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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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Serait-ce trop vous demander de préciser dans laquelle ?
    — Nous allons demander au lieutenant de police La Reynie ce qu’il pense de ce revenant. Et ne dites pas non, je suis en mission pour le roi !
    Le trajet qui nous reconduisait à Versailles ne fut pas assez long pour que nous nous fâchions, le marquis et moi, mais le drame se joua sur deux ou trois foulées. Alors que les chevaux galopaient à hue et à diable, Louis de Mieszko entreprit un sermon sur l’inconstance, et la dureté de ses paroles valait celle de Bourdaloue. Inconstante, je l’étais selon lui, pour avoir décidé de m’adresser à La Reynie, par qui le mal nous atteignait. Je ne pus retenir un sourire en entendant ce nous auquel il se mêlait, dévoilant ainsi un attachement sincère à notre famille, et dont la preuve irréfutable était cette colère digne de celle d’un père.
    Ce qu’il trouvait d’extravagant, de ridicule, de singulier ou d’invraisemblable dans ma démarche, je le résumais à un paradoxe. Mais je pris soin de ne pas répliquer que le paradoxe était une méthode dont usaient justement les grands stratèges et même les philosophes afin de dénouer les situations singulières. De même, je ne rétorquai pas que de la confrontation d’idées contraires ou opposées jaillissait souvent la lumière. En somme, que du choc de cette rencontre, j’espérais faire accoucher la vérité. Mais la maïeutique n’est-elle pas une science que les femmes manient mieux que les hommes ? Je n’osai lui poser cette question dont la réponse méritait de longs développements et un temps que nous ne maîtrisions point. En revanche, coupant son monologue qui épuisait mes oreilles, je lui dis :
    — Pourquoi me méfier d’un homme dont je sais qu’il est notre ennemi ?
    Il resta bouche bée.
    — Mais enfin, repris-je en souriant, que pouvons-nous craindre de La Reynie puisque nous resterons sur nos gardes ? Chacun de ses mots et de ses gestes, nous les épierons. Voudrait-il nous tromper ? Nous y sommes si préparés que nous devinerons ses coups fourrés. Cette rencontre est sans surprise, ce qui est le secret des batailles réussies. Tenez, nous voilà arrivés. Allons, monsieur le marquis, vous ne me prêtez pas la main pour descendre ?
    Il souffla de dépit. Et ce fut tout ce qu’il exprima pendant que nous avancions vers la Cour royale.

    Le marquis de Penhoët avait du moins raison sur un point. À Versailles, les bruits circulaient vite. Alors que nous demandions à un garde suisse où trouver La Reynie, une voix retentit dans notre dos :
    — On me cherche. On me trouve. Et parfois, on me trouve sans me chercher.
    Je m’étais inventé un homme grand, méchant, hargneux et même laid. J’imaginais une voix menaçante, une arrogance de chaque instant, des manières brutales. En somme, j’attendais un homme détestable.
    — Je cours après vous depuis une heure, mademoiselle, dit-il en s’inclinant. Le roi m’a fait savoir qu’il souhaitait notre rapprochement.
    Le chef de la police était petit. Maigre plus que mince. Drôle plus que laid. Et des souliers au chapeau, ses vêtements ne comptaient qu’une seule teinte, le noir. Il portait une énorme perruque frisée qui tenait sur ses frêles épaules, ce qui rapetissait encore sa taille. Sa voix était aiguë et fluette comme celle du moineau. Son visage tenait entièrement dans deux yeux énormes et un nez si long que je dus réviser mon jugement. Ce n’était pas un moineau, mais plutôt un pivert. Ses gestes secs et nerveux ajoutaient à l’impression et, j’ajouterai ceci : malgré tous mes efforts, à l’instant où je le vis et où il me parla, je ne pus le détester.
    — Vous m’en voulez, mademoiselle, je le sais, et je ne peux vous blâmer. Ma seule excuse, je vous la donne sur-le-champ : j’ai servi le roi, comme nous le servons tous deux aujourd’hui. Il faut s’entendre vous et moi là-dessus. Malgré le passé, et puisque vous voulez le réparer, nous devons faire équipe. En échange, je vous promets d’être loyal et fidèle envers vous. Pourquoi aujourd’hui, contrairement à hier ? Je vous le répète : nous agissons pour le roi. Vous vous y êtes engagée et, si j’excepte le cas où vous le trahiriez, votre cause m’est acquise.
    — Seriez-vous vraiment prêt à m’aider ou est-ce une ruse pour m’espionner ? lui demandai-je, à la fois audacieuse et inquiète de voir ce sbire des noirceurs du royaume chevaucher à mes

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