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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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second c'était moi, et en troisième position Robert Mitterrand. »
    La mémoire du président vient encore de lui jouer un tour. Un raté intéressant, car non seulement il se trompe sur le nom du candidat communiste, qui ne s'appelait pas Var, mais Emon, mais surtout parce que celui-ci n'arrive pas en tête du premier tour, mais en second. Chirac le devance !
    À la veille du deuxième tour, Robert Mitterrand fait une déclaration signifiant que les accords signés par son frère ne s'appliquent pas à lui : « Je suis le frère de François Mitterrand, je constitue une exception, et le candidat communiste sera donc obligé de se désister en ma faveur, bien que je sois arrivé derrière lui. » Son frère, lui, riposte que c'est impossible.
    « Il a été obligé, le malheureux, de se désister en faveur du communiste ! Si ce dernier s'était désisté en faveur de Robert Mitterrand, je n'aurais pas été élu. Si j'ai été élu, c'est parce que j'étais opposé à un communiste. Sans compter que Robert Mitterrand n'a pas fait la moindre déclaration pour faire voter en faveur de ce dernier.
    « Nous avions mené une campagne difficile. Robert Mitterrand était fait pour être candidat en Corrèze comme moi pour être cardinal. Ingénieur, c'était un bourgeois citadin, très intelligent, mais les vaches, il ne connaissait pas très bien, les foirails non plus. La façon dont on tope pour acheter un veau, c'était pas sa tasse de thé… Dans les réunions, je me montrais insolent à son égard, je suis bien obligé de le reconnaître, je l'ai regretté après coup. Je m'adressais à la salle en patois. Le malheureux… [Gros rires.] C'était d'ailleurs ridicule, car je cause très mal le patois, mais enfin, ça faisait bon effet… J'ai gardé ensuite de très amicales relations avec lui, bien qu'il ait été mon adversaire… »
    Le 12 mars 1967, Jacques Chirac est élu député de Corrèze et change de stature. Le général de Gaulle, qui l'a remarqué, le reçoit pendant une heure, une dizaine de jours après son élection. Jacques Foccart, très proche collaborateur du Général, qui à la fois s'occupe de l'Afrique et a la haute main sur le SAC (Service d'Action civique), noyau dur des activistes gaullistes, lui a également trouvé un profil intéressant. Il l'a même inscrit sur la liste des prochains membres du gouvernement, et, en face de son nom, Pompidou a écrit : « Je crois que si l'on prend un élément jeune, c'est celui-ci qu'il faut prendre 14 . »
    « Quand j'ai été élu, poursuit l'actuel président, on n'avait à la Chambre qu'une voix de majorité. J'ai toujours dit que c'était la mienne, naturellement ! L'inscription au groupe UDR était donc capitale. J'ai reçu un coup de téléphone m'enjoignant de venir m'inscrire. J'arrive à l'Assemblée nationale. J'étais attendu avec impatience, comme tous les élus. Ce sont Marc Jacquet et René Tomasini, qui dirigeaient le groupe, qui m'ont reçu. “Bravo, Chirac, très bien…” Puis Tomasini me demande ce que je veux comme commission. Moi qui n'étais pas du tout familier des milieux politiques, je réponds finement : “La Commission des finances.” Ils poussent un coup de gueule épouvantable : “Qu'est-ce que c'est que cette prétention ? La Commission des finances, on y accède au bout de dix ans ! Tu te rends compte : moi, par exemple… – Alors, va te faire foutre ! – Bon, si tu le prends comme ça…” Je m'étais mis à le tutoyer, moi aussi. “Si tu le prends comme ça, va te faire foutre, toi aussi : mets-moi où tu veux, je m'en contrefous…” Et je suis parti en claquant la porte.
    « Je me suis retrouvé dans je ne sais plus quelle commission : en fait, je n'ai pas eu le temps d'en profiter… »
    Le 7 mai, Chirac arrive à l'hôtel Matignon et croise Pompidou qui en sort. Le Premier ministre interpelle le tout nouveau député de Corrèze : « Chirac, je viens de voir le Général et nous avons décidé de vous confier un strapontin… »
    Le président : « J'étais un peu sidéré. Je le remercie. Il précise : “…secrétaire d'État à l'Emploi.” Ça n'existait pas. C'était la première fois qu'un secrétariat d'État à l'Emploi voyait le jour. J'étais le dernier sur la liste protocolaire. Pompidou ajoute : “Je vais vous dire deux choses. La première : ne vous prenez pas pour un ministre. La deuxième : sachez que l'emploi sera un problème majeur dans notre pays,

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