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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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qu’agrémentait
un corsage dont l’une des épaules restait dénudée.
    Pas un bijou n’enserrait son cou. Seuls
quelques bracelets d’ivoire, lesquels avaient été rapportés du Pays du Pount,
encerclaient ses bras et ses chevilles.
    Ce jour-là, elle ne portait pas de sandales. C’eût
été déplacé de s’en chausser face à la pharaonne. Ses pieds nus parfaitement
manucurés effleuraient le moelleux tapis qui recouvrait la chambre de la reine.
    — La dernière fois que tu es venue ici,
dit Hatchepsout, tu étais enceinte.
    — Je le suis à nouveau, Majesté.
    La reine cacha son désappointement. Ainsi, les
propos qui circulaient jusqu’à elle étaient justes.
    — Puis-je te demander qui en est le père ?
    — Neb-Amon, le médecin de Votre Majesté.
    — Ainsi c’était vrai.
    — Vous l’avait-on dit, Majesté ?
    Hatchepsout lâcha les mains de Séchât et soupira.
    — Tout s’apprend au Palais. Tu le sais
bien.
    Séchât hocha la tête.
    — Cela vous contrarie-t-il, Majesté ?
    — Allons, cesse de m’appeler « Majesté ».
Nous sommes seules, même Senenmout n’est pas là. Que crains-tu ?
    Hatchepsout eut un autre soupir plus agacé que
le précédent.
    — Laisseras-tu ton enfant au harem, aux
côtés de Satiah ?
    Séchât ne répondit pas. La pharaonne comprit
qu’un souci préoccupait l’esprit de sa compagne.
    — Viens, fit-elle, en lui prenant le
bras. Installons-nous confortablement sur ce fauteuil et discutons ensemble.
    Elle frappa dans ses mains et Yaskat apparut.
    — Apporte-nous des melons, des grenades
et du vin doux au miel.
    Puis, elle se retourna vers son amie.
    — Es-tu satisfaite de Cachou ?
    Cachou était une jeune Africaine rapportée du
Pays du Pount et qui, tout naturellement, avait remplacé la douce Reshot
disparue dans les flots tourmentés de la mer Rouge, lors de l’expédition
pharaonique.
    — Elle est jeune, un peu vive, mais
gentille et dévouée.
    Elle s’apprêta à recenser les autres qualités
de sa jeune servante, mais se retint, releva le buste et jeta en regardant la
reine dans les yeux :
    — Majesté…
    Au regard contrarié d’Hatchepsout, elle reprit :
    — Hatty, dit-elle en reprenant le
diminutif qu’elle lui donnait lorsqu’elles étaient jeunes, je démissionne. Je
te rends le titre de Grande Intendante des Artisans. Si tu acceptes je conserve
celui de Grande Scribe.
    — Je ne peux t’empêcher d’épouser
Neb-Amon.
    Elle jeta un regard oblique sur son amie.
    — Car, je pense que vous allez vous
épouser.
    Séchât acquiesça de la tête.
    — Que tu démissionnes de ton poste de
haut dignitaire n’entre pas dans mes projets, Séchât, et je sais que tu en es
consciente. J’ai besoin de toi, comme j’ai besoin de tous mes sujets fidèles.
Maintenant, plus qu’autrefois !
    Elle replia ses jambes et prit la position du
scribe lorsque Yaskat entra, portant un plateau de fruits, quelques sorbets
rafraîchissants et deux coupes de vin sucré.
    — Thoutmosis a treize ans, reprit-elle.
Il va bientôt siéger à mes côtés lors des assemblées. Ses fidèles vont former
une équipe, attentive, vigilante, peut-être acharnée contre moi.
    — Je resterai dans ton sillage, Hatty !
s’écria Séchât en lui prenant les mains.
    — Que pourras-tu faire si tu n’as plus
aucun pouvoir ?
    — C’est à vous, Majesté, de m’en donner d’autres,
poursuivit la jeune femme en reprenant le terme protocolaire.
    Hatchepsout réfléchissait. Certes, sa compagne
avait raison. Elle savait que Séchât était trop brillante pour ne pas assumer d’autres
fonctions que celles qu’elle assumait depuis presque dix ans.
    — Hatty, reprenait déjà Séchât d’un ton où
la conviction n’était nullement absente, que tu m’envoies en mission dans le
nord, près de Memphis, Héliopolis, Tanis ou que tu m’expédies dans le sud, non
loin de la troisième cataracte, j’effectuerai certes ma mission avec la
fidélité que je te dois, mais je ne vois pas en quoi je t’aiderai si des heurts
t’opposent au jeune Thoutmosis.
    — Alors que ?… jeta Hatchepsout qui
pressentait la proposition de sa compagne.
    — Alors que si je reste à Thèbes, je peux
te rendre compte de chaque fait et geste qui se trame au harem, au palais, dans
Thèbes même.
    — Que veux-tu faire ?
    — Diriger l’école du Palais.
    D’un bond Hatchepsout se leva, renversant un
plat de figues fraîches que Yaskat, restée devant la

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