Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
Vom Netzwerk:
question. Peut-être dans les attendus de cet édit qui fait couler tant d’encre et tant parler les esprits éclairés... Et que lisons-nous ? En fait deux choses contradictoires. Le roi Très-Chrétien désire que ses sujets de la religion prétendument réformée reviennent à la vraie religion catholique, apostolique et romaine . Le serment du roi, vous le cherchiez ? Le voici. Revenir à la vraie religion catholique, apostolique et romaine . Vous parlez de tolérance , mais il est écrit dans l’édit de Nantes que le roi désire que l’on revienne à la foi catholique. Et ce que le roi désire... Peut-il simplement tolérer qu’on ne lui obéisse pas ? La tolérance, madame, ce n’est pas tolérer, mais accueillir et partager. Dans l’édit de Nantes, il est dit que la foi protestante n’est que tolérée. Tout le reste n’est que baliverne ! Alors, que répondez-vous ? lança-t-il en rouvrant brusquement les yeux, décochant une flèche qui me transperça.
    L’homme était terrible. Je n’allais pas me sortir de son art de la rhétorique ni de ses pièges jésuitiques.
    — Vous vous taisez, reprit-il. Vous n’avez pas d’argument. Ah ! Car il faut maîtriser son sujet avant de parler. C’est souvent le danger à discuter. Les uns et les autres ont des avis, des opinions, mais du fond ? C’est ainsi que naît la haine. Une parole en trop et la colère met fin à l’amour de Dieu. Pour un mot incompris, on se brouille. C’est la joute oratoire, et, bientôt, la guerre de religion ! Aussi, et avant de se fâcher, il convient au moins de savoir ce que l’on défend. Moi, si j’étais à votre place, je répondrais que ce fameux texte dit, ailleurs, qu’ il ne faut plus faire de distinction entre catholiques et huguenots, mais qu’il faut que tous soient de bons Français . Plus de différence, plus de supériorité ! Voilà comment vous auriez pu retomber sur vos pieds et me mettre à la faute. Alors, j’aurais dû chercher d’autres arguments. Et je n’aurais pu opposer au vôtre que des articles de circonstance qui, en lisant bien, montrent, tout de même, que cet édit est contradictoire. Non, cela ne se veut pas une provocation. J’énonce la vérité. Ainsi, après avoir écrit que l’on tolérait les huguenots, il est indiqué plus loin que la religion catholique doit être réinstallée dans ses anciennes prérogatives. C’est dans l’article III. Vous devinez bien que je l’ai particulièrement étudié. Et faites œuvre de charité chrétienne en me croyant. Mais que signifie cette tolérance qui impose le retour de l’Église romaine sur les terres des protestants ? Et tout est à l’avenant. Tantôt je dis blanc ; tantôt noir. En fait, on ne comprend cet édit qu’en se penchant sur la personnalité de son auteur et de son signataire. Je parle du roi Henri IV.
    Il se versa de l’eau et but lentement en m’observant. Madame de Maintenon ne bougeait pas et ne le quittait pas des yeux. Ses paroles suffisaient à étancher sa soif.
    — Oui, parlons de son auteur, Henri IV, ajouta La Chaise d’une voix de plus en plus onctueuse. D’abord, pouvez-vous m’expliquer sa religion ?
    — Il s’est converti à la religion catholique.
    — Hum ! C’est comme cet édit... Tantôt huguenot, et tantôt catholique. Voilà qui n’aide pas les historiographes. Pour tout vous dire, j’ai pensé que les convictions de cet homme étaient aussi floues que son édit jusqu’à comprendre ce qu’il cherchait vraiment. Je ne pouvais me faire à l’idée que ce roi si brillant et si intelligent n’ait pas conçu un vrai projet. Et j’ai saisi le sens de l’édit de Nantes en répondant à ces interrogations. Qui était-il ? Et que voulait-il ? Mais vous, le savez-vous ?
    — C’est un grand roi qui a rétabli la paix. Et instauré la tolérance, m’entêtai-je sentant pourtant bien que sous les assauts de son intelligence et de son érudition, les remparts de mes certitudes se fissuraient.
    — Le grand roi, je vous l’accorde. J’ajouterai même un roi exceptionnel pour la monarchie, car il a installé l’absolutisme. Non ! Ce n’est pas Louis XIV... Mais, aussitôt, je m’explique : la vocation de l’édit de Nantes n’était pas d’instaurer la tolérance, madame, mais de placer le roi au-dessus de toutes les religions. Il est le roi de tous les Français et sa religion importe peu. Sa conversion est même secondaire. Paris vaut bien une messe . Je ne jugerai pas la

Weitere Kostenlose Bücher