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Lettres

Titel: Lettres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frida Kahlo
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pas   ? Je ne pourrai jamais rien faire avec cette maudite maladie, et si c’est comme ça à dix-sept ans, je veux même pas imaginer comment je serai plus tard. Je suis de plus en plus maigre et tu vas voir, quand tu seras là, tu vas tomber à la renverse tellement je suis affreuse avec this appareillage à la noix . Et ce n’est pas près de s’arranger, imagine un peu   : un mois couchée (comme quand tu m’as quittée), un autre avec différents appareils, et maintenant deux de plus couchée, dans ma gaine de plâtre, et puis à nouveau six avec le petit appareil pour pouvoir marcher et avec l’espoir grandiose de me faire opérer et d’y laisser ma peau… Il y a de quoi désespérer, non   ? Tu vas me dire que je broie du noir, que je me noie dans le chagrin, surtout maintenant que tu nages en plein optimisme, depuis que tu as vu l’Elbe et le Rhin, tout Lucas Cranach et Dürer, et surtout il Bronzino et les cathédrales. Dans ces conditions, moi aussi je pourrais être optimiste, garder mon âme de petite fille. J’étais tellement contente que tu aies vu le merveilleux portrait d’Éléonore de Tolède et toutes ces choses dont tu me parles. (…)
    Pour l’instant, je vais mal, il faudra sûrement m’opérer plus tard car, même si cet appareil en plâtre me soulage la colonne, il ne guérira pas les lésions des nerfs dans ma jambe, et seule une opération ou l’application d’un courant électrique (chaud) à plusieurs reprises (ce qui est problématique et pas très efficace, d’après le médecin) pourrait me soulager. De toute façon, je n’ai pas d’argent, bref, plus rien à faire, tu peux imaginer ma tristesse. Je suis en train de réaliser un portrait de Lira, sacrément moche. Il l’a voulu avec un fond style Gómez de la Sema (29) (…)
    Si tu reviens vite, je promets d’aller mieux de jour en jour.
    Toute à toi,
    Ne m’oublie pas…
     
    [ Elle signe d’un triangle ]
    *
    24 juin 1927
     
    (…) Je vais mal et j’irai toujours plus mal, mais j’apprends à être seule   ; un petit triomphe qui n’est pas sans atout…
    *
    15 juillet 1927
     
    (…) Je ne suis pas encore en mesure de t’affirmer que mon état s’améliore, en revanche je suis de bien meilleure humeur, j’ai tellement envie d’aller mieux pour ton retour, il ne faut surtout pas que tu sois triste pour moi. Je me laisse rarement aller au désespoir, j’évite de me transformer en « petit sanglot ». Le 9 août, cela fera deux mois que je suis dans cette position et le docteur dit qu’on va me faire une radio pour voir comment vont mes vertèbres   ; visiblement, je n’aurai à porter cet appareil en plâtre que jusqu’au 9 septembre   ; je ne sais pas ce qui m’attend après. On me fera cette radio chez moi, car je ne dois surtout pas bouger. Je suis sur une table à roulettes, pour qu’on puisse me sortir au soleil, c’est inconfortable au possible, cela fait un mois que je ne fais pas le moindre mouvement, mais je suis prête à passer six mois comme ça, si ça peut me soulager. (…)
    Si tu savais comme il est merveilleux de t’attendre avec la même sérénité que sur mon portrait. (…)
    *
    22 juillet, jour de sainte Marie Madeleine
     
    Mon Alex,
    (…) Malgré les souffrances, je crois que je commence à aller mieux   ; ce n’est peut-être pas vrai, mais je veux y croire, de toute façon ça vaut mieux, tu ne crois pas   ? Ces quatre derniers mois ont été un tourment continuel, jour après jour   ; j’ai presque honte aujourd’hui de ne pas avoir eu la foi, mais c’est que personne ne peut imaginer ce que j’ai souffert. Pauvre de ta fiancée   ! Tu aurais pu m’emporter, comme je te le disais quand j’étais petite, dans une de tes poches, comme la pépite d’or du poème de López Velarde… mais je prends trop de place à présent   ! J’ai tellement grandi (…)
    Dis-moi, mon Alex, le Louvre doit être une vraie merveille   ; je vais apprendre tellement de choses quand tu vas revenir.
    J’ai dû chercher Nice dans un atlas, parce que je ne me rappelais plus où c’était (j’ai toujours été «  sometimes bêtasse »), mais je n’oublierai plus jamais, ça non… crois-moi.
    Alex, je vais t’avouer quelque chose   : parfois je me dis que tu es en train de m’oublier, mais je me trompe, pas vrai   ? Tu ne pourrais plus retomber amoureux de la Joconde (…)
     
    «  Des nouvelles de chez moi  »
    — Maty remet les pieds dans this maison.

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