L'Héritage des Templiers

moto. L’inconnu s’engouffra à vive allure dans une ruelle latérale, évitant la grand-rue qui débouchait sur le parking.
    Malone décida d’utiliser le plan compact du village à son avantage et se précipita dans une allée, sur sa gauche, avant de tourner dans la rue principale. Une petite pente lui fit gagner du temps, et il entendit la moto approcher sur sa droite. C’était l’occasion ou jamais : il leva son arme et ralentit sa course.
    Dès que la moto surgit de l’allée, il tira deux coups de feu.
    L’un d’eux rata sa cible, mais l’autre heurta le cadre dans une gerbe d’étincelles avant de ricocher par terre.
    La moto s’éloigna dans un vrombissement de moteur.
    Des lumières s’allumèrent. On ne devait pas entendre beaucoup de coups de feu par ici. Malone glissa l’arme sous sa veste, se cacha au fond d’une ruelle et regagna la maison de Lars Nelle. Des voix s’élevèrent derrière lui. Les villageois sortaient de chez eux pour voir ce qui se passait. Dans un moment, il serait à l’abri. Il doutait que les deux hommes fussent encore dans le coin, et, dans le cas contraire, qu’ils lui chercheraient des noises.
    Mais une idée l’obnubilait.
    Un détail qu’il avait cru remarquer lorsque la silhouette avait sauté de la terrasse avant de s’éloigner en courant. Quelque chose dans ses gestes.
    Difficile d’être catégorique, mais il en avait vu assez.
    Son agresseur était une femme.

24
     
    Abbaye des Fontaines
    22 h 00
     
    Le sénéchal rejoignit Geoffrey, disparu à la fin de l’élection, dans l’une des petites chapelles de l’aile nord, derrière la bibliothèque, où le jeune homme s’était retiré ; c’était l’un des nombreux endroits calmes qu’offrait l’abbaye.
    Il entra dans la salle éclairée par la seule lueur des cierges et trouva Geoffrey étendu par terre. Les frères se prosternaient souvent devant l’autel de Dieu. Au moment de l’initiation, ce geste témoignait de l’humilité, de l’insignifiance de la nouvelle recrue face à la puissance divine. Pratiquer ce rituel de manière régulière permettait aux moines de ne pas l’oublier.
    « Nous devons parler », murmura le sénéchal.
    Son jeune ami resta immobile un moment avant de se signer et de se relever.
    « Dis-moi exactement ce dont il retourne. » Il n’était pas d’humeur à se contenter de réponses évasives et, grâce à Dieu, son jeune assistant avait l’air plus calme que tout à l’heure au panthéon.
    « Le maître voulait être sûr que ces deux paquets seraient bien expédiés.
    — T’a-t-il dit pourquoi ?
    — Pourquoi l’aurait-il fait ? C’était le maître. Je ne suis qu’un simple moine.
    — Il te faisait suffisamment confiance pour te demander ton aide, apparemment.
    — Il m’a dit que vous auriez du mal à l’accepter.
    — Je ne suis pas mesquin à ce point. » Le sénéchal sentait que le jeune homme en savait plus long qu’il ne le disait. « Raconte.
    — Je ne peux pas.
    — Pourquoi pas ?
    — Le maître m’a demandé de répondre aux questions concernant l’envoi des paquets. Mais j’ai pour instruction de ne rien dire de plus… jusqu’à ce que d’autres événements se produisent.
    — Geoffrey, que peut-il arriver de plus ? De Rochefort est au pouvoir. Nous sommes pratiquement seuls, toi et moi. Les frères ont pris son parti. À quel événement le maître faisait-il allusion ?
    — Je ne peux rien dire.
    — De Rochefort ne peut réussir sans le legs des Templiers. Tu as entendu les réactions pendant le chapitre ? Les frères cesseront de le soutenir dès lors qu’il n’accomplira pas la tâche qu’il s’est fixée. C’est de ça dont il s’agit ? Le maître en savait-il plus long qu’il ne me l’avait laissé croire ? »
    Geoffrey se ferma et le sénéchal vit alors chez son assistant une maturité qu’il n’avait jamais remarquée auparavant. « J’ai honte d’avouer que le maître m’avait annoncé votre défaite.
    — Que t’a-t-il dit d’autre ?
    — Rien qu’il me soit permis de révéler pour l’instant. »
    Ces réponses évasives agaçaient le sénéchal. « Notre maître était un esprit brillant, souligna-t-il. Comme tu viens de le dire, il avait prévu le cours des événements. Il avait apparemment vu assez loin pour te confier cet oracle. Dis-moi ce que je dois faire, supplia-t-il.
    — Il m’a dit de répondre à votre supplique par les paroles de Jésus :