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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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de succès quand il est assez maladroit pour se faire prendre en flagrant délit. »
    Étonnant article. Au cas où Louis Napoléon n'aurait pas déjà compris — c'est douteux — tout le parti à retirer de l'incident, voilà que pratiquement on lui indique la marche à suivre.
    Le jour même il est à l'Assemblée ; il y rappelle qu'il n'a de comptes à rendre sur sa « conduite parlementaire » qu'à ses électeurs, et s'engouffre dans la brèche qu'on lui a si consciencieusement et si généreusement ouverte:
    « De quoi m'accuse-t-on?
    « D'accepter du sentiment populaire une candidature que je n'ai pas recherchée. Eh bien oui. Je l'accepte cette candidature qui m'honore, parce que trois élections successives et le décret unanime de l'Assemblée Nationale contre la proscription de ma famille m'autorisent à croire que la France regarde le nom que je porte comme pouvant servir à la consolidation de la Société ébranlée jusque dans ses fondements, à l'affermissement et à la prospérité de la République. »
    Et il termine par cet avertissement : « Je déclare à ceux qui voudraient organiser contre moi un système de provocation que dorénavant je ne répondrai à aucune interpellation. »
    En guise de réplique, Clément Thomas ne trouvera qu'une ineptie : « Je suis bien aise, dit-il, que mes interpellations aient amené M. Louis Bonaparte à cette tribune pour y poser nettement sa candidature et nous dire sur quels titres il l'appuyait. »
    Du moins quelques journaux comprirent-ils l'ampleur de la gaffe et surent-ils apprécier le parti qu'en avait tiré Louis Napoléon.
    Ainsi, pour l'Indicateur du 28 octobre, « M. Clément Thomas a fait sans le vouloir une grande maladresse, il a donné quelques voix de plus à la candidature du Prince Louis par l'amertume de ses interpellations... »
    Et le lendemain, la Guyenne, journal légitimiste de Bordeaux de renchérir : « Nous avons eu un discours de M. Louis Bonaparte. C'est à la mutinerie antinapoléonienne de M. Clément Thomas que nous le devons. »
    ***
    Dès lors, le combat électoral peut s'engager.
    Cette campagne présidentielle, nul ne sait au juste comment l'aborder et la conduire. Elle est la première du genre. On a de surcroît très peu de temps pour la concevoir, l'organiser et la mener. Il va falloir improviser.
    Dans une très large proportion, les neuf millions d'électeurs sont des illettrés, ne lisent pas les journaux, n'ont aucune culture politique, et ignorent jusqu'au nom des principales personnalités en lice.
    Pour les atteindre, il est donc nécessaire de s'assurer des relais. C'est chose relativement aisée pour le candidat officiel, dont le rôle sera tenu par Cavaignac en faveur duquel le ministre de l'Intérieur, Dufaure, va mobiliser les préfets.
    Louis Napoléon ne dispose pas — pas encore — de telles facilités. Sa campagne, il décide de l'organiser autour de trois axes essentiels : la presse qui lui est favorable, sans entretenir d'illusion sur son impact; l'impression d'affichettes et de brochures, dont on s'emploiera à fournir les textes; les contacts personnels — qu'il assumera lui-même - avec des personnalités qu'on estime représentatives des grands courants d'opinion et dont on peut espérer soit l'appui, soit la neutralité.
    Pour tout cela, il faut des moyens.
    Les journaux, les affiches, les hommes même, trop souvent, ont un prix... En conséquence, il faut de l'argent, beaucoup d'argent. Il s'agit de le rassembler, et vite.
    La rue de Poitiers apporte une contribution non négligeable, mais qui semble insuffisante. Louis Napoléon emprunte donc 324 000 francs au marquis Pallavicini, et Miss Howard lui ouvre un droit de tirage sur sa fortune, qui est immense. Plus tard, il faudra rembourser, et il le fera, sou par sou. Mais, dans l'immédiat, le voilà paré.
    Du côté des collaborateurs immédiats, c'est moins brillant. Un comité central électoral est installé au 10, boulevard Montmartre, sous la houlette de Martin-Bruerre et Patorni. C'est finalement un personnel assez médiocre, qui ne lui sera pas d'une grande utilité. Comme dans tous les quartiers généraux de campagne, on pérore, on s'épie, on perd son temps.
    Louis Napoléon, très sagement, s'installe ailleurs. C'est à l'hôtel du Rhin qu'il va recevoir et mener sa campagne personnelle. Là, il est entouré d'une équipe efficace d'où émergent deux hommes qui continueront à jouer auprès de lui un rôle majeur.
    Le premier

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