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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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couleurs bariolées, et des hommes à moitié nus, assis par terre ou debout par groupes, devisant en regardant jouer les enfants. C’est le célèbre camp des tsiganes. Ils sont environ quatre mille cinq cents. Ils ne travaillent pas mais, dans les baraques voisines emplies de juifs, ils assument le rôle de surveillants de camp et de baraque avec une cruauté inimaginable pour le cerveau d’un homme normal.
    — Le camp des tsiganes offre une curiosité : la baraque d’expérimentation qui s’y trouve. Le chef du laboratoire de recherches est le docteur Epstein, professeur à la faculté de Prague et pédiatre d’une renommée mondiale. Il est prisonnier du KZ depuis quatre ans : son assistant est le docteur Bendel, de la faculté de médecine de Paris.
    — Les expériences qui y sont faites se divisent en trois groupes : le premier est la recherche sur la gémellité, qui a pris un essor mondial depuis la naissance des quintuplées du Canada ; le deuxième, la recherche des causes biologiques et pathologiques du nanisme et du gigantisme ; le troisième, la recherche des causes et la thérapeutique du « noma facies », communément appelé gangrène sèche du visage.
    — Mengele (54) avait les poches pleines de bonbons qu’il lançait un à un aux enfants, par jeu. Il n’y en avait pas assez pour tous, mais une fois ou l’autre, chaque enfant était sûr d’avoir son tour. Dès que le médecin faisait son apparition, les enfants rayonnaient. Un bonbon et ils oubliaient leurs souffrances.
    — Nous essayions (55) systématiquement d’amollir les S.S. Nous leur donnions des montres, des bagues, et de l’argent. Quand ils les avaient pris, ils n’étaient plus aussi dangereux. Ils finissaient par tomber à zéro.
    — Le soir (56) du 24 décembre 1943, on distribua comme d’habitude la nourriture après l’appel. On éteignit les lumières en laissant les veilleuses et les enfants commençaient à s’endormir. Soudain, alors que le Block était plongé dans un silence quotidien, une lumière intense se fit à une extrémité, vers l’entrée principale, et sur une estrade apparut une crèche radieuse entourée d’anges, d’anges avec des ailes et des auréoles et en même temps on entendit un chant très doux et très lent : c’était le Noël allemand : « Stille Nacht, heilige Nacht. » Le chant était d’une pureté et d’une harmonie parfaites. Commencé en sourdine, il monta graduellement et gagna le milieu du Block. Les enfants réveillés par la musique céleste, joignirent leurs voix et bientôt toute la baraque en fut emplie. Nous étions tous profondément émus. Charmé par le spectacle et le chant, je m’approchai de l’estrade et reconnus plusieurs « anges ». C’étaient des infirmières des Blocks voisins. Les gens « bien informés » assuraient que ces infirmières étaient des prostituées emprisonnées pour avoir transmis la blennorragie à des militaires allemands.
    — Pour les yeux éblouis des enfants, pour tous ceux qui les voyaient et les entendaient, c’étaient des anges de Noël. Pour nous, qui avons partagé avec les enfants tsiganes la merveilleuse féerie de cette nuit mémorable, notre gratitude vivra aussi longtemps que nous-mêmes. Pour nous, ces généreuses prostituées-anges donnaient à chacun selon ses mérites ; elles semaient les gonocoques parmi ceux qui semaient la mort, et semaient la joie parmi les innocents enfants tsiganes.
    *
*   *
    L’aveu.
    — Le camp (57) tsigane peut être considéré comme la préfiguration de l’humanité sous la domination S.S. La vie n’est pas un droit mais une concession accordée par l’État S.S. et cette concession peut être retirée à tout moment. À l’origine, le peuple tsigane n’était pas considéré par l’Allemagne comme une ethnie à exterminer. Les tsiganes faisaient le service militaire, étaient membres de la N.S.D.A.P. et ont combattu sur le front occidental notamment. Mais pour des raisons que l’Allemagne n’a pas besoin de dire car, étant puissante, elle n’a pas besoin de justification, elle décida un jour leur extermination. En cas de victoire, aurait-elle eu besoin de justifications pour exterminer les Tchèques, les Polonais, etc. Les tsiganes se sentaient en sécurité et nous les croyions à l’abri des chambres à gaz et brusquement, la situation a changé. La même chose pouvait se produire avec n’importe quel autre peuple. À cet égard, le fin

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