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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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comme vous le désirez, à ensevelir tout le passé dans l’oubli. Mais je n’ai point fini mon récit. Vous savez que la fureur des éléments était telle cette nuit-là, que personne n’aurait voulu la braver sans une nécessité absolue. J’essayai de profiter de ce mauvais temps, et je sortis de la ville à l’aide d’un drapeau parlementaire qui est régulièrement accordé à Job Pray. Impatients, ou plutôt emportés par un ouragan de passions plus furieux que celui qui agitait les airs, nous nous hasardâmes trop, car je n’étais pas seul, Cécile.
    – Je le sais, je le sais, s’écria-t-elle en respirant à peine ; eh bien ! vous vous hasardâtes trop ?
    – Et nous rencontrâmes un piquet qui ne voulut pas prendre un officier de l’armée royale pour un idiot. Dans notre empressement, nous oubliâmes… Croyez-moi, chère Cécile, si vous saviez tout : la scène dont j’avais été témoin, les motifs qui m’avaient déterminé, vous me trouveriez excusable de vous avoir en apparence abandonnée et d’une manière si étrange.
    – En ai-je douté, Lionel ? s’écria Cécile rougissant de modestie et d’émotion ; ai-je oublié ma condition, la perte que je viens de faire, la faiblesse de mon sexe, pour suivre un homme que je croyais indigne de ma sollicitude ? Ne me soupçonnez pas de venir vous reprocher de prétendus torts. Je suis votre épouse, Lincoln, et c’est en cette qualité que j’ai voulu me réunir à vous dans un moment où vous pouvez avoir besoin de toute la tendresse d’une femme pour adoucir votre sort. J’ai contracté cet engagement sacré au pied de l’autel et en présence de mon Dieu ; puis-je hésiter à le remplir parce que les yeux des hommes sont fixés sur moi ?
    – Je perdrai l’esprit, je deviendrai fou ! s’écria Lincoln en marchant à grands pas dans un désordre qui annonçait une angoisse d’esprit imprimable. Il y a des moments où je crois que la malédiction qui a frappé le père est déjà tombée sur le fils !
    – Lionel, lui dit Cécile du ton le plus doux, est-ce ainsi que vous voulez me rendre plus heureuse ? est-ce ainsi que vous recevez la fille confiante qui a remis son bonheur entre vos mains ? Mais je vois que vous revenez à vous, et vous serez plus juste envers vous et envers moi, plus soumis à la volonté de Dieu. On ne vous soupçonne sûrement pas d’être venu si témérairement dans le camp des Américains, conduit par quelque dessein criminel ? Il serait facile de convaincre leurs chefs que vous ne pouvez être coupable d’une telle bassesse.
    – Il est difficile d’échapper à la vigilance de ceux qui combattent pour la cause de la liberté, dit la voix calme de Ralph qui parut inopinément devant eux ; le major Lincoln a trop longtemps suivi les conseils des tyrans et des esclaves, et oublié le pays qui l’a vu naître ; s’il veut être en sûreté, qu’il ouvre les yeux et qu’il revienne sur ses pas, tandis qu’il le peut encore, avec honneur.
    – Avec honneur ! répéta Lincoln avec un dédain qu’il ne chercha pas à déguiser. Et il se remit à marcher dans la chambre avec vitesse et agitation ; sans daigner faire aucune attention au vieillard qui était arrivé si mal à propos. Cécile baissa la tête, se laissa tomber sur une chaise, et appuya son visage sur son manchon, comme si elle eût voulu s’épargner la vue de quelque spectacle horrible et effrayant.
    Le silence momentané qui s’ensuivit fut interrompus par le bruit de plusieurs voix qui se firent entendre dans le vestibule le moment d’après, la porte de l’appartement s’ouvrit et l’on vit entrer Meriton. Son arrivée fit tressaillir Cécile, qui se leva précipitamment et s’écria avec une sorte d’empressement frénétique :
    – Pas ici ! pas ici ! Retirez-vous. Pour l’amour du ciel, pas ici ! Le valet hésita ; mais, ayant aperçu son maître, son attachement l’emporta sur son respect.
    – Dieu soit loué de ce qu’il me permet de vous revoir, monsieur Lionel ! s’écria-t-il ; c’est le moment le plus heureux que j’aie eu depuis que j’ai perdu de vue les côtes de la vieille Angleterre : si nous étions seulement à Ravenscliffe ou dans Soho-Square, je serais l’homme le plus satisfait des trois royaumes. Ah ! monsieur Lionel, partons de cette province, et retournons dans un pays où il n’y a pas de rebelles, où l’on ne calomnie pas le roi, la chambre des pairs et celle

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