L'Orient à feu et à sang
d’arme élaborées – des moulinets dans un sens puis dans l’autre, quelques huit décrits au-dessus de sa tête et ainsi de suite – Maximus s’accroupit dans la position classique du combattant plus petit maniant une arme d’estoc. Ballista s’aperçut qu’il faisait tourner dans sa main le pommeau de sa spatha et s’empressa d’enfiler la dragonne de cuir. Il se mit en garde : debout bien droit, pieds écartés, poids du corps également distribué, de profil, bouclier tenu loin du corps, regardant par-dessus son épaule gauche, l’épée levée au-dessus de l’épaule droite.
Maximus courut vers lui. Connaissant l’impétuosité de l’Hibernien, Ballista s’y attendait à moitié. Leurs boucliers se heurtèrent. Se laissant repousser, Ballista posa le pied arrière vers la droite et amena son pied gauche d’appui derrière son pied droit pour effectuer une volte complète, attirant à lui l’adversaire emporté par son élan – une feinte thessalienne parfaitement exécutée. Tandis que Maximus le dépassait, Ballista abattit son épée, paume vers le bas et, retenant son coup, piqua l’épaule de l’Hibernien. Il fut récompensé par un cliquetis sonore quand la pointe de sa spatha toucha la cotte de mailles. Beaucoup moins plaisant fut le coup de gladius , résonnant à ses oreilles et irradiant dans son corps, que Maximus lui porta au dos un instant après.
Les deux hommes tournaient en rond, s’affrontant maintenant avec plus de circonspection. Maximus, alternant fentes et feintes, très mobile sur ses pieds, était à l’origine de la plupart des attaques.
La seule autre personne connaissant l’existence de la haute silhouette était Julia. Elle avait été élevée selon les préceptes d’Épicure et, pour elle, rêves et apparitions n’étaient que vues de l’esprit. Ils survenaient avec la fatigue, physique ou nerveuse. Ballista ne s’était pas senti bien depuis la bataille contre les Borani. Les mots de leur chef avaient, dans une certaine mesure, fait mouche. Une moitié de vie passée dans l’imperium romanum l’avait changé, l’avait amené à faire des choses qu’il aurait mieux aimé ne pas faire, au premier rang desquelles, l’assassinat du grand type. Peut-être Julia avait-elle raison : ce n’était pas un démon, mais le produit de sa culpabilité. Pourtant…
Ballista rejeta brusquement la tête en arrière, esquivant de justesse le gladius de Maximus. Il s’en était fallu de peu. « Foutre, pensa-t-il, concentre-toi, espèce d’idiot. Regarde la lame. Regarde la lame. » Il combattait mieux lorsqu’il s’appuyait sur un heureux mélange d’entraînement, d’expérience et d’instinct, laissant la mémoire dans ses muscles appréhender les choses au fur et à mesure qu’elles advenaient. Mais son esprit devait se focaliser sur les deux ou trois prochains coups de son adversaire – et non sur la mort violente d’un homme survenue il y a dix-sept ans.
Ballista s’efforça de reprendre l’initiative. Il reporta le poids de son corps sur le pied gauche et avança le droit comme pour porter un coup à la tête, puis, juste au moment où Maximus levait son bouclier pour parer, changea l’angle d’attaque pour frapper aux jambes. L’Hibernien avait de bons réflexes et son bouclier s’abaissa juste à temps.
Maximus chargea, poussant son bouclier vers le visage de Ballista. Cédant du terrain, ce dernier mit le genou droit à terre et abattit sa spatha à hauteur de cheville sous le bouclier de son adversaire. Une nouvelle fois, les réflexes de Maximus le tirèrent d’affaire.
Ballista tenta d’asséner un coup de taille visant le côté de la tête. Cette fois-ci, Maximus s’avança vivement, passa sous la garde et abattit son gladius sur son poignet. Ballista ne parvint pas à écarter son bras assez vite. Maximus avait tourné son épée, mais le coup du plat de la lame le fit grimacer.
Ballista sentait la colère monter en lui. Son bras l’élançait. Il n’allait pas se laisser battre par cet arrogant bâtard d’Hibernien devant ses propres hommes, foutre non ! La frayeur de la nuit précédente mêlée à la douleur dans son bras le rendirent ivre de rage. Il se sentit perdre la maîtrise de lui-même. Il porta une série de coups féroces à la tête de Maximus, à ses jambes, à toutes les parties du corps qu’il pensait pouvoir toucher. Encore et encore sa lame frôlait son adversaire, mais à chaque fois, Maximus
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