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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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l’existence de tentatives parallèles destinées à s’emparer de ce brûlant document.
    – Notre affaire est d’autant plus grave qu’une autre couve, susceptible de donner de l’éclat et du scandale dans les cours étrangères en faisant tort à la gloire du roi. Le prince de Montbarrey…
    – Le ministre de la Guerre, parent de M. de Maurepas.
    – Justement ! Depuis longtemps il s’abandonne à une courtisane de haut vol, c’est le mot, nommée Renard.
    – Elle aussi 48  !
    – Apparemment le nom entraîne la chose. Or le canal des plaisirs du ministre a été souvent celui des grâces pour les militaires. Souhaitiez-vous être compris dans une promotion de cordons rouges ? Cinquante mille livres de lettres de change à la belle. Il suffisait d’attendre l’effet efficace de son crédit. Bientôt le crédule constate que son investissement a été nul et que son nom ne figure pas sur la liste des enrubannés et pour ne pas tout perdre, il redemande ses épices.
    – Et je suppose qu’elle refuse ?
    – Oui ! Mlle Renard aime aussi peu à rendre qu’elle prend avec plaisir. Elle prétend que ce salaire est celui de ses peines, et non le prix des faveurs du roi, qu’elle a fait tout ce qui dépendait d’elle ; que l’argent est bien gagné, quoique les sollicitations aient été infructueuses, qu’enfin l’officier général doit prendre patience, qu’elle espère réussir l’année
prochaine ou à la Trinité. Ce n’était pas le compte du candidat, qui, voyant les prières et les menaces également inutiles, trouva le moyen de faire parvenir ses plaintes auprès du trône. Le roi furieux montre le mémoire à M. de Maurepas, veut renvoyer le ministre pour avoir souffert de pareilles manœuvres, mettre la demoiselle à l’hôpital pour la punir de son escroquerie, et casser l’officier général pour avoir employé de tels moyens.
    – Je n’ai pas entendu dire qu’on en soit venu à de telles extrémités.
    – Non, pas cette fois ! Le vieux mentor s’est interposé, mais les mêmes effets ayant les mêmes causes, tout finira par éclater un jour. Et en période de succès incertains à la guerre, il faut toujours trouver des boucs émissaires.
    Le récit des malheurs du prince de Montbarrey paraissait avoir quelque peu rasséréné Sartine qui fit à Nicolas compliment de la nomination de Louis. Puis il sembla hésiter à ajouter quelque chose pour enfin s’y décider.
    – Nicolas, écoutez mon conseil. Nous détenons l’un et l’autre des secrets et celui qui entoure…
    Il regarda, méfiant, autour d’eux.
    – … la naissance de votre fils doit demeurer environné des ténèbres les plus impénétrables. La faveur en ce pays-ci appelle la jalousie et la calomnie. Donnez-lui le nom d’un de vos fiefs bretons. Cela troublera les chiens courants et Ranreuil il redeviendra à votre mort. Y avez-vous songé ?
    – Certes, l’idée m’a effleuré et je voulais lui en parler. Votre conseil m’incite à le faire. Il sera désormais présenté sous la qualité de vicomte de Tréhiguier.
    – Voilà un beau nom, et breton de surcroît. Il l’honorera de gloire. À nous revoir, Nicolas, sous de plus favorables auspices.
    Il appela ses gens et gagna sa chaise en boitant. Nicolas repartit à pied au milieu des nouvelles plantations du parc qui commençaient à s’épanouir. L’énormité de ce que lui avait confié Sartine s’imposait à lui. Pour une part, le sort du ministre serait scellé par la réussite ou l’échec de son enquête. Le fait que le document existait en unique exemplaire simplifiait et compliquait la chose. Celui-ci une fois retrouvé et détruit, rien ne subsisterait de la preuve et Sartine serait sauvé. Enfin, à condition qu’il parvînt à solder les dépenses extraordinaires qui dépassaient de beaucoup le budget imparti à la Marine, et surmonte la défaveur dans laquelle le tenait désormais la reine. Pour ce puissant dont il savait mieux que d’autres la force et les faiblesses, il éprouvait une triste compassion. Lui revinrent les confidences sur le ministre de la Guerre. Ces infamies le blessaient au plus vif. Alors que tant de marins et de soldats mouraient aux quatre coins du monde pour l’honneur de la couronne, la corruption gagnait, marée écœurante, jusqu’aux marches du trône. Et pourtant, depuis vingt ans, son âme bardée d’indifférence en avait-elle traversé, des secrets honteux !
    Il ne s’était

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