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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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qui jouxtait le harem où
déjà quelques femmes vivaient dans l’espoir que leurs horribles symptômes
disparaissent.
    Mékyet leur prescrivait une potion qui servait
de remède pour les simples affections cutanées – encore fallait-il qu’elles
ne soient pas purulentes – et Pénith l’agrémentait d’une pommade à base d’huile
de cèdre et de feuilles d’acacia qu’il recommandait dans tous les cas de
brûlure. Il faut dire qu’à cette époque, les signes précurseurs de la maladie
avaient à l’œil nu l’aspect de soudaines brûlures et les médecins n’avaient
recours qu’aux seuls remèdes qui les soignaient.
    Pour l’instant, seule une dizaine de femmes
accompagnées de leurs servantes s’étaient vu enfermées dans cet enclos retiré
derrière les ateliers de tissage où personne ne se rendait afin d’éviter tout
risque inutile de contamination. Mékyet et Pénith étaient les seuls à s’y
risquer avec Seddy, le troisième des médecins.
    Pour Seddy, le cas était différent. Veuf, il n’avait
pas d’enfants, juste un neveu, le fils de son frère auquel il tenait pourtant
comme à un fils, mais celui-ci avait été élevé sans aucun appui dans son
adolescence, appui d’un père qui eût été un guide, sans réelle vie de famille,
dans une aisance, cependant, qui ne lui avait jamais fait défaut et, pour
saupoudrer ce laisser-aller, aux côtés de quelques serviteurs qui n’avaient
fait que céder à tous ses caprices.
    Ce jour-là, alors que Pénith se dirigeait vers
le pavillon des contaminés, il fut agressé par un groupe de femmes qui venaient
de l’extérieur et qui se ruèrent sur lui telles des furies dont les cris n’étaient
qu’un immense écho de rancœurs. C’est à peine s’il vit leurs visages tant elles
se serrèrent contre lui, agrippant sa tunique, la déchirant aux épaules là où
elles avaient prise. Derrière elles, Mékyet accourait, essoufflé d’avoir autant
pressé le pas pour rejoindre son compagnon avant qu’il puisse discuter avec
elles.
    — Que veulent-elles ? s’enquit
Pénith avec une ombre d’inquiétude dans la voix tout en essayant de se dégager
des mains qui l’agrippaient avec fureur.
    — Il faut les expulser au plus vite,
répliqua vivement Mékyet sans reprendre son souffle. Elles sont sans doute
contaminées.
    Déjà quatre gardes s’approchaient des pauvres
victimes et les saisissaient par le bras. Mais on pouvait remarquer que leurs
yeux étaient emplis d’effroi à l’idée même de toucher l’étoffe de leurs
tuniques. Aussi, c’est avec une extrême prudence, doublée d’une mollesse à
laquelle ils n’étaient pas habitués, qu’ils tentèrent de retenir les femmes. Ce
manque de fermeté eut aussitôt l’effet du contrecoup. Les femmes se dégagèrent
rapidement à coups de pieds et de poings, les insultant de propos grossiers.
Pourtant, que pouvaient-elles réclamer d’autre qu’un peu de pain pour atténuer
la faim qui les tenaillait depuis plusieurs semaines ?
    — Que peut-on faire ? dit Pénith à
son compagnon qui s’épongeait le front à petits coups successifs.
    — Rien, répliqua Mékyet, de toute façon,
elles sont perdues. Et, même si elles ne présentent pas les symptômes de l’épidémie,
elles ne vivront pas au-delà de quelques jours.
    — Par tous les dieux ! jura Pénith
qui, tournant la tête, vit que les gardes avaient réussi à reprendre le bras
des femmes entre leurs mains volontairement malhabiles. Comment ont-elles pu
faire pour entrer ? Toutes les issues du palais sont bloquées. D’où
viennent-elles et par où sont-elles passées ?
    — Je suppose qu’elles sont des environs
de Thèbes. Avec l’énergie qui leur reste, elles ont dû faire la courte échelle.
Les gardes n’ont pas osé les approcher, de peur d’être contaminés.
    — Elles ne présentent pas de marques sur
le visage, assura Mékyet. Aussi, je pense qu’elles ne sont pas contagieuses.
    La fureur des femmes s’était transformée en
folie et l’on pouvait se demander d’où elles tiraient cette énergie mise dans
leurs cris et leurs clameurs. Elles hurlaient, vociféraient, crachaient sur les
soldats qui, blancs de peur, s’éloignaient aussitôt. Pourtant, à les observer
de plus près, on voyait qu’elles titubaient et qu’à chaque cri, elles
manquaient de tomber.
    Elles étaient une dizaine et l’on ne pouvait
discerner leur âge tant la maigreur les métamorphosait en squelettes

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