Liquidez Paris !
correctement.
– Une paire d’amis ! ricana Heinrich.
Des protestations bruyantes accueillirent la relève. Le petit légionnaire fit remarquer sèchement qu’elle était en retard d’un quart d’heure.
Sanglant et brisé, le parachutiste Robert Piper fut amené à la feldgendarmerie de la rue Saint-Amand.
– Vous avez douze heures pour parler cria l’Oberleutnant Brühner.
Douze heures ! Le SS. Untersturmführer Steinbauer, agent de la Gestapo, éclata de rire. En douze heures, on pouvait faire parler toute une ville ! D’un coup d’œil, il jaugea le parachutiste ; ce type ne tiendra pas une demi-heure, se dit-il. En trois heures on arrivait à faire avouer les plus durs. Le premier choc se faisait normalement sentir après vingt minutes, ensuite on continuait par la baignoire de glace. Après ce traitement-là, toutes les femmes étaient brisées ; le patient devenait un morceau de viande insensible, mais parfois le cerveau restait encore intact. Entre-temps, on pouvait se servir du fouet, mais c’était peu honorable pour ceux qui travaillaient ; un tuyau d’eau à haute pression valait bien mieux : il y avait aussi les coup de pied dans le ventre, mais c’était risqué : l’homme pouvait en mourir.
Douze heures ! Un jeu d’enfant. l’Untersturmfiihrer entreprit le parachutiste qui s 9 effondra en vingt-sept minutes à partir du moment où il fut amené rue des Saussaies. Il donna trente et un noms et autant d’adresses, ce qui fit que dans les huit heures, le commando de la chasse ramassa trente-huit personnes.
Le commandant du Grand Paris signa trente-huit arrêts de mort.
UNE EVASION A LA PRISON DE FRESNES
LA caserne du Prince-Eugène à Paris évoquait toujours un nid de guêpes : cris, hurlements, commandements rauques, tout le monde semblait tourner en rond ; mais en réalité, cette pétaudière apparente comportait un ordre strict ; partout veillaient des yeux perçants et les mitrailleuses qui somnolaient au soleil étaient toujours prêtes à cracher le feu en quelques secondes.
Aujourd’hui, sous le soleil d’été, la caserne paraissait morte, l’asphalte réfléchissait la chaleur ; dans un coin éloigné résonnaient des roulements de tambour, des trompettes couinaient, c’était la musique du régiment qui répétait. Très rares étaient les hommes qui osaient aller à la cantine le matin, sauf bien entendu Porta, Petit-Frère et Gregor Martin lesquels avaient l’excellent prétexte de jouer aux dés avec l’Unterfeldwebel Brandt, l’obèse et transpirant chef de la cantine. Petit-Frère s’était procuré un panier à munitions détérioré qui était perpétuellement en route pour une réparation, Porta un appareil d’optique toujours défectueux, et Gregor Martin deux revolvers enveloppés d’une toile huileuse. Ces vieux renards pratiquaient la règle d’or des militaires : répondre réglementairement aux questions indiscrètes, moyennant quoi tout se passait à merveille.
Sur le sol sablé, une compagnie de recrues s’exerçait sous les hurlements sauvages d’un sous-officier, en vertu de cet adage que plus on hurle, mieux ça a l’air d’aller.
Le service n’était nullement pénible, exception faite du peloton d’exécution tous les trois jours, mais il y a longtemps que ça ne nous fait plus guère d’effet : Quelle différence y a-t-il entre tuer un type attaché à un poteau ou le faire-griller dans un char ?
– C’est la guerre ! répète inlassablement le légionnaire.
L’après-midi, nous montons la garde au tribunal du conseil de guerre où l’on fait queue comme pour entrer au cinéma. Parmi les délinquants certains nous demandent des cigarettes, et Porta tend à un prisonnier un demi-paquet.
– Pas de cigarettes pour ce cochon, crie un petit homme du S. D. Il a descendu des nôtres.
Sans avoir l’air d’entendre, Porta lui donne du feu et sourit. Ce n’est guère qu’un enfant.
_ Ton tour est pour demain, dit le S. D.
Le type hausse les épaules avec indifférence.
– Tu fais le fiérot, prévient Gregor Martin, mais on verra si ça dure encore demain matin.
– Je t’emmerde l grommelle le jeune homme.
– Que non ! ricana Porta. Emmerde plutôt les copains de Moscou. Pourquoi diable t’es-tu mêlé à ces salauds ?
– Je suis communiste et je lutte pour la liberté des travailleurs !
– Bien sûr, bien sûr, rétorqua Porta avec calme. Et demain tu es mort, mais tu auras
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