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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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de maintenir une certaine hétérogénéité dans l'équipe, de manière à en assurer un relatif équilibre et à pouvoir, le cas échéant, opposer les uns aux autres, ou varier les combinaisons.
    D'ailleurs à quoi bon changer les hommes, puisque — sauf rarissime exception — il n'aurait pas d'autre solution de remplacement que le recours à tel ou tel de ces grands bourgeois, ralliés mais foncièrement orléanistes, hostiles aux conceptions qui sont les siennes?
    Car Louis Napoléon a vu juste : en dehors de Persigny, qui est vraiment bonapartiste? Il n'y a guère qu'Émile Ollivier et Victor Duruy pour avoir réellement épousé, chacun à sa manière, les idées de l'empereur...
    Comment en être surpris? Il n'y avait pas d'élite bonapartiste. La plupart des compétences dont Louis Napoléon dut s'entourer étaient celles d'hommes que rien, vraiment rien ne prédisposait à partager ses propres rêveries.
    Ce sont des bourgeois, parfois même, on l'a dit, de grands bourgeois, généralement nés au début du siècle, que le barreau, par exemple, a amenés à la vie parlementaire et qui ont commencé leur carrière sous la monarchie de Juillet. Avant tout des hommes d'ordre, qui n'exècrent rien tant que la révolution et les rouges. Ils n'aiment pas toujours les curés, mais tiennent à la religion en tant qu'instrument de la stabilité sociale. Ce ne sont pas des théoriciens ou des idéologues, mais des hommes de dossiers. Ce qu'ils recherchent pour eux-mêmes, c'est le pouvoir et parfois, accessoirement, l'argent. Le reste — y compris pour nombre d'entre eux, la vie mondaine — importe peu. Dans la conduite des affaires, ils sont capables de méchanceté et de haine, et leurs rivalités sont violentes. Au moins ont-ils généralement le sens du service de l'État même s'ils l'assimilent parfois exclusivement à lapérennité de l'ordre social. Ils sont attachés à l'empereur dans la mesure où il incarne le système, mais restent tout à fait imperméables au côté mythique du personnage. A cet égard, ils peuvent considérer Morny comme l'un des leurs. A l'inverse, Persigny doit leur sembler débarquer d'une autre planète.
    De ce groupe d'hommes, Rouher est probablement le plus caractéristique, le plus brillant et, finalement, le plus important. Né en 1814, fils d'un avoué de Riom, il fait son droit à Paris avant de s'établir comme avocat dans sa ville natale. Il s'y distingue par son talent. Candidat conservateur, il est battu aux élections de 1846. Pas découragé mais éclairé, il se présente en 1848 comme républicain avancé et il est élu, puis réélu en 1849.
    Les scrupules idéologiques ne l'étoufferont jamais. Il reniera vite son engagement à gauche, sa capacité à défendre les dossiers et les causes les plus contradictoires étant d'ailleurs son signe distinctif. Rallié au parti de l'Élysée, il confirmera son choix après le coup d'État; comme ministre des Travaux publics, il prendra part, tant au développement du réseau ferroviaire qu'à la négociation du traité franco-anglais. Il deviendra ministre d'État en 1863 et fera figure de véritable vice-empereur avant que Louis Napoléon ne fasse le choix d'Ollivier. Proche de l'impératrice, il se sera battu tout au long de l'Empire contre le danger que présentait à ses yeux la moindre ébauche d'une dérive libérale et il s'illustrera par sa puissance de travail et son incomparable maîtrise du débat parlementaire.
    On ne saurait prétendre que Louis Napoléon eut pour lui beaucoup d'affection. Il n'en fut probablement pas de même pour Billault, dont la disparition en 1863 causa à l'Empereur un chagrin visible. Originaire de l'Ouest où il se classait volontiers parmi les « Bleus », Billault, conservateur mais très anticlérical, se fit élire dans l'Ariège comme député d'opposition à Louis-Philippe. D'origine modeste, il voulait un gouvernement fort, s'élevant au-dessus des partis et tout entier acquis à la cause nationale.
    Rallié au prince-président, il fut préféré à Morny pour devenir le premier président du Corps législatif. C'est à ce titre que lui revint la charge, dans la nuit du 1 er au 2 décembre 1852, d'offrir à Louis Napoléon sa couronne. Ministre de l'Intérieur en 1854, il céda sa place en 1858, après l'attentat d'Orsini, mais la reprit au début de 1859. L'année suivante, il devint ministre sans portefeuille, chargé avec Magne de défendre la politique du

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