L'Héritage des Templiers

reliés par un réseau routier très bien entretenu. La puissance de l’ordre avait été soigneusement protégée et quand il avait échoué à s’établir en Terre sainte et fini par rendre Jérusalem aux musulmans, il s’était fixé pour but de réussir en Languedoc. Le projet était bien lancé quand Philippe le Bel avait porté le coup de grâce. Bizarrement, le nom de Rennes-le-Château n’apparaissait nulle part dans les chroniques. Le village n’avait joué aucun rôle dans l’histoire templière. Les vestiges des fortifications édifiées par les Templiers étaient visibles ailleurs dans la vallée de l’Aude, mais rien à Rhedae, ancien nom de ce promontoire rocheux. Aujourd’hui, en revanche, le minuscule village ressemblait à une véritable fourmilière, et tout cela, on le devait à l’ambition d’un curé et à la curiosité d’un professeur américain.
    « Nous approchons de leur véhicule », annonça le chauffeur.
    De Rochefort lui avait déjà recommandé la prudence. L’un des trois autres frères qui l’accompagnaient à Rennes-le-Château avait été blessé à la cuisse par Geoffrey. Deux morts et trois blessés. Il avait fait savoir qu’il tiendrait conseil avec ses officiers dès son retour à l’abbaye ; voilà qui devrait étouffer dans l’œuf les mécontentements éventuels. Mais d’abord, il devait retrouver ses proies.
    « Droit devant, à cinquante mètres. »
    Il jeta un coup d’œil par la vitre et se demanda pourquoi Malone et ses comparses avaient choisi de se réfugier ici. Drôle de choix.
    Le chauffeur se gara et les quatre hommes descendirent.
    Ils se trouvaient au beau milieu d’un parking.
    « Prenez le détecteur. »
    Ils se mirent en route et, à vingt mètres de leur voiture, l’homme qui tenait le détecteur s’arrêta en s’exclamant : « Là !
    — Ce n’est pas la voiture avec laquelle ils ont quitté Rennes-le-Château.
    — Le signal que je reçois est fort. »
    D’un signe, de Rochefort ordonna à l’un des moines de chercher sous la voiture où il découvrit le transpondeur magnétique.
    Perplexe, il leva les yeux sur les remparts de Carcassonne qui se dressaient vers le ciel à dix mètres de là. La zone couverte d’herbe où il se tenait faisait autrefois partie des douves du château. Elle servait aujourd’hui de parking aux milliers de touristes qui, chaque jour, venaient visiter l’une des dernières citadelles du Moyen Âge. Les remparts de pierre hâlés par des siècles de soleil s’élevaient déjà à cet endroit du temps où les templiers parcouraient la région. Ils avaient été témoins de la croisade contre les albigeois et des nombreuses guerres qui s’étaient succédé depuis. Et cette citadelle, véritable symbole de force et de résistance, symbole aussi d’intelligence, n’avait jamais été prise.
    D’après la légende locale, les musulmans prirent brièvement le contrôle de la ville au VIII e siècle. Les Francs arrivèrent bientôt du Nord pour reprendre la citadelle et, fidèles à eux-mêmes, se préparèrent à un long siège. Pendant une sortie, le roi maure fut tué et il revint donc à sa veuve de défendre la citadelle. Maligne, elle créa l’illusion d’un grand nombre de troupes en faisant installer des mannequins bourrés de paille sur les remparts. L’eau et les vivres vinrent finalement à manquer dans les deux camps. Dame Carcas ordonna alors que l’on donne à la dernière truie la dernière mesure de blé avant de la faire jeter par-dessus les remparts. Lorsque l’animal s’écrasa au sol, son ventre plein éclata. Les Francs furent abasourdis : après un si long siège, les infidèles possédaient encore suffisamment de vivres pour nourrir leurs pourceaux. Ils levèrent le siège.
    Un mythe, sans doute, mais tout de même un bel exemple d’ingéniosité.
    Et Cotton Malone venait lui aussi de faire preuve d’ingéniosité en fixant le système de surveillance sur un autre véhicule.
    « Qu’y a-t-il ? » Claridon parut inquiet.
    « Nous avons été abusés.
    — Ce n’est pas leur voiture ?
    — Non, monsieur », fit de Rochefort en regagnant la sienne. Où avaient-ils bien pu aller ? Une idée lui traversa l’esprit. Il s’arrêta et demanda : « Mark Nelle connaît-il Cassiopée Vitt ?
    — Oui, répondit Claridon. Son père et lui en ont déjà parlé. »
    Était-il possible qu’ils se soient rendus chez elle ? Vitt était intervenue à trois