le Jeune
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abandon. Les peuples de la Bétique allèrent plus loin : ils accusèrent en même temps que Classicus ses complices et ses agents, et réclamèrent une instruction distincte contre chacun d’eux.
    Je plaidais pour la Bétique et j’avais à mes côtés Lucceius Albinus, orateur à la parole abondante et fleurie ; nous étions déjà liés d’une amitié mutuelle ; cette mission partagée a rendu plus vive encore mon affection pour lui. La gloire, il est vrai, surtout celle qui tient aux lettres, a quelque chose d’ égoïste  ; entre nous cependant nulle rivalité, nulle jalousie, mais tous deux liés au même joug nous mettions nos efforts au service non de notre amour propre, mais de notre cause. Son importance et son succès nous ont paru exiger que nous n’assumions pas un tel fardeau chacun en un seul plaidoyer. Nous craignions que le temps, que la voix, que les forces ne nous fissent défaut, si nous voulions rassembler, comme en un seul faisceau, tant d’accusations, tant de prévenus ; que l’attention des juges ne vînt à être lassée et même brouillée par cette foule de noms et de causes ; et puis, que le crédit de chaque accusé s’ajoutant et s’associant à celui des autres, chacun ne bénéficiât des forces de tous ; enfin, que le plus puissant ne livrât le plus faible, comme victime expiatoire, et ne se sauvât en sacrifiant les autres. En effet, la faveur et la brigue ne triomphent jamais mieux que lorsqu’elles peuvent s’abriter sous le masque de la sévérité : nous avions présent à l’esprit l’exemple fameux de Sertorius qui invita le plus vigoureux et le plus faible des soldats à arracher la queue d’un cheval… Vous savez le reste. Nous aussi nous pensions que nous ne viendrions à bout d’une troupe si nombreuse d’accusés, qu’en les attaquant l’un après l’autre. Nous avons jugé bon d’établir d’abord la culpabilité de leur chef Classicus. C’était la meilleure préparation à l’accusation de ses complices et de ses agents, car complices et agents ne pouvaient être convaincus d’un crime dont, lui, il aurait été innocent. Nous en avons tout de suite adjoint deux à Classicus, Bebius Probus et Fabius Hispanus, l’un et l’autre puissants par leur influence, Hispanus même par son talent oratoire. L’affaire de Classicus fut expédiée brièvement et sans peine. Il avait laissé un mémoire écrit de sa propre main, relatant les sommes, qu’il avait reçues pour chaque motif, pour chaque procès. Il avait même adressé à Rome, à une petite amie, des lettres pleines de vantardises et de fanfaronnades telles que : « Triomphe ! triomphe ! libéré de mes dettes j’accours auprès de toi ; j’ai dès maintenant ramassé quatre millions de sesterces par la vente d’une partie des habitants de la Bétique. »
    Le cas d’Hispanus et de Probus nous a coûté beaucoup de sueur ; avant d’aborder leur accusation, j’ai cru nécessaire de m’appliquer à établir que l’exécution d’un ordre était un crime ; car sans cela, il aurait été vain de prouver qu’il y avait eu des exécuteurs. D’ailleurs leur système de défense ne consistait pas à nier, mais à invoquer l’excuse de la contrainte : ils étaient des provinciaux et obligés de céder par crainte à toute injonction des proconsuls. Claudius Restitutus, qui me répondit, et qui a la pratique du barreau, l’esprit vif, toujours prêt à la riposte, déclare volontiers que jamais il ne fut si troublé ni si déconcerté que lorsqu’il se vit d’avance enlever et arracher les armes dans lesquelles il mettait toute sa confiance.
    Voici le succès de notre tactique : le sénat décida que les biens possédés par Classicus avant son gouvernement seraient séparés des autres ; et que les premiers seraient laissés à sa fille, les autres rendus aux peuples dépouillés. De plus les sommes qu’il avait payées à ses créanciers seraient restituées ; Hispanus et Probus furent exilés pour cinq ans ; tant on reconnut de gravité à des faits dont on se demandait d’abord s’ils étaient réellement coupables.
    Peu de jours après ce furent Clavius Fuscus, gendre de Classicus, et Stilonius Priscus, tribun de cohorte {64} sous Classicus, que nous accusâmes avec un succès inégal : Priscus se vit interdire l’Italie pour deux ans, Fuscus fut absous.
    Dans la troisième audience nous avons jugé préférable de réunir plusieurs accusés, afin

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