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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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dur. Turpio était désireux de donner satisfaction, Mamurra, réfléchi et pondéré comme à son habitude et Demetrius, en qualité d’accensus, semblait moins distrait. Peu à peu, de leurs délibérations, un plan commença à se former dans l’esprit de Ballista ; quelles portions de murailles seraient gardées et par quelles unités ? Où seraient-elles cantonnées ? Comment seraient-elles approvisionnées ? Où établirait-on le peu de troupes de réserve dont on disposait ?
    D’autres affaires militaires de moindre importance requéraient aussi son attention. Une cour martiale était réunie pour juger l’auxiliaire de la Cohors XX, qui avait été accusé de viol sur la personne de la fille de son propriétaire. Ce qu’il avait à dire pour sa défense était sommaire : « Son père était à la maison, nous sommes sortis dehors. Elle disait encore oui au moment où elle était cul nu dans le foin. » Cependant, son centurion fournit d’excellentes références et, plus important, deux des contubernales du soldat jurèrent que la fille avait déjà eu des rapports consentis avec lui.
    La cour était partagée. Acilius Glabrio, l’incarnation même de la vertu républicaine, était pour la peine de mort. Mamurra demanda à ce qu’on fît preuve de clémence. En fin de compte, la décision incombait à Ballista. Aux yeux de la loi, le soldat était coupable. Il était fort probable que ses contubernales eussent menti. Ballista prononça l’acquittement, non sans scrupules. Il ne pouvait se permettre de perdre ne serait-ce qu’un seul homme, et encore moins de s’aliéner ses compagnons d’armes.
    Une autre affaire juridique l’occupait. Julius Antiochus, soldat du vexillatio de Legio IIII Scythica, de la centurie d’Alexandre, et Aurélia Amimma, fille d’Abouis, résidents d’Arété, divorçaient. Ils se détestaient cordialement et il y avait de l’argent en jeu. Les documents étaient ambigus, les témoins en total désaccord. Ballista se prononça en faveur du soldat. Il avait conscience que sa décision était plus politique que juste. L ’imperium l’avait corrompu ; une fois de plus, la justice était bannie sur une île-prison.
    Au matin du troisième jour après sa réunion avec la boulé, Ballista jugea qu’assez de temps s’était écoulé : les conseillers devraient s’être calmés. Versatiles comme l’étaient les Syriens, ils pourraient même s’être rangés à l’avis de Ballista. Oui, il détruisait leurs maisons, profanait leurs tombes et leurs temples, anéantissait leurs libertés, mais c’était au nom d’une liberté supérieure – la liberté supérieure d’être sujet de l’empereur romain plutôt que du roi perse. L’ironie fit sourire Ballista. Pline le Jeune avait mieux que tout autre exprimé le concept de libertas : tu nous ordonnes d’être libres, alors nous le serons.
    Ballista envoya des messagers chez Iarhai, Ogelos et Anamu pour les convier à dîner avec lui et trois de ses officiers supérieurs le soir-même. Bathshiba était bien sûr invitée, elle aussi. Se souvenant de la superstition romaine qui voulait que les convives ne fussent pas en nombre pair, il manda aussi Callinicus, le sophiste. Il demanda à Calgacus de dire au cuisinier de préparer un dîner spécial, de préférence avec des anguilles fumées. Le vieil Hibernien eut l’air interloqué, comme si, de sa très longue vie, il n’avait entendu une requête aussi outrancière ; cela déclencha un nouveau flot de bougonnements :
    — Oh oui, bien sûr, quel grand Romain tu fais… Et puis quoi encore… Pourquoi pas des foutues cervelles de paons et des muscardins roulés dans du miel, tant que tu y es.
    Après avoir enjoint Maximus et Demetrius de l’accompagner, il annonça qu’il se rendait à l’agora. Prétendument pour vérifier que les édits concernant le prix des vivres étaient respectés, mais en réalité, Ballista voulait juste sortir du palais, quitter la scène de ses douteuses décisions de justice. Les jugements qu’il avait prononcés le tourmentaient. Il admirait beaucoup de choses chez les Romains – leurs engins de siège, leurs fortifications, leur discipline et leur logistique, leurs hypocaustes [60] et leurs thermes, leurs chevaux de course et leurs femmes – mais il trouvait leur libertas illusoire. Il avait dû demander la permission impériale de vivre là où il habitait, d’épouser la femme qu’il avait choisie. En fait,

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