Lettres
prier pour vous.
J’ai reçu un mot très gentil de ta petite sœur.
Frieda
Lettres à Alejandro Gómez Arias
16 avril 1924
(…) Les exercices de la retraite étaient très beaux parce que le prêtre qui les a dirigés était très intelligent, presque un saint. Pendant la communion générale, on nous a donné la bénédiction papale et de nombreuses indulgences ont été distribuées, toutes celles qu’on voulait. Moi, j’ai prié pour ma sœur Maty (14) et, comme le prêtre la connaît, il a dit qu’il prierait lui aussi pour elle. J’ai également prié Dieu et la Vierge pour que tu ailles bien et que tu m’aimes toujours, et puis aussi pour ta mère et ta petite sœur (…).
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Jour des Gringos (4 juillet) 1924
(…) Je ne sais plus quoi faire pour me trouver un travail, car c’est la seule façon pour moi de te voir comme avant, tous les jours, à l’école.
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4 août 1924
(…) Je suis triste et je m’ennuie dans ce village. Il est assez pittoresque, d’accord, mais il manque un je-ne-sais-qui qui chaque jour se rend chez les Ibéro-Américains (15) (…).
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Alejandrito,
On m’a dit que tu étais très triste et préoccupé par une invention de radiotéléphonie sans fil, parce que tu as des maux de tête la nuit. Alors je t’envoie ce médicament, d’accord ?
[ Deux petits dessins : un jeune homme face à un haut-parleur et elle, debout .] Mon dernier portrait. Je donne un concert et toi, tu l’écoutes sur ton appareil. Ondes aériennes.
[ Dessin : un tramway avec son conducteur et des petites filles qui essaient de grimper dans le véhicule en marche. Dans le fond, des maisons .] Reynita et moi en passagères clandestines sur un Peralvillo. C’est une magnifique photo, comme tu les aimes. Voilà comment on voyait les maisons. Des petites filles qui vont tomber.
[ Dessin : des tas de livres, une petite souris et un personnage face à une étagère .] Voilà comment je me vois quand tu nageras dans le bonheur. Ce n’est pas du nougat, ce sont des livres. Petite souris nichée dans un livre d’Anatole France. Toi en train de lire don Ramón Barbe de Bouc (16) .
Ton amie,
Frideita
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Lundi 18 août 1924, huit heures du soir
Alex,
Cet après-midi, quand tu as téléphoné, je n’avais pas pu être chez le laitier à trois heures et demie pile ; on est bien venu me chercher, mais quand je suis arrivée le téléphone était raccroché et je n’ai pas pu te parler. Pardonne-moi, Alex, mais ce n’était pas ma faute.
En fait, j’ai vraiment passé un sale après-midi : en sortant de chez le dentiste, je suis allée m’acheter une sucette chez « La Carmela », tu te souviens, là où on en a acheté la dernière fois, et au moment où j’étais en train de payer, Rouaix est entré, il m’a poussée et j’ai cassé une vitre du comptoir. Du coup, on est tous les deux embarqués dans cette histoire et on doit payer 2,50 chacun. Sauf qu’il part le 1 er du mois aux USA. Alors il m’a dit que j’avais qu’à me débrouiller toute seule, que l’addition était pour moi. Lui, il va se la couler douce et moi, je vais crouler sous les dettes, qu’est-ce que tu dis de ça ? Dis donc, dans dix jours il va y avoir un bal chez ta copine Chelo, un bal masqué, donc il va falloir que je me trouve un costume et ce sera le prétexte rêvé pour aller faire un tour avec le propriétaire de Panchito Pimentel (17) , n’est-ce pas ?
Si je ne peux pas te voir ces jours-ci, viens faire un tour dans le coin ; mercredi, téléphone-moi dans l’après-midi, à trois heures et demie, je serai là sans faute, d’accord ? Mais d’abord, réponds à ma lettre le plus vite possible, frangin, sinon je vais finir par croire que tu t’es fait avoir par la jeune femme qui t’a demandé si la demoiselle du train s’était fait zigouiller. Quelle horreur. Tout ce temps sans se parler et ô surprise !
Il est huit heures du soir. Je vais lire Salammbô jusqu’à dix heures et demie, ensuite la Bible en trois tomes, et pour finir je réfléchirai à un tas de problèmes scientifiques avant de me mettre au lit, pour dormir jusqu’à sept heures et demie du matin, qu’est-ce que tu en dis ? À demain, je nous souhaite de passer une bonne nuit et n’oublions pas que les grands amis doivent s’aimer des masses, des masses, des masses, des masses, des masses, des masses, des masses, des masses… avec un m comme monde ou comme
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