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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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d’admiration répondit un strident éclat de rire qui glaça de terreur cette multitude charmée par la grâce de la « guérisseuse du roi ». Tous se tournèrent vers la vaste estrade surélevée d’une marche et couverte de tapis, sur laquelle Isabeau de Bavière avait pris place.
    On la vit debout, une main appuyée à son fauteuil, drapée d’une robe de lin d’une éclatante blancheur, la gorge et les bras nus, rutilante de pierreries qui jetaient leurs feux à chacun de ses mouvements, admirable statue taillée en plein marbre et si étrangement belle, d’une beauté tragique, d’un si puissant contraste de beauté avec celle d’Odette, avec des flammes à ses yeux d’où se dégageaient de magnétiques effluves, oui, si belle et si menaçante que, cette fois, l’admiration prit sa forme la plus poignante, qu’un silence terrible tomba sur la salle, et que d’un même mouvement, on vit toutes les têtes s’incliner très bas…
    Un instant, sur cette foule à demi prosternée qui semblait l’adorer, l’idole promena ses regards étincelants et superbes qui disaient :
    – C’est moi qu’on doit admirer et aimer ! Est-ce que je ne suis pas la plus belle et la plus puissante ! Malheur à qui me trahit ! Malheur à qui se détourne de la reine, pour porter ses hommages à l’intrigante !…
    Puis, satisfaite sans doute d’avoir d’un geste et d’un regard dompté son peuple, elle reprit sa place à son fauteuil, distribuant les sourires prometteurs, enfiévrant tous ces hommes qui évoluaient autour d’elle.
    Et, au moment où s’étant incliné devant la souveraine triomphatrice, le peuple de l’Hôtel Saint-Pol redressait la tête, il frissonna tout entier en voyant que, pour la première fois, le duc de Bourgogne et de duc de Berry se trouvaient réunis, échangeant d’amicales paroles aux côtés d’Isabeau de Bavière !…
    Louis d’Orléans, frère du roi, vit ce redoutable conciliabule…
    Et il sentit qu’il avait froid dans les veines, et sur sa nuque passa un léger souffle glacé…
    Peut-être l’avant-coureur de la mort !
    Telle fut cette soirée de la présentation où, chose qui n’était pas arrivée depuis des années, la Cour se tint au palais du roi, et à la suite de laquelle Odette de Champdivers, officiellement, devint l’un des personnages du drame historique qui se jouait sur la vaste scène de l’Hôtel Saint-Pol.
    Cet Hôtel Saint-Pol, cette ville qui avait ses rues, ses carrefours, ses places, elle la parcourut, l’étudia, la connut bientôt dans ses tours et détours. Escortée de Charles VI et d’Honoré de Champdivers, elle prit plaisir à admirer la belle ordonnance des palais disséminés dans les jardins d’où ils émergeaient comme des îlots de pierre d’un océan de verdure.
    Seulement, ils évitaient les jardins et les palais de la reine.
    Et sur ce point, Odette ne faisait aucune observation, car elle se sentait haïe d’Isabeau.
    Mais ils évitaient aussi le terrain vague au fond duquel se dressait la tour Huidelonne ; et, sur ce point, plus le roi cherchait à la détourner d’y aller, plus la curiosité d’Odette s’éveillait.
    – Sire, disait-elle, qu’y a-t-il dans cette tour semblable à un fantôme ?
    – Des prisonniers, répondait le roi.
    – Des prisonniers ! frissonnait Odette. Et qu’ont-ils fait ?
    – « Je ne sais pas », répondit Charles d’une voix sombre.
    C’était un mot terrible. Charles VI ne se doutait pas qu’il faisait là le procès de la monarchie. Odette n’en pensait pas si long. Mais la Huidelonne hanta ses rêves.
    Un soir de lune, Odette prit une grande résolution : elle se décida à aborder la Huidelonne, à l’interroger, à lui demander : « Que me veux-tu, fantôme de pierre ?… » Honoré de Champdivers revêtit donc sa casaque de cuir, passa un bon poignard à sa ceinture, et tous deux, par les vagues sentiers que le pas des geôliers avaient tracés à travers les mauvaises herbes, s’en furent jusqu’au pied de la tour Huidelonne et s’arrêtèrent devant la porte de fer.
    Odette tremblait. Tous deux écoutaient le silence…
    Et soudain, dans, ce silence qui enveloppait la tour, une voix monta ce fut une plainte lointaine qui venait des entrailles du sol ; cela dura quelques secondes, puis tout se tut encore.
    – Oh ! murmura Odette, c’est le sanglot d’un mort qui cherche à soulever la pierre tombale…
    Champdivers, effrayé de la voir

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