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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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éminent. Il me dit qu'il allait se renseigner.
    – C'est parce que vous aviez signé l'appel de Stockholm ?
    – Chardonnet était un ami du général Kœnig, ministre de la Défense. Il lui a exposé mon cas. Kœnig m'a convoqué et m'a demandé ce que j'avais fait. Je le lui ai expliqué, ajoutant que je n'avais tué personne. “Je vais te régler ton affaire”, m'a dit Kœnig en présence de Chardonnet.
    « Deux heures après, Saumur recevait des instructions pour restituer son rang et ses prérogatives à l'EOR Chirac. Je suis rentré à Saumur et, de fait, l'affaire était réglée. »
    Son dossier militaire corrige quelque peu l'histoire telle que l'a racontée depuis toujours le président : il n'a pas terminé major de sa promotion de l'école d'EOR de Saumur, mais 8 e sur 118. Il n'est pas indifférent de souligner qu'à chaque fois que je lui ai signalé une certaine distorsion entre sa version et la réalité, il l'a admise avec grande décontraction, assortie d'un commentaire sur la faiblesse de sa mémoire. S'il n'est pas sorti premier de Saumur, ses appréciations sont néanmoins fort bonnes. Il est catalogué comme un « esprit ouvert, intelligent, instruit, bien élevé, d'une présentation et d'une correction parfaites. Voit juste sur le terrain, réagit vite. Commande avec précision. A beaucoup travaillé et a facilement assimilé le cours technique. Semble devoir être un bon chef de peloton ».
    Promu sous-lieutenant au début novembre 1955, il est affecté en Allemagne, à Lachen, comme « popotier ». Ses fonctions comprenaient notamment l'annonce, dans le mess, du menu de chaque repas, laquelle se terminait par la formule rituelle : « À nos femmes, à nos chevaux et à ceux qui les montent ! Par saint Georges, vive la Cavalerie 9  ! »
    Alors que son escadron doit partir pour l'Algérie, il est affecté à Berlin pour y servir d'interprète anglais-français-russe. Il est effondré. Avec un incroyable culot, il va bousculer la machine bureaucratique des armées et même risquer d'être porté déserteur : mais il tient à aller en Algérie. Il estime simplement que, pour lui qui s'apprête à servir la France, sa place est là-bas, non dans les bureaux. Il y a encore de l'anticonformisme dans cette décision. Toujours est-il qu'il est le seul de sa promotion à choisir une telle voie.
    Jacques Chirac explique a posteriori les raisons d'un tel choix : « J'aurais très bien pu me dispenser d'aller servir en Algérie, du fait que j'étais à l'ENA. Je suis parti comme volontaire. Je ne me suis même pas posé la question de la légitimité de la guerre d'Algérie. Enfin si, je me la suis posée, mais je n'ai pas éprouvé pour autant la moindre hésitation : je suis parti dans les djebels… Puisque la France avait décidé – à tort ou à raison – que l'Algérie devait rester française, eh bien, j'apporterais ma contribution : c'était un choix fondamental… » Faire son service dans un ministère en pleine guerre d'Algérie, comme on le lui proposait, aurait été « le comble de l'abomination ».
    Cinq jours après que l'Assemblée nationale accorde les « pouvoirs spéciaux » à Guy Mollet pour conserver l'Algérie à la France, et avant de franchir la Méditerranée, Jacques Chirac se marie en coup de vent, à Paris, en la basilique Sainte-Clotilde…
    Il intègre le 6 e régiment des chasseurs d'Afrique le 1 er  avril 1956 et arrive à Oran le 13. Ses quatorze mois passés en Algérie constituent assurément un des éléments constitutifs de sa personnalité. Il a aimé commander, évoluer au milieu de ses hommes, partager leurs peurs, affronter l'ennemi, protéger la population autochtone… Il a été chef comme jamais.
    Vingt-deux ans plus tard, il déclarera à Paris Match  : « Pour moi, et contrairement à ce que l'on a pu penser, ce fut un moment de très grande liberté, probablement un des seuls moments où j'ai eu le sentiment d'avoir une influence réelle sur le cours des choses […]. Parce qu'il y allait de la vie d'hommes que j'avais sous mes ordres […], c'est le seul moment où j'ai eu vraiment le sentiment de commander. »
    Précisons néanmoins que Jacques Chirac a prononcé ces mots longtemps avant d'accéder à la présidence. Aujourd'hui, chef des armées, il accepte non sans plaisir de reparler de cette période et de son engagement Algérie Française.
    « Je ne connaissais pas l'Algérie ; j'étais “Algérie

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