Lettres
toujours… Si tu ne viens pas, c’est que tu ne m’aimes plus du tout, pas vrai ? Quoi qu’il en soit, écris-moi et reçois toute la tendresse de ta sœur qui t’adore.
Frieda
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12 novembre 1925
(…) Dimanche, à sept heures, il y aura probablement une messe pour rendre grâce à Dieu de m’avoir gardée en vie. Ce sera ma première sortie ; mais ensuite, je veux aller dans la rue, ne serait-ce que pour faire quelques pas. Tu aimerais peut-être qu’on aille faire un tour ensemble dans le village, qu’est-ce que tu en dis ?
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Jeudi 26 novembre 1925
Mon Alex adoré,
Si tu savais dans quel état je suis… Figure-toi que ma mère a fait une crise et moi, j’étais avec elle ; Cristina avait décampé quand tu es arrivé, et cette bonne de malheur t’a dit que je n’étais pas là ; je suis dans une de ces rages… J’avais tellement envie de te voir, d’être un moment seule avec toi, comme nous ne l’avons pas été depuis longtemps, que je brûle de lui en dire des vertes et des pas mûres, à cette maudite bonniche ; je suis sortie sur le balcon pour t’appeler puis je l’ai envoyée te chercher, mais elle ne t’a pas trouvé, je n’avais plus que mes yeux pour pleurer…
Crois-moi, Alex, je veux que tu viennes me voir ou je vais faire un malheur ; je serre les dents, car le désespoir est pire que tout, pas vrai ? Je veux que tu viennes bavarder avec moi comme avant, oublie tout et viens me voir, pour l’amour de ta très sainte mère, et dis-moi que tu m’aimes, peu importe si c’est faux, d’accord ? (Ma plume a du mal avec toutes ces larmes.)
J’aimerais te raconter plein de choses, Alex, mais j’ai envie de pleurer, alors j’essaie de me persuader que tu vas venir… Pardonne-moi, mais ce n’est pas ma faute si tu es venu pour rien, mon Alex.
Écris-moi vite.
Ta chère Friducha
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5 décembre 1925
(...) La seule bonne nouvelle, c’est que je commence à m’habituer à souffrir…
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19 décembre 1925
Alex,
Hier, je suis allée toute seule faire un tour à Mexico ; je suis d’abord allée chez toi (je ne sais pas si c’était bien ou mal), parce que j’avais sincèrement envie de te voir. J’y étais à dix heures, mais pas toi ; je t’ai cherché jusqu’à une heure et quart dans les bibliothèques, au magasin, je suis retournée chez toi à quatre heures, mais tu n’étais toujours pas là ; je me demande bien où tu pouvais être. Ton oncle est toujours malade ou quoi ?
J’ai passé la journée avec Agustina Reyna ; à ce qu’elle dit, elle n’a pas envie de passer trop de temps avec moi parce que tu lui aurais dit qu’elle était pareille ou pire que moi, ce qu’elle considère comme le comble de la disgrâce, d’ailleurs je crois qu’elle a raison, et je me rends compte que « môssieu Olmedo » était dans le vrai lorsqu’il disait que je vaux pas un « clou », du moins pour tous ceux qui ont un jour prétendu être mes amis, car pour moi, naturellement, je vaux bien plus qu’un clou, je m’aime telle que je suis.
Elle dit que plus d’une fois tu lui as répété certaines choses que je t’avais confiées, des détails dont je ne lui avais jamais parlé, d’ailleurs il n’y avait aucune raison pour qu’elle soit au courant, et je me demande ce qu’il t’a pris de lui raconter tout ça. Le fait est que plus personne ne veut être mon ami parce que je suis tombée en disgrâce, mais ça, je n’y peux rien. Je serai donc l’amie de ceux qui m’aiment telle que je suis…
Et puis Lira a fait courir le faux bruit que je l’avais embrassé. J’arrête l’énumération, sinon je pourrais noircir des feuilles entières ; naturellement, au début, j’étais gênée, mais maintenant, tu veux que je te dise ? Je m’en fiche pas mal (c’est bien le problème).
Venant de n’importe qui, Alex, ça m’aurait fait une belle jambe, parce que tout le monde fait ça, tu comprends ? Mais jamais je n’oublierai que toi, que j’ai aimé plus que je ne m’aime, toi, tu m’as prise pour une Nahui Olin (24) ou une autre de son espèce, voire pire encore. Chaque fois que tu m’as dit que tu ne voulais plus m’adresser la parole, on aurait dit que tu te soulageais d’un poids. Et tu as osé, Alex, m’insulter en disant que j’avais fait certaines choses avec un autre le jour où je l’ai fait pour la première fois de ma vie, parce que je t’aimais comme personne
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