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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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picotin ?
    – Non, quelques plats réchauffés de ma façon. J’étais sur le sujet depuis belle lurette et je tiens sous le coude des esquisses de mémoires qui répondent à ses desseins. Je vais relier le tout dans un portefeuille et l’adorner à tout va d’une lettre de cour.
    Il s’assit au bureau, prit une feuille de papier, trempa sa plume et, lisant à haute voix ce qu’il écrivait, se mit à noircir son pensum.
    Monseigneur,
    Désireux au plus haut point de satisfaire aux demandes que vous avez formulées, je m’empresse de vous adresser le résultat de mes réflexions concernant l’amélioration des prisons et maisons de force du royaume accompagnées des états qui, le cas échéant, justifieraient en masse les augmentations de dépenses indispensables.
    – Là, tu le crucifies !
    – Si tu veux qu’une réforme aboutisse dans des prisons qui datent des rois Valois, il te faut des crédits. Et c’est la manne la moins disponible par les temps qui courent !
    – Je poursuis : À celles-ci je joins l’étude sur la suppression de la question préparatoire sur laquelle vous m’avait fait l’honneur de me consulter …
    –  Consulter  ? N’est-ce pas un peu provocant ?
    – À dessein, mon cher Pierre, à dessein ! Écoute la suite : Il me semble cependant difficile dans l’état où sont les affaires du royaume engagé dans la guerre, de fournir des dépenses nouvelles sans le secours de moyens extraordinaires qui mobiliseraient les fonds
utiles. Pour rendre plus intelligibles les nécessités de cette réforme, j’ai pris la liberté de marquer en détail les défauts que j’ai pu observer depuis longtemps dans ces entreprises afin de montrer le bien qu’on dispenserait à l’État en remédiant à cet état de choses. L’expérience qui est la vôtre dans les affaires de finances ne pourra que vous convaincre de la sagesse de mes propositions.
    Ainsi je crois devoir répondre en détail à tout ce que vous m’avez demandé, et j’ose espérer que vous serez aussi satisfait des raisons que j’ai le privilège de vous soumettre, que convaincu du profond respect avec lequel j’ai l’honneur d’être, monseigneur, votre très obéissant et fidèle serviteur.
    Nicolas Le Floch, marquis de Ranreuil.
    – Hum ! dit Bourdeau ironique, voilà quelques quartiers de noblesse mis à bon escient dans la balance pour écraser le bourgeois ! Et te voilà parlant carats à un orfèvre ! Impertinent et présomptueux ! J’aime foutrement le privilège  ! On sent que tu as de la ressource et des soutiens en cour.
    – Le fait est que la politique de Necker, à y bien réfléchir, ne va pas dans le bon sens. Il y a impossibilité manifeste qu’un État puisse subsister si tous les sujets qui le composent ne l’assistent et ne le soutiennent par une contribution de leurs revenus capable de satisfaire à ses besoins. Feu monsieur de Saint-Florentin soulignait souvent que le royaume paierait à terme cruellement l’échec de la réforme de Machault d’Arnouville. Son projet de vingtième visait à assujettir chacun sans aucune exception, clergé et noblesse compris, à une contribution universelle. J’ajouterai que l’esprit outré d’économie du Genevois, propre à sa patrie, prend le chemin de tout
rapetisser et diminue les moyens de grandeur et de force nécessaires au royaume.
    – Il faudra que tu résolves un jour tes contradictions, tu excipes de tes quartiers et une minute après tu tiens de révolutionnaires propos d’égalité en philosophe éclairé !
    – Il faut t’y faire, je suis ainsi. Juge de toutes choses, imbécile ver de terre, dépositaire du vrai, cloaque d’incertitude et d’erreur, gloire et rebut de l’univers .
    – Quelle mouche te pique ?
    – Je cite seulement M. Pascal.
    – Un janséniste !
    – La raison ne s’attache pas aux étiquettes. Et d’ailleurs il est temps d’agir. Nous sommes évidemment dans l’attente de nouvelles de Champagne. Père Marie ?
    L’huissier venait d’apparaître, un pli à la main.
    – Nicolas, un freluquet de grison, doré sur tranche, vient d’apporter ceci pour toi.
    Nicolas brisa le sceau et déplia la lettre. Il ne put s’empêcher de pousser une exclamation de surprise.
    – M. de Besenval m’informe qu’un inconnu lui a proposé d’acheter un vase céladon qui lui est apparu sans conteste comme proche de l’exemplaire entrevu lors du souper à l’hôtel de Ravillois. Il

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