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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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battait son plein. Vous étiez moins... enveloppé, me semble-t-il. Je n’ai oublié aucun détail et je vois encore les yeux bleus et doux d’Hélène. Je l’aurais reconnue, sans même qu’elle vienne jusqu’à moi.
    La marquise de Sévigné se tenait sur le perron de l’hôtel Carnavalet. Elle me tendait les bras. Et je fus aussitôt éblouie par cette majestueuse apparition.

    — Tu logeras ici, Hélène.
    La marquise poussa une porte située au rez-de-chaussée de l’hôtel Carnavalet. Elle entra la première et me fit signe d’avancer. Elle portait une robe de soie grise qui semblait flotter dans l’air. Je suivis cet ange de grâce qui, depuis une heure, m’accueillait tel l’enfant prodige.
    — Je ne manque pas de place depuis que Boislève, le nouveau propriétaire, a fait agrandir son hôtel. Que reprochait-il à l’ancienne demeure des Kernevoc’h, si ce n’est un nom compliqué ? Il suffisait de le simplifier en Carnavalet pour réaliser des économies substantielles... La Fontaine a raison, l’homme est semblable au lion. Il veut dominer, conquérir et imprimer sa trace, et celle de monsieur Boislève n’est pas très à mon goût. Pourtant, Mansart en personne fut chargé du travail. Il n’empêche que je n’aime qu’à moitié l’élévation des ailes qu’il vient de faire réaliser. À force de raison, je m’y fais et, si j’étouffe derrière ces murs, je m’invite au château de Grignan où réside ma fille. Bien que, depuis peu, on ne souhaite pas y voir trop souvent une mère que l’on juge possessive...
    Son visage s’assombrit.
    — Alors, j’écris. Surtout depuis que je suis veuve. Je le fais pour ma fille. Et parfois, cette activité nous joue des tours...
    Songeait-elle à mon père ? Elle s’approcha de moi et me prit par les mains.
    — Sans demander l’avis de Boislève, j’ai mis un peu de moi dans cette maison. L’architecte Libéral Bruant a décoré cet appartement de plain-pied que je réservais à ma fille. Hélas, fit-elle tristement, c’est insuffisant pour la décider à me rendre visite. Pourtant, une heure de conversation vaut mieux que cinquante lettres... Ah ! Quel bonheur de te voir, Hélène. Tu es si belle et si semblable à ta mère. Je comprends que ton père t’ait jalousement gardée auprès de lui. Mais te voilà à Paris. Et nous ferons en sorte que tu y sois heureuse. Regarde comme tu seras bien.
    Elle ouvrit la fenêtre qui donnait sur une cour pavée de fleurs d’automne et de buis. Le soleil entra dans la pièce. Les yeux de madame de Sévigné brillaient. Elle prit en main le collier de perles fines qui retombait sur le petit décolleté de sa robe et recouvrait sa gorge. Ses gestes étaient mesurés et légers. Son charme agissait. J’étais tombée en admiration devant cette femme gracieuse au visage si doux, ourlé par les premiers signes d’expression de l’âge mûr.
    — Voici ta chambre. Et ici, un petit salon où tu pourras recevoir sans craindre les yeux et les oreilles des indiscrets.

    Les pièces se succédaient en enfilade. La chambre, tout d’abord, ressemblait à une bonbonnière. Deux fauteuils tapissés de velours vert encadraient une coiffeuse habillée d’une marqueterie raffinée. Ce meuble aux pieds délicats était surmonté d’un miroir ovale dans lequel se reflétaient des flacons ciselés et dorés, posés sur le plateau de la table. Un vaste lit occupait l’autre côté de la pièce. Le tissu dont il était recouvert déclinait les teintes du rose. Accrochée au mur où se trouvait la tête, une grande tapisserie évoquait la douceur pastorale. Un fleuve paressait entre deux collines verdoyantes. Le camaïeu de rose et de vert se répétait. Il faisait bon vivre dans cette scène qu’observait, du haut d’un des vallons, un couple d’amoureux qui se tenaient par la main. C’était le soir, et celui-ci leur semblait doux.
    Le parquet était revêtu de tapis de laine aux couleurs reposantes. Ils formaient un chemin naturel qui menait à un petit salon agrémenté d’une table basse et ronde, où discutaient quatre fauteuils profonds, et d’un bureau de travail chargé de plumes, d’encriers, de papier et de livres. Une lettre inachevée et raturée patientait sur le coin ensoleillé de ce meuble d’acajou. De part et d’autre trônaient d’immenses bougeoirs habillés de cire fondue et laiteuse aux formes mystérieuses, comme seule la nuit sait en inventer. On pouvait veiller tard dans

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