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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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propose à la France n'est pas, comme cela pourra être le cas plus tard, un dérivatif offert à des Français qu'on veut détourner de tentations revanchardes.
    Dans ce domaine, cependant, comme dans bien d'autres, on s'est évertué à minimiser le rôle personnel qui fut celui de Louis Napoléon et le mérite qui lui revient.
    A parcourir l'historiographie officielle, on serait tenté, en effet, de croire que l'expansion coloniale se fit, pratiquement, à son insu. Lavisse, sur ce point, s'est probablement surpassé. Il écrit, sans gêne apparente, que « l'initiative de quelques officiers fit, à peu de frais, du Sénégal et de la Cochinchine les amorces d'un Empire colonial français en Afrique et en Asie ». C'est faire peu de cas d'une politique qui n'a pourtant pas manqué de cohérence ; c'est passer sous silence tout ce qui se fit ou se prépara, de surcroît, dans le Pacifique, dans l'océan Indien, ou au Moyen-Orient.
    Pourquoi omettre de signaler que la plupart des mesures intelligentes et novatrices prises par Louis Napoléon dans ledomaine militaire concernèrent notre capacité d'intervention outre-mer? La Légion étrangère, le corps d'infanterie de marine, les tirailleurs algériens, les chasseurs d'Afrique sont bien entraînés et particulièrement aptes aux coups de main. Par ailleurs, Louis Napoléon, soucieux de la modernisation de la marine, dont Chasseloup-Laubat lui avait démontré la nécessité, dégagea les crédits nécessaires pour la mise en chantier de gros cuirassés à hélices (quinze seront en service dès 1865) et de vapeurs-transports de troupes. Ces adaptations technologiques expliquent la redoutable efficacité des interventions françaises : la marine bombarde, l'infanterie débarque, et une fois le pays pacifié, on laisse quelques sous-officiers qui vont servir d'instructeurs à des soldats qu'on recrutera et qu'on formera sur place.
    Mais Lavisse et ses émules feignent aussi d'ignorer le caractère profondément original du nouveau mode de relations qui s'instaure entre la métropole et ses colonies. Depuis le XVIII e siècle, les possessions françaises d'outre-mer étaient soumises au système du pacte colonial : elles n'exportaient que vers la métropole et n'importaient que de la métropole. Louis Napoléon a voulu rompre avec une formule aussi radicalement contraire tant à ses convictions libre-échangistes qu'à ce qu'il considère comme l'intérêt bien compris de l'ensemble français. Pour lui, à l'échelle de la planète, le bien commun, à commencer par celui de la France, exige que chacun puisse commercer avec le monde entier.
    Dès 1861, on commença à reconnaître à nos colonies la liberté d'importation et d'exportation. Dès lors, toute la politique coloniale changeait de signification et d'objet. Les colonies n'étaient plus une chasse gardée; leurs ressources naturelles pouvaient avoir d'autres utilisateurs que la métropole. Dans ce contexte nouveau, elles devenaient autant de points d'appui pour la contribution de la France à l'expansion du commerce mondial, conçue comme facteur de paix et de rapprochement entre les nations.
    Adrien Dansette s'est demandé si l'engagement personnel de Louis Napoléon dans l'aventure coloniale n'avait pas d'autres motivations que l'intérêt économique. Dans la négative, n'aurait-il pu se contenter de prendre pied pacifiquement dans les territoires concernés?
    Il est bien possible en effet que l'empereur ait été sensible à la perspective de voir « le drapeau français victorieux en Europe, en Asie, en Afrique, en Amérique ». Mais les faits démontrent que,fidèle à son habitude, il n'eut recours à la guerre que comme à un expédient. Au demeurant, les reproches qu'on lui adresse ne sont pas toujours cohérents : ne l'a-t-on pas accusé — à tort — d'avoir failli réduire à néant les efforts de ses amiraux en Cochinchine, en envisageant de se contenter d'un simple protectorat au lieu d'une prise de possession en bonne et due forme?
    Cette approche nouvelle des problèmes coloniaux, nul exemple ne l'illustre mieux que la politique conduite en Algérie, qu'inspire un maître mot : le développement. Ce sont des relations originales que l'empereur cherche à organiser avec ce territoire, sur d'autres bases que celles de dominant à dominé. Comprenant que l'Algérie avait une personnalité propre, il conçut l'idée d'en faire une entité distincte, qui serait reliée à la France par les

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