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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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mais postule toujours son retour à Beaulieu. En septembre 1899, il prétexte la mort de sa mère, la maladie de son père, 67 ans, et les 85 ans de sa grand-mère pour réitérer sa requête. Il est finalement nommé à Queyssac où le couple va rester sept ans.
    Sa femme et lui ne se plaisent guère dans cette nouvelle affectation car « Queyssac est déshéritée et arriérée », qu'elle n'a pas l'eau courante et que les communications y sont difficiles. Invoquant la « néphrite aiguë, avec complications cardiaques, de son père », il se démène pour quitter Queyssac. En 1908, il demande n'importe quel poste à Brive afin d'inscrire leur jeune fils Abel – père du président de la République –, qui a maintenant 10 ans, dans une école secondaire. Leur enfant étant d'« un tempérament délicat », les Chirac n'ont jusque-là pas voulu s'en séparer et l'ont gardé près d'eux à Queyssac.
    En décembre 1908, Honorine Chirac est nommée dans une école maternelle de Brive et Louis, adjoint-titulaire à l'école publique de garçons de la rue Firmin-Marbot, également à Brive. Les Chirac sont manifestement heureux de cette affectation après plus de vingt ans de bons et loyaux services dans des communes rurales. « Hussard noir de la République », Louis va y donner sa pleine mesure, inculquer ses valeurs de solidarité et de fraternité à des élèves dont il veut faire des citoyens responsables, dans cette République dont il est un fervent militant. En juin 1912, l'inspecteur qui vérifie ses aptitudes est impressionné : « On chante chez M. Chirac en entrant en classe et en changeant d'exercice. Cela jette une note gaie au milieu de la sévérité de la classe, et délasse… Cela, malgré une classe très nombreuse, très pénible… »
    Alors que son fils Abel vient de partir pour la guerre, Louis est nommé directeur de son école à titre provisoire. En 1919, il passe directeur titulaire. Ses rapports d'inspection sont élogieux. Celui de 1923 le qualifie de « très bon directeur » après que l'inspecteur s'est dit impressionné par sa leçon de morale sur la solidarité et l'entraide. Chaque inspection se conclut désormais par une lettre de félicitations. La dernière a lieu le 22 avril 1929. On y apprend que Louis Chirac fait apprendre par cœur des poèmes des Châtiments , notamment « Les Soldats de l'an II », mais aussi un portrait de La Bruyère et un poème de Clément Marot. Il vient de faire étudier la biographie de Voltaire, le mouvement des idées au xviii e  siècle… En histoire, il a fait travailler ses élèves sur la guerre d'indépendance américaine. Le rapport se termine par : « Il donne à tous l'exemple du travail et de la probité professionnelle, et c'est évidemment ce qui lui vaut une autorité incontestée et un prestige bien mérité. Aussi son école se place-t-elle parmi les meilleures. Très bien. »
    Apprécié des parents d'élèves, Louis Chirac va rapidement devenir une personnalité briviste. Éducateur du peuple, c'est à partir de l'importance qu'il attache à la laïcité et à la défense de l'école publique que ce promoteur acharné des principes républicains va étendre son champ d'action. Franc-maçon, il devient même Vénérable de la loge La Fidélité à l'orient de Brive-la-Gaillarde. Cet engagement au service du progrès de l'humanité va trouver de nombreuses applications concrètes sur les terrains politique, philosophique et social. Membre très actif du bureau du Parti radical-socialiste de l'arrondissement de Brive, il s'engage dans tous les combats de l'entre-deux-guerres. Il adresse des lettres d'insultes à Charles de Lasteyrie, député de Corrèze (1919-1924), ministre des Finances dans le cabinet Poincaré (1922-1924). Ironie de l'histoire : Jacques Chirac, son petit-fils, épousera Bernadette, la propre nièce de Lasteyrie !
    La grande spécialité du directeur d'école sera surtout de « bouffer du curé » avec une franche allégresse, surtout dans la période du Cartel des gauches qui relance la guerre entre catholiques et laïcs comme au temps du petit père Combes. L'évêque de Tulle, monseigneur Castel, se montre particulièrement virulent envers les francs-maçons. Dans le premier numéro de l' Union catholique de Corrèze , daté d'octobre 1925, il fustige ces « personnages [qui] travaillent dans le mystère […] et se sont attaqués à tout ce qui faisait la force et la beauté de la

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