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Lettres

Titel: Lettres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frida Kahlo
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verbi gratia (je prends deux pesos pour illustrer les lettres (26) ).
    *
    28 septembre 1926
     
    (…) D’accord, j’ai dit des tas de « je t’aime », j’ai eu des rendez-vous et j’en ai embrassé certains, mais dans le fond je n’ai aimé que toi. (…)
    Le portrait (27) sera chez toi dans quelques jours. Excuse-moi de te le donner sans cadre. Je te supplie de ne pas l’accrocher trop haut, pour que tu puisses le regarder comme si c’était moi. (…)
    *
    29 septembre 1926
     
    (…) Pourquoi tu étudies autant   ? Quels secrets cherches-tu   ? La vie te le révélera sans crier gare. Moi, je sais déjà tout, sans lire ni écrire. Il y a peu, quelques jours à peine, j’étais une petite fille qui marchait dans un monde de couleurs, de formes dures et tangibles. Tout n’était que mystère, tout cachait quelque chose   ; déchiffrer, apprendre, c’était un jeu plaisant. Si tu savais comme il est terrible de tout savoir soudain, comme si un éclair avait illuminé la terre. À présent, j’habite une planète douloureuse, transparente, comme de glace, mais qui ne cache rien   ; c’est comme si j’avais tout appris en quelques secondes, d’un coup d’un seul. Mes amies, mes copines d’école sont devenues femmes petit à petit   ; moi, j’ai vieilli en quelques instants. Aujourd’hui tout est mou et lucide. Je sais qu’il n’y a rien derrière, sinon je le verrais (…)
    *
    10 janvier 1927
     
    Alex,
    Je veux que tu viennes une bonne fois pour toutes, tu ne peux pas savoir combien j’ai eu besoin de toi tout ce temps et combien je t’aime chaque jour davantage.
    Je vais comme d’habitude, c’est-à-dire mal… toujours la même chanson. Je ne sais plus quoi faire, ça fait plus d’un an que je suis comme ça et j’en ai ras-le-bol d’être patraque, on dirait une vieille, je me demande bien comment je serai quand j’aurai trente ans, tu devras m’envelopper dans du coton à longueur de journée, et me porter à bout de bras   : oubliée, la poche dont je t’avais parlé, car même en poussant fort je n’y entre plus.
    Parle-moi un peu de ta balade à Oaxaca, le genre de belles choses que tu as vues, j’ai besoin que tu me racontes des trucs nouveaux, parce que moi, je suis née pour faire pot de fleurs, le couloir est mon terminus… Bordel de bourdon, si tu savais   !!!!! Tu vas me dire que je n’ai qu’à faire quelque chose d’utile, et cetera, mais j’en ai même pas envie, je ne suis bonne qu’à… jouer du pipeau, si tu vois ce que je veux dire. Cette pièce où j’ai ma chambre, j’en rêve toutes les nuits et j’ai beau retourner ça dans ma tête encore et encore, je ne sais pas comment gommer son image de mon cerveau (en plus, c’est un vrai bazar, et chaque jour un peu plus). Bon   ! Que veux-tu que j’y fasse   ? À  part attendre, attendre… La seule à s’être souvenue de moi, c’est Carmen Jaimes, et encore, une seule fois, elle m’a juste écrit une lettre… personne, personne d’autre…
    Moi qui ai si souvent rêvé de prendre la mer et de voyager   ! Patiño me répondrait que c’est one ironie du destin. Ha ha ha ha   ! (Ne ris pas.) Après tout, ça fait à peine dix-sept ans que je traîne ma carcasse dans ce village. Sûrement qu’un jour je pourrai dire   : je ne fais que passer, je n’ai pas le temps de te parler. Et puis, après tout, connaître la Chine, l’Inde et d’autres pays, c’est secondaire… Avant toute chose, quand est-ce que tu viens   ? Je ne crois pas nécessaire de t’envoyer un télégramme pour t’annoncer que je suis à l’agonie, n’est-ce pas   ? Fais-moi le plaisir de te magner   : rien n’aura changé, mais tu auras droit à un baiser de la même Frida de toujours…
    Au fait, essaie de voir si dans ton entourage quelqu’un ne connaîtrait pas une bonne recette pour blondir les cheveux (n’oublie pas).
    Je suis avec toi, même à Oaxaca.
    Frieda
    *
    Dimanche 27 mars 1927
     
    Mon Alex,
    J’étais si heureuse en attendant que tu arrives samedi, j’étais sûre que tu viendrais (…) Mais à quatre heures, j’ai reçu ta lettre de Veracruz (…) Comment t’expliquer le mal qu’elle m’a fait   ? J’aimerais ne pas te tourmenter, j’aimerais être forte, avoir une foi aussi grande que la tienne, mais j’y arrive pas, je suis inconsolable, et maintenant j’ai peur   : tu me dis que tu n’en as que pour quatre mois, mais tu m’as déjà menti en ne m’annonçant pas la

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