Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
Vom Netzwerk:
est Mocquard, qui sera son chef de cabinet, et qui tiendra son secrétariat avec talent. Il a été tour à tour diplomate et fonctionnaire, avant de se lancer dans le journalisme. Il a de la méthode, de l'expérience et une bonne connaissance du milieu et des hommes politiques.
    L'autre est un militaire, le chef d'escadron Fleury, qui va bien vite compléter Mocquard, dans un tout autre registre. Fleury, alors âgé de trente-trois ans, a eu l'occasion de rencontrer Louis Napoléon à Londres, et c'est à tout hasard qu'il est passé du côté de l'hôtel du Rhin. Cet homme, qui a dilapidé son patrimoine et cherche à refaire fortune, qui a obtenu de beaux états de service en Algérie, et a été tenté de suivre le duc d'Aumale, comprend vite où est le chemin le plus prometteur. Il va rapidement faire merveille et se révéler indispensable. C'est tout à la fois le compagnon du prince, son garde du corps — avec un revolver et une canne-épée - et son secrétaire militaire. C'est aussi l'exécuteur des basses oeuvres, car il n'a pas froid aux yeux... Son jugement sur l'entourage est dépourvu d'indulgence, mais sans doute assez proche de la vérité: on ne trouve autour du prince, explique-t-il, « que vieux débris inconnus ou discrédités ».
    D'autres hommes commencent à jouer un rôle non négligeable : Persigny, bien sûr, Piat aussi, et Morny, le demi-frère du prince.
    Mais en pratique, dans la campagne, c'est bien Louis Napoléon qui joue le rôle majeur. Et d'abord, pour définir la stratégie. Elle est claire, et conforme à la recommandation maternelle que le fils n'a décidément pas oubliée: il ne faut décourager personne.
    Alors, il reçoit, il écoute, il opine vaguement et surtout se garde bien de contredire. Ses contacts sont plus qu'éclectiques:Thiers, bien sûr, mais aussi Proudhon, Odilon Barrot, et encore Berryer, Montalembert, et tant d'autres...
    Avec chacun, son attitude est un mélange subtil d'humilité — il s'informe — et d'habileté — on peut toujours le croire acquis...
    Même Victor Hugo va s'y laisser prendre. Louis Napoléon se dérange pour rencontrer l'ancien pair de France, membre de l'Académie; il découvre à cette occasion la place des Vosges, et s'émerveille... Hugo ne lui est pas acquis d'avance. Son journal, l'Événement, n'a marqué aucun enthousiasme devant sa candidature.
    Le maître de maison le fait asseoir sur un coffre et l'écoute. Louis Napoléon trouve alors les mots qui conviennent, les mots qui vont entraîner l'adhésion du grand homme. Hugo a transcrit, à sa manière, l'entretien dans Histoire d'un crime. C'est du grand art, même si le texte, apocryphe, doit être reçu avec précaution.
    « Je viens m'expliquer avec vous. On me calomnie. Est-ce que je vous fais l'effet d'un insensé? On suppose que je voudrais recommencer Napoléon? Il y a deux hommes qu'une grande ambition peut se proposer pour modèles : Napoléon et Washington. L'un est un homme de génie, l'autre est un homme de vertu [...].
    « La république étant donnée, je ne suis pas un grand homme, je ne copierai pas Napoléon; mais je suis un honnête homme, j'imiterai Washington.
    « Mon nom, le nom de Bonaparte, sera sur deux pages de l'Histoire de France: dans la première, il y aura le crime et la gloire, dans la seconde, il y aura la probité et l'honneur. Et la seconde vaudra peut-être la première. Pourquoi? parce que si Napoléon est plus grand, Washington est meilleur. Entre le héros capable et le bon citoyen, je choisis le bon citoyen. Telle est mon ambition. »
    Falloux, qu'il rencontre aussi, et qui cherche à lui arracher des engagements pour l'enseignement catholique ou sur la question romaine, ressort de l'entretien sans être véritablement dupe, mais en laissant tout de même entendre qu'il a apprécié de pouvoir s'exprimer : « Tous trouvent en lui un interlocuteur poli, modeste, interrogeant rarement, écoutant beaucoup. »
    Ainsi sont faits les gens qui viennent monnayer des suffrages : plutôt que de promesses dont ils ne croient probablement pas unmot, ils ont besoin de considération et pour leur personne et pour leurs thèses. Et de considération, Louis Napoléon n'est pas avare. Duplicité, fourberie? Assurément non. Il est simplement un adepte, avant l'heure, du « on verra bien » du général de Gaulle ou de Georges Pompidou. Et puis, se reconnaissant une vocation à la synthèse entre les partis si divisés, pourquoi irait-il dire à tel ou

Weitere Kostenlose Bücher